Alfred Hitchcock, le maître du suspense, a popularisé un truc de scénariste appelé MacGuffin (parfois écrit McGuffin, histoire de compliquer un peu). En gros, c’est un objet, un dispositif, voire une personne, qui sert de déclencheur à l’intrigue. Ça se résume à n’importe quoi qui met l’histoire en branle ou la fait avancer, d’une manière ou d’une autre. Pour Hitchcock, les oiseaux étaient le MacGuffin dans… ben, Les Oiseaux, évidemment. Et il en a utilisé d’autres, comme la mère de Norman Bates dans Psychose, pour que la tension monte, monte…
Mais attention, même s’il a baptisé le concept, Hitchcock n’a pas l’exclusivité des MacGuffins. Ils existent depuis belle lurette, surtout dans des œuvres de fiction assez incroyables. On va jeter un œil à dix des MacGuffins les plus mémorables du cinéma.
Ah, et petit avertissement : on va forcément révéler des bouts d’intrigues. Si vous n’avez pas vu les films, avancez avec prudence. Surtout pour Citizen Kane, parce qu’on raconte la fin. Vous voilà prévenus !
10. Doug, le grand absent de Very Bad Trip

Beaucoup de gens l’oublient peut-être en regardant le film, mais si nos compères se retrouvent dans un pétrin aussi monumental pendant leur gueule de bois carabinée, c’est à cause de leur quête pour retrouver Doug. C’était pour son mariage qu’ils étaient à Vegas, après tout.
Doug allait se marier, et ils fêtaient ça avec un enterrement de vie de garçon des familles. On pourrait presque l’oublier, ce Doug, vu qu’il n’apparaît qu’au début du premier acte et quelques petites minutes à la fin. Trouver Doug, c’est littéralement toute la trame du film, si on y réfléchit bien. Le fait qu’ils se réveillent avec un tigre et un trou noir à la place de leurs souvenirs de la veille, c’est juste la cerise comique sur le gâteau qu’est Very Bad Trip.
Certains MacGuffins sont sous notre nez tout le film, mais Doug, lui, c’est l’exemple parfait du MacGuffin qui se fait désirer et n’apparaît presque jamais. C’est assez malin, non ?
9. Les plans de l'Étoile de la Mort dans Star Wars

Grâce à Rogue One, on sait enfin comment les Rebelles ont mis la main sur les plans de l’Étoile de la Mort. D’ailleurs, Rogue One utilise aussi ces fameux plans comme son propre MacGuffin. Malin. Mais dans le Star Wars original, c’était l’élément principal qui faisait avancer l’histoire, un truc de dingue.
Après l’abordage du Tantive IV et qu’on apprend que « les plans de l’Étoile de la Mort ne sont pas dans l’ordinateur principal », l’Empire ne recule devant rien pour les récupérer. Les Stormtroopers suivent R2-D2 et C-3PO jusqu’à la surface de Tatooine et, soyons honnêtes, ils ne font pas dans la dentelle en carbonisant l’oncle et la tante de Luke. Tout ça pour des plans !
Ensuite, on rencontre Han et Chewie alors que les plans voyagent à travers l’espace pour finalement atteindre l’Alliance Rebelle. Objectif : les décortiquer pour trouver une faille. La preuve que c’était LE MacGuffin ? Si Vador les avait trouvés sur le vaisseau au début, c’était plié. Ils avaient la Princesse Leia et auraient pu éradiquer l’Alliance Rebelle « d’un seul coup » parce que le secret de leur vulnérabilité ne serait jamais tombé entre les mains de leurs ennemis. Ouf !
8. La mallette de Pulp Fiction

Le truc génial avec les MacGuffins, c’est qu’on n’a pas toujours besoin de savoir ce qu’ils sont. Les personnages à l’écran, eux, ont besoin de cette info pour continuer à bouger. Mais nous, spectateurs, est-ce qu’on a VRAIMENT besoin de savoir ce qu’il y a dans cette mallette que tout le monde se trimballe dans Pulp Fiction ?
La réponse courte est : non, bien sûr. Ça n’a aucune importance. Tout ce qu’on doit savoir, c’est que c’est quelque chose d’important. Très important, même, vu comment ils se démènent.
Pendant des années, Internet a spéculé sur ce qui pouvait bien se trouver dedans. Les théories de fans sont allées bon train : le butin de diamants volés dans Reservoir Dogs, le nez de Rudolph, l’autre gant d’O.J., l’Oscar que Quentin Tarantino espérait gagner, ou même l’âme de Marsellus Wallace (ce qui expliquerait le pansement qu’il avait sur la nuque avant de récupérer la mallette). Franchement, certaines sont plus crédibles que d’autres.
Tarantino a fini par avouer qu’il n’y a pas d’explication officielle pour le contenu de la mallette. Elle a été écrite spécifiquement dans le scénario pour être un MacGuffin intrigant. Et ça a marché du tonnerre !
7. Le Dispositif Genesis dans Star Trek II et III

Commençant dans Star Trek II : La Colère de Khan et se terminant dans Star Trek III : À la recherche de Spock, on pourrait croire que le moteur de l’intrigue, c’est la rage de Khan envers Kirk ou la haine de Kirk pour les Klingons. Mais en réalité, c’est le Dispositif Genesis.
Conçu à l’origine pour, littéralement, créer la vie, le Dispositif Genesis était vu par ceux qui n’étaient pas de Starfleet comme l’arme ultime. Capable de détruire des planètes entières et d’annihiler toute vie… du moins, la vie qui s’y trouvait déjà. Une sacrée promesse, ou menace, c’est selon.
Le Dispositif Genesis est responsable de la rencontre entre Kirk et son fils. Plus tard, alors que l’appareil aide à maintenir Kirk en vie, il est convoité par les Klingons, qui finissent par tuer le fils de Kirk par pur dépit. Tragique.
Quand le corps de Spock arrive sur la planète Genesis, il est ranimé par la science même de cet appareil. Cela pousse l’équipage de l’Enterprise à s’emparer illégalement de leur vaisseau pour sauver leur ami tombé… puis relevé. Comme MacGuffin, le Dispositif Genesis est certainement l’un des plus intéressants de cette liste, vous ne trouvez pas ?
6. Le soldat Ryan dans Il faut sauver le soldat Ryan

On a plein d’exemples de personnes utilisées comme MacGuffins, mais peu ont été aussi cruciales que le soldat James Francis Ryan dans le film qui porte le nom de son sauvetage. Ce ne sont pas les Nazis ou l’Opération Overlord qui sont au centre de Il faut sauver le soldat Ryan, mais plutôt la mission entreprise par Tom Hanks et sa bande de Rangers. Leur but ? Sauver le soldat titulaire d’une mort quasi certaine.
Pour être juste, Ryan joue un rôle important dans l’histoire. Mais ses actions, une fois retrouvé, constituent une autre étape du processus MacGuffin qui a mené le récit à sa fin poignante. Quand il refuse d’abandonner son unité et de suivre les Rangers en lieu sûr, beaucoup d’entre eux sont tués. Un choix cornélien, si l’en est.
L’histoire boucle ensuite la boucle avec le vieil homme dans le cimetière, dont on comprend alors qu’il s’agit de Ryan. Il demande à sa femme s’il a été un homme bon, s’il a mené une belle vie. Même en tant que MacGuffin de l’histoire, Ryan savait que ses actions étaient responsables de la progression du récit. Ça donne à réfléchir.
5. L'Anneau Unique dans Le Seigneur des Anneaux

Quand on parle d’artefact puissant servant de MacGuffin, difficile de ne pas penser à l’Anneau Unique. Non seulement c’est l’anneau que Sauron est déterminé à récupérer tout au long de la série (dans les deux trilogies de films et tous les livres), mais il est aussi incroyablement puissant en lui-même. On apprend que ce n’est pas juste l’anneau le plus puissant, mais celui qui lie tous les autres.
« Un Anneau pour les gouverner tous, Un Anneau pour les trouver, Un Anneau pour les amener tous et dans les ténèbres les lier. » Ça pose l’ambiance, non ?
La Communauté de l’Anneau se lance dans une quête épique pour ramener l’anneau à la Montagne du Destin afin qu’il y soit détruit. Cette quête n’est que le début d’une aventure qui entremêle les vies de tous les habitants de la Terre du Milieu. Une sacrée responsabilité pour un si petit objet.
Même si le livre Le Hobbit ne s’attarde pas sur la vraie nature de l’origine ou du pouvoir de l’Anneau, la trilogie de Peter Jackson l’intègre à l’histoire. Cependant, dans Le Hobbit, le trésor – et plus spécifiquement, l’Arkenstone sur lequel Smaug aime se prélasser – est le MacGuffin de cette trilogie-là. Tolkien savait y faire avec les objets de quête !
4. Le Saint Graal dans Indiana Jones et la Dernière Croisade

On aurait pu choisir n’importe quoi, de l’Arche d’Alliance à ces ridicules crânes de cristal, parce que le trésor dans n’importe quel film d’Indiana Jones est, par définition, un MacGuffin. On a opté pour le Saint Graal d’Indiana Jones et la Dernière Croisade parce que c’est le MacGuffin ultime pour tout chasseur de trésors qui se respecte. C’est probablement l’exemple le plus facile de MacGuffin au cinéma, car il est spécifiquement désigné comme l’objectif de tout le monde dans le film.
D’abord, on découvre que le père d’Indy le cherchait. Puis on apprend qu’Adolf Hitler et les Nazis le cherchent aussi. Enfin, on a Indiana Jones qui le cherche. Mais en réalité, il ne cherchait que son père. Il n’aurait pas eu besoin de chercher son vieil homme si ce n’était pour la quête du Saint Graal. C’est fou comme les choses s’enchaînent.
Quand il est finalement trouvé et qu’il a rempli son office, il est même mis de côté ou jeté, bien qu accidentellement au début. Quand un MacGuffin a servi son but de faire avancer l’histoire, peu importe s’il « vit ou meurt », seul compte le fait qu’il ait existé en premier lieu. Et hop, à la trappe !
3. Le Faucon Maltais dans Le Faucon Maltais

Les films classiques tournés à l’époque où Hitchcock a inventé le terme « MacGuffin » regorgent de MacGuffins remarquables, et le Faucon Maltais du film Le Faucon Maltais est probablement l’un des plus connus de tous. Dans le film, le Faucon est l’objet que tout le monde désire, et il propulse les actions de toute la galerie de personnages. Ce n’est pas seulement le Faucon lui-même qui est le MacGuffin ; la recherche de celui-ci dynamise aussi l’intrigue.
Quand Gutman et Cairo trouvent le Faucon et apprennent que c’est un faux, ils ne sont pas désemparés ni même en colère. Ils deviennent presque euphoriques à l’idée qu’ils peuvent continuer à le chercher. C’est un peu tordu, mais ça se tient.
C’est la recherche – la poursuite mondiale du Faucon – qui donne un sens à leur vie. L’idée qu’ils puissent continuer sur cette voie ne fait que plaire aux personnages. Ce qui est si intéressant avec le Faucon Maltais, c’est qu’il n’a de valeur que parce qu’il est si ardemment recherché par les personnages du livre ou du film. La valeur implicite est ce qui en fait un MacGuffin parfait, un peu comme celle attribuée à la mallette dans Pulp Fiction.
2. Les lettres de transit dans Casablanca

Le film Casablanca n’est pas seulement une mine de répliques parmi les plus cultes jamais écrites pour le cinéma, c’est aussi l’un des premiers exemples de MacGuffin sur lequel le public ne se concentre même pas vraiment. Tout à l’écran tourne autour de la romance entre Rick Blaine, joué par Humphrey Bogart, et Ilsa Lund, interprétée par Ingrid Bergman. C’est ce qui captive le public. Mais pour les personnages du film, tout tourne autour des lettres de transit.
Tout au long du film, la motivation de Rick est la sécurité de son ancien amour. À la fin, il la fait même monter dans l’avion après avoir finalement obtenu les lettres de transit leur permettant de fuir le Maroc occupé par les Nazis. Un vrai gentleman, ce Rick, malgré les apparences.
Les lettres ont été obtenues en assassinant deux courriers allemands, donc une grande importance leur est accordée. Malgré tout, le public est plus captivé par la romance entre Rick et Ilsa que par le MacGuffin, faisant des lettres de transit l’un des plus ingénieux de tous. Chapeau bas !
1. Rosebud dans Citizen Kane

Citizen Kane s’ouvre sur la mort de Charles Foster Kane. Il tient une boule à neige qui tombe au sol juste après qu’il a murmuré son dernier mot : « Rosebud ». La signification de ce mot est le véritable MacGuffin du film, car elle lance Jerry Thompson dans la mission de découvrir qui ou quoi était Rosebud. Un sacré point de départ.
Que pouvait bien vouloir dire cet homme richissime avec son dernier souffle ? C’est la volonté de découvrir ce que cela signifie qui fait de « Rosebud » le plus grand MacGuffin cinématographique de tous les temps. Ni plus, ni moins.
Tout le film tourne autour de la quête de Thompson pour apprendre la signification du mot. Mais à la fin, il ne la découvre jamais. Seul le public connaît la signification du terme lorsque la caméra balaie la pièce à Xanadu pour révéler le nom de marque du traîneau : Rosebud.
Le traîneau est ce avec quoi Kane, âgé de huit ans, jouait le jour où il a été enlevé à sa maison du Colorado. Il est considéré comme une camelote et est brûlé, laissant la question et le MacGuffin à jamais sans réponse dans les limites du film. Une fin douce-amère, non ?
Selon la source : collider.com