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L’escalator en panne, métaphore d’un système à l’agonie

Le mardi 23 septembre 2025 restera marqué dans les annales diplomatiques comme le jour où Donald Trump a transformé l’Assemblée générale des Nations Unies en théâtre de sa propre grandeur. Dès son arrivée au siège de l’organisation new-yorkaise, les signes avant-coureurs de ce qui allait devenir un spectacle d’humiliation publique se manifestaient déjà. L’escalator mécanique s’arrête brutalement au milieu de sa montée — première métaphore accidentelle d’un système international grippé par ses propres dysfonctionnements. Trump, l’homme qui se proclame maître du chaos organisé, y voit immédiatement le symbole parfait de ce qu’il considère comme l’incompétence généralisée de l’ordre onusien. Cette panne technique devient sous sa plume acerbe l’incarnation tangible d’une institution qu’il juge fondamentalement défaillante.

Mais c’est la suite qui transforme cette anecdote technique en véritable déclaration de guerre diplomatique. Face aux 150 dirigeants mondiaux médusés, Trump ne se contente pas de critiquer — il humilie, il démantèle, il pulvérise méthodiquement l’autorité morale d’une institution vieille de 80 ans. « Tout ce que j’ai eu de l’ONU, c’est un escalier mécanique qui s’est arrêté en plein milieu en montant et un télé-prompteur qui ne fonctionnait pas », lance-t-il avec un mépris à peine voilé. Cette sortie fracassante n’était que l’ouverture d’un réquisitoire sans précédent contre l’ordre mondial établi, un démontage systématique qui révèle les fissures profondes d’un multilatéralisme en pleine décomposition.

Cinquante-six minutes pour dynamiter huit décennies de diplomatie

Pendant 56 minutes interminables — largement au-delà des 15 minutes normalement imparties aux chefs d’État —, Donald Trump a orchestré ce que les observateurs diplomatiques qualifient déjà de « démolition en règle » de l’institution qui l’accueillait. Ce n’était plus un discours présidentiel traditionnel, mais un véritable show à l’américaine où l’homme le plus puissant de la planète se posait en sauveur providentiel d’un monde qu’il juge en perdition totale. La BBC note qu’en 2018, « l’auditoire riait de ses affirmations parfois non fondées », mais cette fois, « les sourires avaient quitté la salle ». Le silence pesant qui accompagnait ses déclarations révélait l’ampleur du malaise diplomatique provoqué par cette performance hors normes.

Ce qui frappe d’emblée dans cette intervention, c’est l’audace inouïe avec laquelle Trump redéfinit unilatéralement les codes de la diplomatie internationale. « Quel est le but des Nations Unies ? », interroge-t-il avec une ironie cinglante avant d’asséner le coup de grâce : « Tout ce qu’elles semblent faire, c’est écrire une lettre aux mots forts, puis ne jamais donner suite à cette lettre. Ce sont des mots vides et les mots vides ne résolvent pas les guerres. » Cette caricature volontairement réductrice de l’action onusienne ne relève pas de l’incompréhension — elle constitue une stratégie délibérée de déconstruction des mécanismes multilatéraux qui contrarie son agenda unilatéraliste.

Le règlement de comptes avec l’ordre mondial commence

Mais Trump ne s’arrête pas à cette charge contre l’ONU. Son discours s’élargit rapidement en une attaque frontale contre l’ensemble des valeurs qui sous-tendent l’ordre international depuis 1945. Immigration, changement climatique, coopération internationale — tous ces piliers de la gouvernance mondiale moderne passent au hachoir de sa rhétorique populiste. « Il est temps de mettre fin à l’expérience ratée des frontières ouvertes », déclare-t-il en s’adressant directement aux dirigeants européens présents dans l’assistance. Cette injonction brutale révèle l’ampleur de son projet géopolitique : non seulement transformer l’Amérique, mais imposer sa vision du monde à l’ensemble de la communauté internationale.

L’Europe, cette « vieille dame » du multilatéralisme, devient sa cible privilégiée. Trump affirme sans détour que le continent « perd son patrimoine » à cause de l’immigration et encourage ouvertement l’Occident à fermer ses frontières aux migrants. Cette charge frontale contre les politiques d’accueil européennes s’accompagne d’une remise en cause brutale des accords climatiques, qu’il qualifie de « plus grande escroquerie de l’histoire ». En l’espace de quelques minutes, Trump dynamite ainsi les deux piliers fondamentaux de l’identité européenne contemporaine : l’humanisme migratoire et l’engagement environnemental.

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