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Le Congrès vient de franchir une ligne rouge

C’est fait. Les républicains du Congrès ont rejeté en bloc toute tentative démocrate de limiter les frappes militaires américaines dans les eaux internationales. Pas de débat sérieux. Pas de compromis. Juste un vote de parti discipliné qui donne carte blanche à l’administration Trump pour mener des opérations militaires partout sur les océans du globe sans autorisation préalable, sans surveillance parlementaire réelle, sans même l’obligation d’informer les élus avant d’agir. Cette décision, prise lors d’une session houleuse fin septembre 2025, marque un tournant historique dans l’équilibre constitutionnel américain. Le pouvoir de faire la guerre — censé appartenir au Congrès selon la Constitution — vient d’être effectivement délégué au président de manière quasi illimitée, du moins pour tout ce qui se passe en dehors des eaux territoriales. Trump peut désormais ordonner des bombardements, des raids, des assassinats ciblés n’importe où dans les soixante-dix pour cent de la surface terrestre couverte par les océans. Sans demander la permission à personne. Cette concentration de pouvoir militaire entre les mains d’un seul homme, particulièrement un homme aussi imprévisible et vindicatif que Trump, terrifie les experts en droit constitutionnel, les stratèges militaires sérieux et quiconque se souvient des catastrophes produites par les guerres présidentielles non contrôlées.

Les démocrates ont tenté d’imposer des garde-fous

L’amendement proposé par les démocrates était pourtant modéré, presque timide. Il ne cherchait pas à interdire les opérations militaires en eaux internationales — ce qui aurait été irréaliste — mais simplement à encadrer leur utilisation. Obligation d’informer les commissions de défense du Congrès dans les quarante-huit heures suivant toute frappe. Justification écrite des raisons légales et stratégiques de chaque opération. Interdiction explicite d’utiliser ces frappes pour des assassinats politiques ou des vendettas personnelles présidentielles. Révision parlementaire tous les six mois pour vérifier que les pouvoirs accordés ne sont pas abusés. Des mesures de bon sens, pensaient les démocrates. Des mesures qui auraient simplement rétabli un minimum de contrôle démocratique sur l’usage de la force létale. Mais pour les républicains, même ces garde-fous minimalistes constituaient une entrave inacceptable au pouvoir présidentiel. Leur argument ? Dans un monde dangereux où les menaces émergent rapidement, le commandant en chef doit pouvoir agir instantanément sans bureaucratie parlementaire. Traduction moins diplomatique : Trump doit pouvoir bombarder qui il veut, quand il veut, sans avoir à se justifier devant personne.

Les eaux internationales comme nouveau Far West

Techniquement, les eaux internationales n’appartiennent à personne. Elles constituent ce qu’on appelle en droit maritime les « eaux libres », accessibles à tous, contrôlées par aucun. Cette nature juridique particulière en fait un espace gris où les règles d’engagement habituelles deviennent floues. Si les États-Unis frappent une cible dans les eaux territoriales d’un pays, c’est clairement un acte de guerre contre ce pays. Mais frapper la même cible dans les eaux internationales ? La situation devient beaucoup plus ambiguë. Cette ambiguïté a toujours existé, mais elle était auparavant modérée par la retenue présidentielle et la surveillance parlementaire. Trump ne connaît pas la retenue. Et le Congrès républicain vient d’abandonner toute prétention de surveillance. Résultat : les océans du monde entier deviennent potentiellement des champs de bataille où l’armée américaine peut intervenir à volonté. Les navires iraniens en mer d’Oman ? Cibles potentielles. Les bateaux de pêche nord-coréens en mer du Japon ? Vulnérables. Les sous-marins russes en Méditerranée ? Exposés. Tout ce qui flotte sur les deux tiers de la surface terrestre peut désormais être détruit sur ordre présidentiel sans que personne à Washington ne puisse dire non.

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