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Une course suivie par tout le pays

La Virginie et le New Jersey sont les deux seuls États américains à tenir des élections de gouverneur l’année suivant une présidentielle. Cela confère à ce scrutin une importance disproportionnée : il devient un baromètre national pour évaluer l’humeur des électeurs face à l’administration Trump et anticiper les élections de mi-mandat de 2026. En 2021, le républicain Glenn Youngkin avait créé la surprise en battant le démocrate Terry McAuliffe avec environ 50,58% des voix, signalant un vent de changement dans un État qui penchait démocrate lors des présidentielles récentes. Cette victoire avait été analysée comme un rejet de certaines politiques progressistes et un signe avant-coureur de la vague républicaine aux midterms de 2022.

Aujourd’hui, les enjeux se sont inversés. Les démocrates espèrent reconquérir le poste de gouverneur et consolider leur majorité de deux sièges à la Chambre des délégués de Virginie. Ils visent plusieurs districts dans les banlieues et périphéries de Hampton Roads et de la capitale fédérale, où les républicains ne tiennent qu’à un fil. Aucun siège sénatorial n’est en jeu avant 2027, mais le contrôle de la chambre basse reste crucial pour faire passer des lois sur l’avortement, les droits LGBTQ+, l’éducation — autant de sujets brûlants qui divisent profondément l’électorat virginien. Pour les républicains, perdre la Virginie signifierait un revers symbolique majeur dans un État qu’ils considèrent comme gagnable.

Spanberger capitalise sur son avance confortable

Abigail Spanberger, ancienne membre du Congrès représentant un district swing pendant trois mandats, jouit d’une notoriété élevée et d’une image de modération qui séduit les indépendants et les banlieusards éduqués. Les sondages successifs lui donnent des taux de faveur avoisinant 47%, contre 44% de défaveur — un ratio équilibré qui suggère qu’elle a su construire une coalition large. Son adversaire Earle-Sears, bien que populaire auprès de la base républicaine, affiche un taux de faveur de 43% pour 46% de défaveur, révélant une difficulté à conquérir le centre politique.

Un sondage d’Emerson College publié début octobre montrait Spanberger à 52% contre 42% pour Earle-Sears — un bond spectaculaire de dix points pour la démocrate depuis janvier, alimenté par un revirement des électeurs indépendants et masculins. Les hommes, traditionnellement favorables aux républicains, se répartissent désormais à égalité entre les deux candidates (46% chacune), un changement sismique qui reflète peut-être un rejet de certaines positions jugées trop extrêmes de la part d’Earle-Sears. Les débats ont d’ailleurs cristallisé ces divergences, notamment sur l’avortement et les droits des personnes LGBTQ+, où Spanberger a martelé sa défense des libertés individuelles face à une adversaire perçue comme inflexible.

Les positions controversées d’Earle-Sears

Lors du débat télévisé du 9 octobre à Norfolk State, Earle-Sears a déclenché une tempête en affirmant que criminaliser le mariage homosexuel « n’est pas de la discrimination ». Elle a ensuite doublé la mise en soutenant qu’un employeur pouvait licencier quelqu’un en raison de son orientation sexuelle sans que cela constitue une injustice. Ces déclarations, qualifiées d’« homophobes » par le Comité national démocrate, ont suscité un tollé dans un État où 71% des électeurs soutiennent le mariage pour tous. Le DNC a immédiatement publié un communiqué cinglant, affirmant que de telles positions sont « disqualifiantes » et prouvent qu’Earle-Sears est « trop extrême pour la Virginie ».

Sur l’avortement, la républicaine soutient une interdiction à partir de six semaines de grossesse, sans exceptions pour le viol ou l’inceste — une position similaire aux lois adoptées au Texas et dans la majorité du Sud après la chute de l’arrêt Roe v. Wade. La Virginie reste le seul État du Sud à ne pas avoir imposé de restrictions supplémentaires post-Roe, et Spanberger a promis de protéger les droits reproductifs à travers tout le Commonwealth. Un sondage révèle que les électeurs font davantage confiance à Spanberger sur ces questions par une marge de vingt points. Earle-Sears a laissé une note manuscrite indiquant qu’elle est « moralement opposée » à un amendement constitutionnel protégeant la liberté reproductive — un détail exploité sans relâche par les démocrates pour mobiliser les électrices.

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