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Le USS Gerald R. Ford : colosse des mers en route vers les Caraïbes

Le USS Gerald R. Ford, commissoné en 2017, incarne la pointe absolue de la technologie navale américaine. Long de 334 mètres, pesant plus de 100 000 tonnes, propulsé par deux réacteurs nucléaires générant trois fois plus d’énergie que ceux des porte-avions de classe Nimitz, ce géant des mers représente à lui seul une nation flottante capable de projeter une puissance de feu dévastatrice n’importe où sur le globe. Son système électromagnétique de lancement d’avions—l’EMALS—permet de catapulter des appareils plus lourds, plus rapidement, avec des charges d’armement accrues, étendant leur rayon d’action et leur létalité.

Avec un équipage de 4 600 marins incluant son groupe aérien, le Ford peut embarquer jusqu’à quatre-vingt-dix aéronefs—chasseurs F/A-18 Super Hornet, avions de guerre électronique EA-18G Growler, avions radar E-2D Hawkeye, hélicoptères de combat MH-60 Seahawk. Cette armada volante peut frapper des cibles à des centaines de kilomètres, saturer les défenses aériennes ennemies, établir une suprématie aérienne totale en quelques heures. Le Pentagone a ordonné vendredi 24 octobre son redéploiement depuis la zone méditerranéenne vers le commandement sud—c’est-à-dire l’Amérique latine et les Caraïbes. Il faudra environ une semaine pour que ce mastodonte franchisse le détroit de Gibraltar, traverse l’Atlantique, et vienne se positionner à portée de frappe du Venezuela. Mais déjà, sa simple mise en mouvement constitue un message politique retentissant.

Une flotte complète : destroyers, sous-marins et forces amphibies

Le Ford ne navigue jamais seul. Son groupe aéronaval—Carrier Strike Group 12—comprend au moins cinq destroyers de classe Arleigh Burke équipés de missiles guidés Tomahawk capables de frapper des cibles terrestres à plus de 1 600 kilomètres, un croiseur lance-missiles, et un sous-marin nucléaire d’attaque dont la présence reste généralement non confirmée pour des raisons opérationnelles. Cette configuration standard permet de protéger le porte-avions contre les menaces aériennes, sous-marines et de surface, tout en offrant des capacités de frappe indépendantes massives.

Mais ce n’est pas tout. Début octobre, le Pentagone avait déjà déployé dans la région sud des Caraïbes environ dix mille soldats américains, incluant des éléments du 160e régiment d’aviation d’opérations spéciales—les fameux Night Stalkers qui fournissent un soutien héliporté aux unités d’élite comme les Navy SEALs et les Delta Force. Des porte-hélicoptères transportant quelque deux mille Marines—fer de lance des opérations de débarquement amphibie—accompagnent cette armada. À cela s’ajoutent des bombardiers stratégiques B-52 Stratofortress et B-1B Lancer effectuant des missions de survol à haute altitude au large des côtes vénézuéliennes, testant les défenses aériennes, recueillant du renseignement électronique, envoyant des signaux d’intimidation.

Comparaison historique : Cuba 1962

Les analystes militaires et les observateurs géopolitiques ne s’y trompent pas : cette concentration de forces constitue le plus important déploiement naval américain dans la région depuis la crise des missiles de Cuba en octobre 1962. À l’époque, le président Kennedy avait imposé un blocus naval pour empêcher l’Union soviétique d’installer des missiles nucléaires à portée immédiate du territoire américain. Le monde avait retenu son souffle pendant treize jours, au bord de l’apocalypse nucléaire. Finalement, Moscou avait reculé, les missiles avaient été retirés, et l’humanité avait échappé de justesse à l’anéantissement.

Aujourd’hui, bien sûr, il n’y a pas de missiles nucléaires soviétiques au Venezuela—mais il y a quelque chose d’aussi inacceptable aux yeux de Washington : un régime hostile, anti-américain, soutenu par la Russie et la Chine, contrôlant les plus vastes réserves pétrolières prouvées de la planète. Maduro représente tout ce que Trump déteste : un socialiste autoritaire qui résiste depuis des années aux sanctions américaines, qui refuse de plier, qui a transformé son pays en État-paria. Et maintenant que la saison des prix Nobel est passée—cette référence sarcastique au fait que Trump ne sera jamais couronné comme artisan de paix—toutes les options militaires sont sur la table. Sans limite morale, sans contrainte diplomatique, sans hésitation apparente.

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