Juin 2025 : Los Angeles, le premier domino
Tout a commencé discrètement en juin 2025, quand Trump a ordonné le déploiement de la Garde nationale à Los Angeles. La justification officielle ? Lutter contre la criminalité et protéger les agents fédéraux impliqués dans l’application des lois sur l’immigration. Le problème, c’est que la criminalité à Los Angeles suivait en réalité une tendance à la baisse, et le gouverneur de Californie, un démocrate, n’avait jamais demandé d’aide fédérale. Normalement, le déploiement de la Garde nationale d’un état nécessite soit la demande du gouverneur de cet état, soit l’invocation de pouvoirs présidentiels extraordinaires. Trump a choisi une troisième voie : fédéraliser unilatéralement la Garde nationale californienne, l’arrachant du contrôle du gouverneur et la plaçant sous commandement fédéral. Cette manœuvre a stupéfié les experts constitutionnels qui n’avaient jamais vu une telle action entreprise contre la volonté explicite d’un gouverneur en temps de paix.
Mais Trump n’en est pas resté là. Quelques semaines après le déploiement de la Garde nationale, il a franchi une ligne encore plus rouge : il a envoyé des Marines en service actif à Los Angeles, officiellement pour « protéger la propriété et les agents fédéraux ». C’était la première fois depuis des décennies que des troupes militaires actives étaient déployées sur le sol américain pour des opérations de maintien de l’ordre, violant potentiellement le Posse Comitatus Act — une loi fédérale de 1878 qui interdit explicitement l’utilisation des forces armées pour l’application des lois domestiques. Le 2 septembre 2025, un tribunal fédéral a statué que ce déploiement était effectivement illégal, forçant Trump à retirer les Marines. Mais au lieu d’accepter cette défaite juridique comme une limite à son autorité, Trump l’a vue comme un obstacle temporaire à contourner. Et il a passé les mois suivants à chercher exactement comment le faire — d’où sa menace actuelle d’invoquer la Loi sur l’insurrection.
Août : Washington D.C., la capitale sous occupation
En août 2025, Trump a étendu sa campagne de militarisation à Washington D.C., la capitale nationale elle-même. Le mémorandum présidentiel du 11 août justifiant le déploiement de la Garde nationale du district affirmait que la ville était « assiégée par la criminalité violente » et que « c’est une honte nationale que Washington D.C. ait un taux de criminalité violente plus élevé que certains des endroits les plus dangereux du monde ». Cette affirmation était non seulement exagérée, mais factuellement incorrecte. Les données locales sur la criminalité au moment du déploiement montraient que les crimes violents avaient déjà chuté de 26% entre 2024 et 2025. La ville s’améliorait, pas se détériorait. Mais les faits n’ont jamais vraiment importé dans cette campagne — ce qui importait, c’était de projeter une image de chaos urbain nécessitant une intervention fédérale musclée.
Le déploiement à Washington D.C. avait une dimension symbolique particulièrement inquiétante. C’est la capitale de la nation, le siège du gouvernement fédéral, et maintenant elle était sous occupation militaire ordonnée par le président lui-même. Des soldats de la Garde nationale en tenue de combat complète patrouillaient les rues, positionnaient des véhicules militaires devant Union Station et d’autres sites emblématiques. Pour quiconque connaît l’histoire mondiale, ces images évoquaient immédiatement des parallèles troublants avec d’autres moments où des dirigeants autoritaires ont militarisé leurs capitales pour projeter le pouvoir et intimider l’opposition. Trump, bien sûr, a présenté cela comme une mesure de « loi et ordre », mais le maire de D.C. et les élus locaux ont dénoncé ce qu’ils ont appelé une « occupation illégale » visant davantage à faire une déclaration politique qu’à résoudre de réels problèmes de sécurité publique. Et ils avaient raison — les troupes n’ont pas réduit significativement la criminalité, mais elles ont certainement créé une atmosphère d’état policier dans la capitale américaine.
Septembre-octobre : Memphis, Portland, Chicago dans le viseur
En septembre 2025, Trump a poursuivi son expansion territoriale, annonçant des déploiements à Memphis, Portland et Chicago — toutes des villes dirigées par des démocrates dans des états que Trump avait perdus lors de l’élection. Le schéma était désormais évident : ce n’était pas une réponse aux crises de sécurité publique réelles, c’était une campagne politique ciblée contre les bastions démocrates. Memphis a reçu des troupes fédérales en octobre, malgré les objections véhémentes du gouverneur du Tennessee et du maire de la ville. Portland a fait l’objet d’une bataille judiciaire acharnée, Trump ayant finalement obtenu une victoire temporaire lorsqu’une cour d’appel fédérale a statué qu’il pouvait continuer à envoyer des troupes dans tout l’Oregon pour le moment. Chicago restait en suspens, les tribunaux pesant encore les arguments juridiques.
Ce qui rendait ces déploiements particulièrement sinistres, c’est le langage que Trump utilisait pour les justifier. En septembre, lors d’un discours de 72 minutes devant les dirigeants du Pentagone, il a qualifié les villes américaines de « terrains d’entraînement » pour l’armée, suggérant que les soldats américains devraient pratiquer leurs compétences de combat urbain sur des citoyens américains. Il a décrit l’Amérique comme étant sous « invasion » et menant « une guerre de l’intérieur », exhortant les généraux à « gérer » cet « ennemi intérieur ». Cette rhétorique — transformer les concitoyens en ennemis, décrire les villes américaines comme des zones de guerre, présenter le déploiement militaire domestique comme un entraînement au combat — c’est exactement le genre de langage déshumanisant que les régimes autoritaires utilisent pour préparer leur population à accepter la violence d’état contre les dissidents. Trump ne cachait même pas ses intentions ; il les proclamait ouvertement, testant les limites de ce que l’Amérique tolérerait avant de dire « assez ».
La Loi sur l'insurrection : une arme dormante réveillée
 
    Les origines d’un pouvoir extraordinaire
Pour comprendre la menace que Trump brandit maintenant, il faut comprendre la Loi sur l’insurrection elle-même. Adoptée en 1807 et modifiée à plusieurs reprises depuis, cette loi autorise le président à déployer des troupes militaires en service actif sur le sol américain dans des circonstances extraordinaires. À l’origine, elle était conçue pour permettre au gouvernement fédéral de réprimer les rébellions armées, de protéger les droits constitutionnels face à l’obstruction locale (comme lors de la déségrégation scolaire dans les années 1950 et 1960), et de répondre aux catastrophes naturelles où les autorités locales sont dépassées. Historiquement, son utilisation a été rare et controversée. Les présidents qui l’ont invoquée l’ont généralement fait avec hésitation, consultation extensive, et face à des crises manifestement extraordinaires.
Trump, cependant, semble voir la Loi sur l’insurrection non pas comme un pouvoir d’urgence de dernier recours, mais comme un outil politique ordinaire qu’il peut déployer à volonté. Sa déclaration « je serais autorisé à faire ce que je veux » révèle une compréhension profondément déformée — ou pire, une manipulation délibérée — de ce que la loi permet réellement. Oui, techniquement, le président a le pouvoir d’invoquer la Loi sur l’insurrection. Mais il y a censé y avoir des critères, des justifications, des processus. La loi exige que le président détermine d’abord qu’une insurrection rend impossible l’application de la loi fédérale par les moyens ordinaires. Où sont ces insurrections dans les villes qu’il cible ? Los Angeles, Chicago, Portland — ce sont des villes fonctionnelles avec des gouvernements locaux opérationnels, des forces de police, des tribunaux. Il n’y a pas d’insurrection armée, pas de rébellion contre l’autorité fédérale. Il y a juste des gouvernements démocrates que Trump n’aime pas.
Le contournement du Posse Comitatus Act
La raison pour laquelle Trump est si obsédé par la Loi sur l’insurrection, c’est parce qu’elle représente pratiquement la seule exception légale au Posse Comitatus Act. Cette loi cruciale de 1878 interdit à l’Armée et à l’Armée de l’air d’être utilisées pour faire appliquer les lois domestiques, et par extension politique, elle s’applique également à la Marine et aux Marines. L’objectif était de prévenir exactement ce que Trump menace maintenant de faire : utiliser l’armée comme une force de police nationale sous contrôle présidentiel. Les rédacteurs du Posse Comitatus Act avaient vu les abus de la Reconstruction, quand les troupes fédérales avaient été utilisées pour des raisons politiques dans le Sud, et ils voulaient établir une séparation claire entre le pouvoir militaire et l’application civile de la loi. C’est un principe fondamental de la démocratie américaine : l’armée défend contre les menaces externes, la police gère l’ordre intérieur, et les deux ne doivent jamais fusionner.
Quand le tribunal fédéral a déclaré le déploiement des Marines à Los Angeles illégal en septembre, c’était précisément sur la base du Posse Comitatus Act. Les juges ont statué que Trump avait violé cette interdiction en utilisant des troupes en service actif pour ce qui était essentiellement une application de la loi. Trump a été forcé de retirer les Marines, mais au lieu d’accepter les limites constitutionnelles de son pouvoir, il a commencé à parler publiquement d’invoquer la Loi sur l’insurrection — qui, si appliquée, contournerait complètement le Posse Comitatus Act. C’est le seul chemin légal qu’il a pour déployer l’armée régulière domestiquement sans restrictions. Mais voici le problème : la Loi sur l’insurrection n’est censée être utilisée que face à de véritables insurrections ou crises constitutionnelles. L’utiliser simplement parce que vous n’aimez pas les politiques des villes démocrates serait un abus grotesque du pouvoir exécutif, transformant une exception d’urgence en outil de répression politique de routine. Et c’est exactement ce que Trump propose de faire.
« Les tribunaux ne s’impliqueraient pas » : un fantasme dangereusement faux
L’affirmation la plus alarmante de Trump lors de son discours sur l’USS George Washington était que si il invoquait la Loi sur l’insurrection, « les tribunaux ne s’impliqueraient pas, personne ne s’impliquerait ». C’est non seulement faux constitutionnellement, c’est une déclaration ouverte d’intention d’ignorer la révision judiciaire — un pilier central de la séparation des pouvoirs américaine. Les tribunaux ont absolument le pouvoir et la responsabilité d’examiner si un président a invoqué la Loi sur l’insurrection de manière appropriée. Ils peuvent déterminer si les conditions statutaires sont remplies, si les procédures ont été suivies, si les actions sont constitutionnelles. Trump semble croire — ou veut faire croire aux autres — que l’invocation de la Loi sur l’insurrection le rend immune de toute supervision judiciaire, transformant son pouvoir exécutif en autorité absolue et incontrôlable.
Cette vision n’est pas seulement erronée juridiquement, elle est profondément anti-démocratique. Elle place le président au-dessus de la loi, lui permettant de mobiliser la force militaire sans aucun recours pour les citoyens ou les états affectés. Même si les tribunaux se sont historiquement montrés réticents à intervenir rapidement dans les décisions de sécurité nationale du président, ils ne sont jamais complètement écartés. Des cas historiques comme Youngstown Sheet & Tube Co. v. Sawyer en 1952 — où la Cour suprême a invalidé la saisie par le président Truman d’aciéries pendant la guerre de Corée — établissent clairement que le pouvoir exécutif a des limites, même en temps de crise nationale. Trump, cependant, semble déterminé à tester jusqu’où il peut pousser avant que quelqu’un le force à reculer. Et en proclamant ouvertement qu’il ignorera les tribunaux, il normalise l’idée qu’un président peut simplement rejeter les décisions judiciaires qui ne lui conviennent pas. C’est ainsi que les démocraties constitutionnelles meurent — non pas par coup d’état soudain, mais par érosion progressive des normes jusqu’à ce qu’il ne reste rien pour contenir le pouvoir exécutif.
Les villes ciblées : un schéma politique évident
 
    Toutes démocrates, aucune coïncidence
Regardons le schéma avec une clarté brutale : chaque ville que Trump a ciblée pour un déploiement militaire — Los Angeles, Washington D.C., Memphis, Portland, Chicago — est dirigée par un maire démocrate dans un état où Trump a soit perdu l’élection, soit fait face à une forte opposition. Ce n’est pas une coïncidence, c’est une stratégie délibérée. Trump ne déploie pas de troupes dans les villes républicaines du Texas ou de la Floride, même si certaines d’entre elles ont des taux de criminalité comparables ou supérieurs. Il ne menace pas de fédéraliser la Garde nationale dans les états rouges. Non, il cible spécifiquement et exclusivement les bastions démocrates, transformant l’armée américaine en instrument de vengeance politique contre ses adversaires partisans.
Cette utilisation sélective de la force militaire viole tous les principes de gouvernance impartiale. Un président est censé servir tous les Américains, pas seulement ceux qui ont voté pour lui. L’armée est censée défendre la nation dans son ensemble, pas être déployée stratégiquement pour punir les juridictions qui ont osé élire des démocrates. Mais Trump a toujours opéré sur une base transactionnelle et tribale : vous êtes avec lui ou contre lui, et si vous êtes contre lui, vous êtes un ennemi à écraser. Cette mentalité, appliquée au pouvoir de déployer des troupes militaires, est extraordinairement dangereuse. Elle transforme les élections locales en actes de rébellion aux yeux du président, justifiant une réponse militaire. C’est exactement le genre de logique que les dictateurs utilisent pour justifier la répression des régions qui ne les soutiennent pas — « ils sont dangereux, chaotiques, ont besoin d’être contrôlés pour leur propre bien et celui de la nation ». Nous avons vu ce film se jouer dans d’innombrables pays, et ça ne se termine jamais bien.
La fiction de la « crise de la criminalité »
La justification officielle de Trump pour ces déploiements — que ces villes sont des zones de guerre hors de contrôle nécessitant une intervention militaire — s’effondre face au moindre examen factuel. Prenons Washington D.C. : comme mentionné précédemment, la criminalité violente avait chuté de 26% au moment où Trump a ordonné le déploiement de la Garde nationale. Chicago, une ville que Trump adore dépeindre comme un hellscape apocalyptique, a également vu des baisses significatives de la criminalité au cours des dernières années. Los Angeles connaissait des variations normales de la criminalité, rien qui s’approchait d’une urgence nécessitant une intervention militaire. Portland, malgré les protestations en 2020 qui ont créé une image médiatique de chaos, est en réalité l’une des villes les plus sûres de sa taille aux États-Unis.
Alors pourquoi Trump continue-t-il à dépeindre ces endroits comme s’ils étaient au bord de l’effondrement total ? Parce que la perception importe plus que la réalité dans la politique moderne. Si vous pouvez convaincre suffisamment d’Américains que les villes démocrates sont des zones de guerre infestées de criminels, alors l’envoi de troupes semble raisonnable, même nécessaire. Trump a passé des années à cultiver cette image, amplifiant chaque incident de criminalité dans les villes bleues tout en ignorant des problèmes similaires ou pires dans les zones rouges. Les médias conservateurs l’ont aidé, diffusant des images en boucle de pillages et de violence tout en omettant soigneusement le contexte ou les statistiques globales. Le résultat est une grande partie du public américain — particulièrement ceux qui ne vivent pas dans ces villes et n’ont donc aucune expérience directe pour contredire le récit — qui croit sincèrement que des endroits comme Portland et Chicago sont dystopiques et dangereux. Sur cette base de désinformation, Trump construit sa justification pour transformer l’armée américaine en force de police nationale sous son contrôle personnel.
L’opposition locale écrasée
Dans chaque cas, les gouverneurs et maires locaux ont explicitement demandé à Trump de ne pas envoyer de troupes fédérales. Ils ont dit publiquement qu’ils ne voulaient pas de militarisation, qu’ils géraient la sécurité publique avec leurs propres ressources, et que l’intrusion fédérale était non sollicitée et contre-productive. Trump les a simplement ignorés. En fait, leur opposition semble avoir renforcé sa détermination — après tout, ce sont des démocrates qui défient son autorité, ce qui dans sa vision du monde justifie une réponse encore plus agressive. Le fédéralisme, ce principe constitutionnel selon lequel les états et les localités conservent une souveraineté significative sur leurs propres affaires, est jeté par la fenêtre. Trump traite les gouverneurs et maires démocrates non pas comme des partenaires égaux dans le système fédéral, mais comme des obstacles à contourner ou des ennemis à vaincre.
Cette dynamique a créé des confrontations constitutionnelles extraordinaires. Les gouverneurs ont poursuivi le gouvernement fédéral pour bloquer les déploiements. Les maires ont refusé de coopérer avec les troupes fédérales, ordonnant à leurs forces de police locales de ne pas les assister. Dans certains cas, des gardes nationaux d’état ont refusé de suivre les ordres de fédéralisation, créant une crise de commandement militaire sans précédent en temps de paix. L’Oregon a vu certains de ses soldats de la Garde nationale démissionner plutôt que d’être utilisés contre les résidents de Portland. Tout cela crée un chaos institutionnel massif, précisément le genre de situation que les rédacteurs de la Constitution voulaient éviter en établissant des lignes claires de responsabilité et d’autorité entre les niveaux de gouvernement. Trump, dans sa quête de domination politique, détruit ces arrangements constitutionnels soigneusement équilibrés, et les conséquences à long terme pour la gouvernance américaine seront catastrophiques, quelle que soit la durée de son mandat.
Les réactions : indignation et complicité
 
    Les critiques bipartisanes… en théorie
Sur le papier, l’utilisation par Trump de l’armée contre les villes américaines devrait susciter une opposition bipartisane féroce. Après tout, le fédéralisme et la limitation du pouvoir fédéral sont censés être des valeurs fondamentales du Parti républicain. Les conservateurs ont passé des décennies à dénoncer la surportée du gouvernement fédéral, à défendre les droits des états, à avertir contre le pouvoir exécutif incontrôlé. Et pourtant, face à Trump déployant littéralement des troupes militaires dans les villes américaines sans invitation locale, la plupart des républicains au Congrès restent silencieux ou, pire, applaudissent. Quelques voix isolées se sont élevées — la commentatrice conservatrice Megyn Kelly a tracé une ligne concernant les tentatives de Trump de mobiliser des troupes à Chicago en septembre, affirmant que c’était un pont trop loin. Mais ces dissensions sont remarquables précisément parce qu’elles sont si rares.
La réalité est que le Parti républicain moderne ne fonctionne plus sur des principes idéologiques cohérents — il fonctionne sur la loyauté tribale envers Trump. Si Trump fait quelque chose, par définition, c’est bien, et toute critique venant de démocrates est par définition une partisanerie injuste. Cette logique circulaire a permis à Trump de violer pratiquement tous les principes que les républicains prétendaient défendre — déficits fiscaux explosant, interventions commerciales massives du gouvernement, expansion drastique du pouvoir exécutif — sans conséquences politiques au sein de son propre parti. Les rares républicains qui osent critiquer sont rapidement ostracisés, primés par des challengers fidèles à Trump, ou simplement quittent la politique dégoûtés. Ce qui reste est un parti qui n’est plus un parti politique au sens traditionnel, mais plutôt un culte de la personnalité prêt à justifier littéralement n’importe quoi que fait son leader. Y compris, apparemment, la militarisation du territoire national.
Les démocrates impuissants
Du côté démocrate, l’indignation est universelle mais largement impuissante. Les démocrates contrôlent la Chambre des représentants en 2025, mais avec une marge étroite, et ils ne contrôlent pas le Sénat. Ils ont tenu des auditions, émis des déclarations condamnant les actions de Trump, et même présenté une législation pour restreindre le pouvoir présidentiel d’invoquer la Loi sur l’insurrection. Rien de tout cela n’a abouti à des résultats concrets. Le Sénat républicain refuse de considérer toute restriction législative sur le pouvoir de Trump. Les résolutions de condamnation sont symboliques mais n’ont aucune force de loi. Et les démocrates découvrent les limites de leur pouvoir institutionnel face à un exécutif déterminé à agir unilatéralement. Ils peuvent se plaindre, ils peuvent poursuivre en justice, mais ils ne peuvent pas physiquement arrêter Trump d’envoyer des troupes.
Cette impuissance démocrate révèle une faiblesse structurelle plus profonde dans le système américain : lorsqu’un président est prêt à ignorer les normes et à pousser les limites légales, et que son parti refuse de le contrôler, il y a étonnamment peu de mécanismes à court terme pour l’arrêter. L’impeachment nécessite une super-majorité sénatoriale que les démocrates n’ont pas. Les tribunaux se déplacent lentement et peuvent être ignorés ou contournés. L’opinion publique, dans une ère de polarisation médiatique extrême, est fragmentée au point où un tiers du pays croira toujours Trump quoi qu’il fasse. Les démocrates se retrouvent donc dans la position frustrante de crier des avertissements pendant que Trump continue sa marche autoritaire, espérant que les prochaines élections apporteront un changement — mais sachant qu’énormément de dommages peuvent être faits entre-temps. Et si Trump réussit à normaliser l’utilisation de l’armée pour des objectifs politiques domestiques, ces dommages pourraient s’avérer irréversibles, établissant des précédents qu’aucune administration future ne pourra défaire.
Le silence assourdissant des militaires
Peut-être le plus troublant est le silence relatif de l’établissement militaire lui-même. On pourrait espérer que les généraux et amiraux, gardiens de la tradition apolitique de l’armée américaine, pousseraient contre leur utilisation comme outil de répression politique domestique. Historiquement, l’armée américaine s’est fièrement considérée comme servant la Constitution, pas un individu, et maintenant au-dessus de la mêlée politique. Mais sous Trump, ces traditions sont testées jusqu’au point de rupture. Certains officiers supérieurs ont été forcés à la retraite ou démissionnés en protestation silencieuse. D’autres restent mais expriment leur malaise en privé, craignant qu’une opposition publique ne mène à leur licenciement et remplacement par des loyalistes moins scrupuleux. Le résultat est une armée qui suit les ordres même quand ces ordres la mettent mal à l’aise, piégée entre l’obéissance civile-militaire et l’obligation morale de refuser les ordres illégaux.
Trump a travaillé méthodiquement pour purger l’establishment militaire des voix indépendantes et les remplacer par des généraux loyaux. Ceux qui restent savent que leur carrière dépend de ne pas contrarier le président. Quand Trump a prononcé son discours sur l’USS George Washington, les troupes ont applaudi et encouragé — certains peut-être sincères, d’autres probablement parce qu’on s’attend à ce que les soldats applaudissent le commandant en chef. Mais ces images de militaires acclamant la promesse de Trump de les déployer dans les villes américaines envoient un message glaçant : l’armée est à bord, ou du moins, elle n’offrira pas de résistance institutionnelle. C’est peut-être la chose la plus dangereuse de toutes. Dans d’autres pays où des leaders autoritaires ont tenté de militariser la politique domestique, ce sont souvent les militaires eux-mêmes qui ont finalement tiré la ligne. Si l’armée américaine ne le fait pas — si elle se contente de suivre les ordres, aussi politiquement motivés et constitutionnellement douteux soient-ils — alors il n’y a vraiment aucun garde-fou institutionnel restant.
Les précédents historiques alarmants
 
    La déségrégation des années 1950-1960
Il y a des moments dans l’histoire américaine où des présidents ont utilisé l’armée pour imposer l’autorité fédérale sur les états récalcitrants. Le plus célèbre est probablement l’envoi par le président Eisenhower de la 101e division aéroportée à Little Rock, Arkansas en 1957 pour faire respecter la déségrégation scolaire face à l’obstruction du gouverneur. Le président Kennedy a déployé des troupes en Alabama et au Mississippi pour des raisons similaires au début des années 1960. Ces actions étaient controversées à l’époque, mais elles sont maintenant largement considérées comme héroïques — des moments où le gouvernement fédéral a utilisé son pouvoir pour protéger les droits constitutionnels de citoyens vulnérables contre la tyrannie des états. C’est important de noter, cependant, que dans ces cas, le président agissait pour protéger les droits civils contre leur violation active, pas pour réprimer des populations locales pour des raisons politiques.
Trump et ses défenseurs essaient parfois de tracer des parallèles entre ses déploiements et ces précédents historiques, suggérant qu’il protège simplement les citoyens et fait respecter la loi fédérale. Mais la comparaison s’effondre sous examen. Eisenhower et Kennedy envoyaient des troupes pour protéger des étudiants noirs essayant d’exercer leur droit constitutionnel à l’éducation contre des foules violentes et des gouverneurs obstinés qui violaient ouvertement la décision de la Cour suprême dans Brown v. Board of Education. Il y avait un principe constitutionnel clair en jeu et une menace immédiate contre des citoyens exerçant leurs droits. Les déploiements de Trump, en revanche, ciblent des villes fonctionnant normalement sous des gouvernements légitimement élus, sans crise constitutionnelle claire ou menace aux droits fédéraux. Il essaie de s’approprier le prestige de ces actions historiques tout en faisant essentiellement leur opposé — utilisant la force fédérale non pas pour protéger les droits mais pour intimider l’opposition politique.
Les émeutes de Los Angeles en 1992
Un autre précédent souvent cité est le déploiement de troupes fédérales à Los Angeles en 1992 après les émeutes de Rodney King. Le président George H.W. Bush a envoyé des Marines et des soldats de l’Armée pour restaurer l’ordre après que la violence ait complètement dépassé la capacité de la police locale. Mais encore une fois, les circonstances étaient fondamentalement différentes. Il y avait une urgence réelle — des bâtiments brûlaient, des gens mouraient, la ville était véritablement en chaos. De plus, le gouverneur de Californie et le maire de Los Angeles avaient demandé de l’aide fédérale. Les troupes ont été déployées avec une mission strictement définie et temporaire : restaurer l’ordre suffisamment pour que les autorités civiles puissent reprendre le contrôle. Dès que c’était accompli, les troupes se sont retirées. Il n’y avait aucune suggestion qu’elles resteraient indéfiniment ou serviraient de force d’occupation permanente.
Comparez cela avec les déploiements actuels de Trump : aucune urgence comparable, aucune demande locale d’assistance, aucun calendrier clair de retrait, et une mission mal définie qui semble davantage axée sur la présence symbolique que sur la résolution de problèmes de sécurité publique spécifiques. Trump ne répond pas à des crises — il les crée, puis utilise le chaos résultant comme justification pour une présence militaire accrue. C’est une stratégie classique autoritaire : provoquer une confrontation, puis dépeindre votre réponse répressive comme nécessaire pour « restaurer l’ordre ». Les vrais précédents pour ce que fait Trump ne se trouvent pas dans l’histoire américaine, aussi imparfaite soit-elle. Ils se trouvent dans les livres d’histoire sur les régimes autoritaires qui ont militarisé leur politique domestique pour écraser la dissidence et consolider le pouvoir. Erdoğan en Turquie. Orbán en Hongrie. Poutine en Russie. Ce sont les modèles que Trump semble suivre, pas Eisenhower ou Kennedy.
Ce que nous n’avons jamais vu avant
Voici ce qui rend la situation actuelle véritablement sans précédent dans l’histoire américaine moderne : jamais auparavant un président n’a déployé des forces militaires dans plusieurs villes simultanément, contre la volonté des autorités locales, sans urgence manifeste, et avec une justification aussi manifestement politique. Jamais auparavant un président n’a déclaré ouvertement qu’il peut invoquer un pouvoir d’urgence « routinièrement » et faire « ce qu’il veut » sans supervision judiciaire. Même les présidents considérés comme ayant outrepassé leurs limites constitutionnelles — Nixon avec le Watergate, Johnson avec le Vietnam, Reagan avec l’Iran-Contra — ont au moins maintenu la fiction qu’ils opéraient dans des cadres légaux et accepteraient la révision judiciaire. Trump rejette ouvertement ces contraintes, déclarant que les règles ne s’appliquent tout simplement pas à lui.
Cette rupture avec les normes constitutionnelles établies est ce que rend la situation si dangereuse. Les précédents existent pour guider les futures actions — si Trump réussit à déployer l’armée régulière dans les villes américaines sous la Loi sur l’insurrection sans véritable insurrection, alors chaque futur président saura qu’il peut faire de même. Si il peut ignorer les décisions judiciaires sans conséquence, ce pouvoir aussi devient normalisé. Nous sommes dans un moment constitutionnel critique où les actions prises maintenant définiront les limites du pouvoir présidentiel pour les générations à venir. Soit les institutions américaines — tribunaux, Congrès, militaires, opinion publique — imposent des limites et repoussent, soit ces limites s’évaporent et nous entrons dans une nouvelle ère où le président exerce effectivement un pouvoir quasi-dictatorial sur l’usage de la force militaire domestique. Les prochains mois détermineront quelle voie nous prenons, et franchement, les paris ne sont pas rassurants.
Les implications pour la démocratie américaine
 
    L’effondrement du fédéralisme
Le fédéralisme — la division constitutionnelle du pouvoir entre les gouvernements fédéral, étatique et local — a été un pilier de la démocratie américaine depuis la fondation. L’idée était que différents niveaux de gouvernement géreraient différentes sphères de responsabilité, créant des freins et contrepoids qui empêcheraient toute concentration excessive du pouvoir. Les états conserveraient une souveraineté substantielle sur leurs propres affaires, et le gouvernement fédéral interviendrait seulement dans des domaines spécifiques délégués par la Constitution. Ce système n’a jamais été parfait — les conflits sur les frontières du pouvoir fédéral versus étatique ont façonné toute l’histoire américaine, de la guerre civile aux droits civils en passant par la santé. Mais il a généralement fonctionné pour disperser le pouvoir et prévenir la tyrannie centralisée.
Les actions de Trump détruisent systématiquement ce système. Quand le gouvernement fédéral peut simplement imposer sa volonté militairement sur les états et villes qui ne coopèrent pas, le fédéralisme cesse d’exister de manière significative. Les gouverneurs et maires deviennent essentiellement des administrateurs locaux servant au plaisir du président, plutôt que des dirigeants élus indépendamment avec leur propre autorité constitutionnelle. C’est une transformation fondamentale de la structure gouvernementale américaine — d’une république fédérale vers quelque chose qui ressemble davantage à un état unitaire avec un pouvoir exécutif central dominant. Et une fois que ce changement est solidifié, il sera extraordinairement difficile à inverser. Les futurs présidents, quelle que soit leur affiliation partisane, hériteront de ces précédents expansifs et seront tentés de les utiliser. Le pouvoir, une fois acquis, est rarement volontairement renoncé.
La militarisation de la dissidence politique
L’une des caractéristiques déterminantes des régimes autoritaires est qu’ils traitent l’opposition politique comme une menace à la sécurité nécessitant une réponse militaire. Dans les démocraties saines, la dissidence est normale et protégée — les gens sont libres de critiquer le gouvernement, de manifester, d’élire des dirigeants qui s’opposent au parti au pouvoir. Mais Trump traite constamment l’opposition démocrate comme un « ennemi intérieur », les villes dirigées par des démocrates comme des zones de guerre nécessitant une pacification, et les manifestants comme des insurrectionistes méritant la répression. Cette rhétorique n’est pas seulement incendiaire — elle est explicitement conçue pour justifier l’utilisation de la force militaire contre les adversaires politiques. Une fois que vous avez étiqueté l’opposition comme des ennemis plutôt que des concitoyens en désaccord, vous pouvez justifier presque n’importe quelle action contre eux.
Les implications à long terme sont terrifiantes. Si l’utilisation de l’armée contre les villes d’opposition devient acceptée, qu’est-ce qui empêche son utilisation contre d’autres formes de dissidence ? Les grandes manifestations contre les politiques gouvernementales pourraient-elles être dispersées par les troupes fédérales ? Les états qui défient les politiques fédérales sur des questions comme l’environnement ou l’immigration pourraient-ils voir leurs gouvernements remplacés par des administrateurs nommés par le gouvernement fédéral soutenus par la force militaire ? Les médias qui critiquent le président pourraient-ils être occupés pour « protéger l’ordre public » ? Ces scénarios sonnent extrêmes, mais ils sont tous des extensions logiques de ce que Trump fait déjà et de la justification qu’il donne. Une fois que le principe est établi que le président peut déployer l’armée contre les opposants politiques domestiques simplement en invoquant des pouvoirs d’urgence vagues, il n’y a pas de limite naturelle à la portée de cette autorité. Chaque frontière franchie rend la suivante plus facile, jusqu’à ce que nous nous retrouvions dans un endroit que personne n’aurait cru possible il y a quelques années à peine.
Le test ultime des institutions
Ce moment représente peut-être le test le plus significatif des institutions démocratiques américaines depuis la guerre civile. Les tribunaux vont-ils tenir ferme et imposer des limites constitutionnelles sur le pouvoir présidentiel, même face aux menaces de Trump de les ignorer ? Le Congrès va-t-il finalement trouver la volonté de limiter législativement l’autorité exécutive, même si cela nécessite une coopération bipartite rare en cette ère polarisée ? Les militaires vont-ils refuser d’exécuter des ordres qu’ils considèrent inconstitutionnels ou illégaux, risquant leur carrière et défiant la tradition de contrôle civil ? L’opinion publique va-t-elle se mobiliser contre cette militarisation, créant une pression politique suffisante pour forcer le changement ? Ou allons-nous échouer à ce test, chaque institution trouvant des raisons de ne pas être celle qui confronte directement le président, jusqu’à ce qu’il soit trop tard et que les garde-fous aient été érodés au-delà de la réparation ?
L’histoire jugera cette génération d’Américains — politiciens, juges, officiers militaires, citoyens ordinaires — sur la base de la façon dont nous répondons à ce défi. Avons-nous défendu les principes constitutionnels face à leur violation flagrante ? Ou avons-nous rationalisé, temporisé et finalement permis la transformation de la république américaine en quelque chose de fondamentalement différent et plus sombre ? Les choix faits dans les semaines et mois à venir auront des répercussions pendant des générations. Nos enfants et petits-enfants vivront dans le monde politique que nous créons ou permettons d’être créé maintenant. C’est un poids écrasant de responsabilité, et franchement, je ne suis pas sûr que suffisamment de gens dans des positions de pouvoir le ressentent avec l’urgence qu’il mérite. Nous sommes peut-être déjà passés au point où cela peut être arrêté par des moyens institutionnels normaux, auquel cas nous devrons trouver des moyens extraordinaires — ou accepter que nous avons échoué à préserver ce qui nous a été transmis.
Que se passe-t-il ensuite
 
    Les batailles juridiques à venir
Les prochaines semaines et mois verront probablement une avalanche de litiges constitutionnels alors que les gouverneurs, les maires et les groupes de défense des libertés civiles contestent les déploiements militaires de Trump devant les tribunaux. Plusieurs cas sont déjà en cours, avec des résultats mitigés. Le tribunal qui a statué contre le déploiement des Marines à Los Angeles en septembre a offert un certain espoir que le système judiciaire pourrait imposer des limites. Mais d’autres tribunaux ont été plus déférents au pouvoir présidentiel, reconnaissant une large discrétion en matière de sécurité nationale. Si Trump invoque formellement la Loi sur l’insurrection, les questions juridiques deviennent encore plus complexes — les tribunaux examineront-ils de près si les conditions statutaires sont vraiment remplies, ou se déféreront-ils à la détermination du président qu’une urgence existe ?
Le cas pourrait éventuellement atteindre la Cour suprême, où le résultat est tout sauf certain. La Cour a une majorité conservatrice de 6-3, et beaucoup de ces juges ont des vues expansives du pouvoir exécutif, particulièrement en matière de sécurité nationale. Ils pourraient être sympathiques aux arguments de l’administration Trump, même si ceux-ci étirent les interprétations constitutionnelles traditionnelles. D’un autre côté, même les juges conservateurs ont parfois surpris en imposant des limites aux présidents républicains quand ils estiment que les lignes constitutionnelles ont été franchies. Le juge en chef John Roberts, en particulier, est préoccupé par l’héritage de la Cour et pourrait hésiter à soutenir ce qui ressemble si manifestement à un abus de pouvoir présidentiel. Mais nous ne pouvons pas compter sur la Cour suprême pour sauver la démocratie — elle pourrait aussi bien échouer à ce test, auquel cas les recours juridiques sont essentiellement épuisés et nous entrons en territoire constitutionnel vraiment inconnu.
Les élections comme dernier recours
En fin de compte, la solution la plus définitive à un président qui abuse de son pouvoir est de ne pas le réélire — ou dans ce cas, puisque Trump est dans son deuxième mandat, de s’assurer que son successeur rejette ces précédents et travaille à restaurer les normes constitutionnelles. Mais les élections de 2028 semblent terriblement loin quand nous regardons la vitesse à laquelle les dommages s’accumulent. De plus, il y a de sérieuses questions sur si des élections libres et équitables sont même possibles dans un environnement où le président a normalisé l’utilisation de la force militaire pour des objectifs politiques. Si Trump peut déployer des troupes dans les villes démocrates maintenant, qu’est-ce qui l’empêche de déployer des troupes autour des bureaux de vote en 2028 dans les zones qui pourraient voter contre son successeur choisi ? Qu’est-ce qui empêche l’intimidation des électeurs, la suppression de la dissidence, toutes les tactiques classiques que les régimes autoritaires utilisent pour s’accrocher au pouvoir ?
Ces inquiétudes ne sont pas paranoia — elles sont extrapolations logiques à partir de ce que nous observons déjà. Trump a passé des années à miner la confiance dans les processus électoraux, affirmant sans preuves que les élections sont truquées contre lui, préparant ses partisans à rejeter tout résultat qui ne favorise pas. Il a tenté de renverser les résultats de l’élection de 2024 avant de prendre ses fonctions pour ce deuxième mandat. Maintenant, il consolide le contrôle militaire d’une manière qui pourrait être utilisée pour influencer les futures élections. Le schéma est clair, et il ne pointe pas vers un transfert pacifique du pouvoir en 2028 si ce transfert signifie abandonner le pouvoir aux démocrates. Nous devons nous préparer à la possibilité que les élections seules ne suffisent pas à restaurer la démocratie constitutionnelle — elles pourraient nécessiter d’être défendues par d’autres moyens, qu’il s’agisse de désobéissance civile massive, de grèves générales, ou d’autres formes de résistance non-violente que les Américains n’ont jamais eu à contempler sérieusement auparavant.
Le choix devant nous
En fin de compte, chaque Américain doit faire un choix dans les temps à venir. Acceptez-vous cette
Le choix devant nous
En fin de compte, chaque Américain doit faire un choix dans les temps à venir. Acceptez-vous cette transformation de la république américaine en quelque chose qui ressemble de plus en plus à une autocratie militarisée ? Considérez-vous les déploiements de troupes dans les villes américaines comme une mesure de sécurité nécessaire, ou comme une transgression autoritaire inacceptable ? Croyez-vous Trump quand il dit qu’il a le droit de faire « ce qu’il veut » avec l’armée, ou reconnaissez-vous cela pour ce que c’est vraiment — une déclaration ouverte d’intention dictatoriale ? Ces questions ne sont pas rhétoriques ou abstraites. Elles exigent des réponses, et ces réponses se manifesteront dans les actions que nous entreprenons ou refusons d’entreprendre. Resterons-nous silencieux pendant que les normes constitutionnelles sont déchirées ? Ou trouverons-nous le courage de résister, même quand c’est difficile, même quand ça coûte quelque chose ?
L’histoire nous enseigne que les démocraties ne meurent pas toujours dans le bruit et la fureur d’un coup d’état militaire. Parfois, elles s’éteignent progressivement, transgression normalisée après transgression normalisée, jusqu’à ce qu’un jour les citoyens se réveillent et réalisent qu’ils vivent dans un pays fondamentalement différent de celui dans lequel ils sont nés. Nous sommes dangereusement proches de ce point de non-retour. Les soldats patrouillent déjà dans les rues américaines. Le président déclare déjà son intention d’étendre massivement ces déploiements sans égard aux limites constitutionnelles. Les institutions qui sont censées nous protéger — tribunaux, Congrès, militaires — vacillent face à ce défi. Si nous ne trouvons pas un moyen d’arrêter cette trajectoire maintenant, bientôt il sera trop tard. Les précédents seront établis, les pouvoirs consolidés, et la restauration de la démocratie constitutionnelle deviendra exponentiellement plus difficile, voire impossible. C’est notre moment de vérité, et nous ne pouvons pas nous permettre de le manquer.
Conclusion
 
    Le 28 octobre 2025 restera gravé dans l’histoire comme le jour où un président américain a explicitement revendiqué le pouvoir dictatorial de déployer toutes les branches de l’armée contre les citoyens américains sans supervision judiciaire ni limite constitutionnelle. « Je serais autorisé à faire ce que je veux », a déclaré Donald Trump devant des soldats applaudissants à bord de l’USS George Washington, et ces mots devraient résonner comme un tocsin d’alarme dans l’esprit de chaque personne qui se soucie encore de la démocratie américaine. Ce n’était pas une hyperbole rhétorique ou une simple provocation politique — c’était une déclaration d’intention appuyée par des actions déjà en cours dans cinq villes américaines où des troupes fédérales patrouillent contre la volonté des gouvernements locaux élus.
Nous sommes à un carrefour historique. D’un côté se trouve le maintien d’une république constitutionnelle avec des freins et contrepoids, où même le président est soumis à la loi et où l’armée sert la nation entière plutôt qu’un homme. De l’autre côté se trouve une transformation vers quelque chose de beaucoup plus sombre — un régime où le pouvoir exécutif exerce un contrôle militaire incontrôlé sur le territoire national, où l’opposition politique est traitée comme une menace à la sécurité nécessitant une réponse armée, et où les normes démocratiques qui ont tenu pendant plus de deux siècles s’effondrent devant les ambitions autoritaires d’un seul leader. La direction que nous prenons dépendra des choix faits dans les semaines et mois à venir — par les tribunaux, par le Congrès, par les militaires, et finalement par le peuple américain lui-même.
Les déploiements que Trump a déjà ordonnés à Los Angeles, Washington D.C., Memphis, Portland et Chicago ne sont que le début. Sa menace d’invoquer la Loi sur l’insurrection pour envoyer « plus que la Garde nationale » — l’Armée, la Marine, l’Armée de l’air, les Marines — représente une escalade dramatique vers la militarisation complète de la politique domestique américaine. Et sa déclaration que les tribunaux ne s’impliqueraient pas, que personne ne pourrait l’arrêter, révèle soit une ignorance profonde des limites constitutionnelles de son pouvoir, soit — plus probablement — une détermination à ignorer simplement ces limites et défier quiconque essaie de les faire respecter. Dans les deux cas, c’est profondément antidémocratique et profondément dangereux.
Ce qui rend cette situation encore plus alarmante, c’est le schéma politique évident derrière ces déploiements. Chaque ville ciblée est dirigée par des démocrates. Chaque justification avancée s’effondre sous examen factuel — ces villes ne sont pas en état d’insurrection, elles ne font pas face à des crises de sécurité dépassant la capacité locale, et leurs gouvernements n’ont pas demandé d’aide fédérale. Ce sont des interventions militaires motivées politiquement conçues pour intimider l’opposition, projeter le pouvoir et tester les limites de ce que le système américain tolérera. Et jusqu’à présent, bien que certaines résistances aient émergé des tribunaux et des gouvernements locaux, il n’y a pas eu de répudiation décisive et unifiée de ces actions qui forcerait Trump à reculer. Ce silence relatif, cette acceptation progressive de l’inacceptable, est peut-être le signal le plus inquiétant de tous.
L’histoire ne sera pas tendre avec cette période. Elle regardera en arrière et se demandera comment une nation qui s’était toujours enorgueillie de sa tradition démocratique a pu glisser si rapidement vers l’autoritarisme militarisé. Elle examinera les actions de ceux qui occupaient des positions de pouvoir — juges, législateurs, généraux — et demandera pourquoi ils n’ont pas fait plus pour arrêter cette dérive quand il était encore possible de le faire. Elle regardera les citoyens ordinaires et se demandera pourquoi tant sont restés passifs ou, pire, ont applaudi pendant que leurs propres libertés étaient démantelées. Ces jugements seront sévères, et ils seront mérités si nous échouons à relever ce défi. Mais il n’est pas encore trop tard. Nous avons encore des tribunaux, nous avons encore un Congrès, nous avons encore une société civile capable de se mobiliser et de résister. La question est de savoir si nous utiliserons ces outils pendant que nous les avons encore, ou si nous attendrons jusqu’à ce qu’ils aient été neutralisés un par un.
Le président Trump croit qu’il peut faire « tout ce qu’il veut » avec l’armée américaine. Il est temps de lui prouver qu’il a tort — non pas par la violence ou l’insurrection réelle qu’il prétend faussement combattre, mais par l’utilisation vigoureuse de tous les mécanismes constitutionnels et démocratiques encore à notre disposition. Les tribunaux doivent statuer avec clarté et rapidité que ces déploiements violent la loi. Le Congrès doit légiférer pour restreindre les abus du pouvoir présidentiel, même si cela nécessite une coopération bipartisane qui semble impossible dans le climat politique actuel. Les militaires doivent redécouvrir leur obligation constitutionnelle de servir la nation plutôt qu’un homme. Et le peuple américain doit clairement signaler qu’il n’acceptera pas la transformation de sa république en autocratie. Si nous faisons tout cela — si nous trouvons collectivement le courage de défendre les principes qui sont censés nous définir — alors peut-être, juste peut-être, nous pourrons transmettre à la prochaine génération une démocratie blessée mais survivante plutôt qu’un régime autoritaire consolidé. Mais le temps presse, les enjeux ne pourraient pas être plus élevés, et l’échec n’est tout simplement pas une option que nous pouvons nous permettre d’envisager.
 
     
     
     
     
     
     
     
     
    