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Mao Ning, la voix de la Chine, frappe avec précision chirurgicale

Mao Ning n’est pas un orateur quelconque. Elle est la porte-voix officielle du ministère des Affaires étrangères chinois. Chaque phrase qu’elle prononce est soigneusement formulée, chaque mot est choisi. Le mardi à Pékin, elle a prononcé une déclaration qui était, pour le protocole diplomatique, un coup direct au cœur de la stratégie trumpiste.

« En tant que partenaire stratégique global du Nigéria, la Chine soutient fermement le gouvernement nigérian qui guide son peuple sur une voie de développement adaptée aux réalités nationales du Nigéria, » a-t-elle commencé. C’est l’establishment du soutien de base : la Chine est du côté du Nigéria, pas de Washington.

Puis elle a escaladé : « Nous nous opposons fermement à ce qu’un quelconque pays utilise la religion et les droits humains comme prétexte pour interférer dans les affaires intérieures d’autres pays, et menacer d’autres pays de sanctions et d’usage de la force. » C’est une attaque frontale, pratiquement point par point, de la stratégie de Trump.

Et le coup de grâce : « Nous rejetons catégoriquement les menaces impudentes et l’usage de la force. » Le mot clé ici est « impudente »—qui suggère non seulement que la menace est mauvaise, mais qu’elle est presomptueuse, hors de place, inappropriée.

La diplomatie des intérêts : pourquoi la Chine s’engage à ce niveau

Pourquoi la Chine s’engageait-elle à ce niveau ? C’est la question cruciale. Et la réponse révèle le calcul géopolitique réel derrière les déclarations diplomatiques.

Le Nigéria est l’une des destinations africaines les plus importantes pour l’investissement direct étranger chinois. Les compagnies chinoises ont investi plus de 1,3 milliard de dollars dans les chaînes de valeur du lithium et des minéraux au Nigéria en moins de deux ans. Le lithium—ce minerai crucial pour les batteries de voitures électriques, la technologie d’énergie verte, l’informatique de pointe—c’est de l’or stratégique.

La Chine a aussi des investissements massifs dans l’énergie, les infrastructures, les projets d’Initiative « Belt and Road » au Nigéria. En mai 2025, l’ambassadeur chinois à Abuja s’était rencontré avec le ministère nigérian du Développement des minéraux et avait déclaré que la coopération minière Chine-Nigéria avait atteint des « réalisations remarquables et un énorme potentiel ».

En d’autres termes : la Chine ne peut pas se permettre que les États-Unis viennent jouer les gendarmes militaires au Nigéria et perturbent cette dynamique commerciale. C’était donc une réaction non seulement diplomatique mais directement motivée par les intérêts économiques.

L’Afrique comme champ de bataille : la compétition sino-américaine s’intensifie

Ce qui se passe au Nigéria est un microcosme de quelque chose de bien plus large : une compétition sans précédent pour le contrôle et l’influence en Afrique.

Pendant des décennies, l’Afrique a été le terrain de jeu exclusif des puissances occidentales. Les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne—c’est eux qui dictaient les termes. Mais maintenant, la Chine est venue avec une approche totalement différente. Au lieu de conditions politiques, de demandes de « démocratie » ou de « droits humains, » la Chine offre : investissements, prêts, partenariats commerciaux mutuels, infrastructure. Pas de jugements moraux. Pas d’ingérence. Juste du business.

Le Nigéria, comme beaucoup de pays africains, regarde cet arrangement et pense : « Pourquoi accepterions-nous les conditions morales américaines alors que nous pouvons avoir de l’argent chinois sans conditions ? » Et donc, progressivement, les pays africains se rapprochent de la Chine.

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