Barrett démonte l’argument de l’urgence nationale universelle
Mercredi 5 novembre, la Cour suprême a tenu une audience de trois heures sur la légalité des tarifs trumpistes — une durée extraordinaire qui signale l’importance et la complexité de l’affaire. Les avocats de l’administration ont présenté leur argument central: le déficit commercial américain constitue une urgence nationale sous l’IEEPA de 1977, donnant au président le pouvoir de prendre des mesures économiques extraordinaires, incluant l’imposition de tarifs massifs. Mais dès les premières minutes, il était évident que cet argument ne passait pas. La juge Amy Coney Barrett, nomination trumpiste de 2020, a posé la question qui tue: « Est-ce votre position que chaque nation devait être tarifée en raison de menaces à la défense et à la base industrielle? Par exemple, l’Espagne? La France? » Sa question exposait l’absurdité logique de la position gouvernementale. Comment peut-on prétendre que littéralement tous les partenaires commerciaux américains — y compris des alliés de l’OTAN, des démocraties stables, des pays avec lesquels les États-Unis entretiennent des relations pacifiques depuis des décennies — représentent soudainement une menace à la sécurité nationale? Barrett n’a pas formulé ça comme une question rhétorique. Elle voulait vraiment comprendre la logique. Et l’avocat du gouvernement n’avait pas de réponse convaincante.
Gorsuch et les limites du pouvoir présidentiel
Le juge Neil Gorsuch, autre nomination de Trump en 2017, a également exprimé des doutes profonds. Gorsuch est connu pour sa philosophie textualiste et originaiste — il croit que les lois doivent être interprétées selon leur texte clair et l’intention originale du Congrès au moment de leur adoption. Et l’IEEPA de 1977 a été adoptée pour gérer des crises internationales aiguës — des prises d’otages, des invasions, des effondrements économiques soudains — pas pour réorganiser fondamentalement le système commercial mondial selon les caprices présidentiels. Gorsuch a questionné si l’administration ne transformait pas une loi d’urgence étroitement définie en mandat général pour la politique économique présidentielle. Il a souligné que le Congrès a explicitement délégué au président des pouvoirs tarifaires limités dans plusieurs autres lois — la Section 232 pour les menaces à la sécurité nationale dans des secteurs spécifiques, la Section 301 pour les pratiques commerciales déloyales de pays particuliers. Si le Congrès avait voulu donner au président un pouvoir tarifaire illimité, il l’aurait fait explicitement. Le fait qu’il ait créé ces canaux étroits et procéduraux suggère qu’il n’a jamais voulu que l’IEEPA devienne un outil de politique commerciale de masse. C’était un argument dévastateur pour l’administration, et il venait d’un juge que Trump pensait pouvoir compter comme allié automatique.
Les juges libéraux unanimement opposés
Si les juges conservateurs montraient du scepticisme, les trois juges progressistes — Elena Kagan, Sonia Sotomayor et Ketanji Brown Jackson — étaient franchement hostiles aux arguments gouvernementaux. Kagan a attaqué l’idée qu’un déficit commercial permanent pourrait constituer une « urgence » au sens où l’IEEPA utilise ce terme. Les États-Unis ont un déficit commercial chaque année depuis 1975 — cinquante ans consécutifs. Si c’est une urgence, c’est la plus longue urgence de l’histoire américaine. Et si chaque situation économique déplaisante peut être déclarée urgence nationale donnant au président des pouvoirs extraordinaires, alors le concept d’urgence perd tout son sens. Sotomayor a souligné les implications constitutionnelles: la Constitution donne au Congrès — pas au président — le pouvoir de « réguler le commerce avec les nations étrangères » et de « lever des taxes et des impôts ». Les tarifs sont des taxes. Permettre au président de les imposer unilatéralement sans véritable autorisation congressionnelle viole la séparation fondamentale des pouvoirs. Jackson a noté les conséquences pratiques catastrophiques: si cette interprétation de l’IEEPA est valide, qu’est-ce qui empêche n’importe quel futur président de déclarer n’importe quoi urgence nationale et de prendre des mesures économiques drastiques? Le chômage? Le changement climatique? Les inégalités de revenu? Ça transformerait le président en législateur économique quasi-illimité. C’est exactement le type de pouvoir exécutif impérial que la Constitution visait à prévenir.
Le plan B déjà préparé dans les tiroirs
La Section 301 comme alternative immédiate
Trump n’attend pas le verdict de la Cour suprême les bras croisés. Son administration a déjà identifié plusieurs outils législatifs alternatifs pour continuer à imposer des tarifs massifs même si l’IEEPA est invalidé. Le plus évident est la Section 301 du Trade Act de 1974, que Trump a déjà utilisée extensivement durant son premier mandat pour cibler la Chine. Cette loi permet au représentant américain au commerce d’enquêter sur les pratiques commerciales « déraisonnables » ou « discriminatoires » d’autres pays, puis d’imposer des tarifs en représailles. Trump l’avait utilisée pour justifier des centaines de milliards de dollars de tarifs sur les produits chinois, accusant Pékin de vol de propriété intellectuelle et de transferts forcés de technologie. La Section 301 a l’avantage d’être clairement établie — elle a survécu à des contestations juridiques multiples et reste une autorité tarifaire présidentielle reconnue. Le problème? Elle nécessite une procédure formelle: enquête, audiences publiques, détermination de pratiques commerciales spécifiques qui justifient les tarifs. C’est beaucoup plus lent et contraignant que simplement déclarer une urgence nationale et imposer des tarifs instantanément sur tout le monde. Mais Trump a déjà montré qu’il peut tordre et accélérer ces procédures pour obtenir ce qu’il veut. Les experts commerciaux estiment qu’il pourrait reconstruire l’essentiel de son architecture tarifaire actuelle via la Section 301 en quelques mois.
La Section 338 dormante depuis la Grande Dépression
Une option encore plus radicale est la Section 338 du Tariff Act de 1930 — une loi adoptée durant la Grande Dépression qui donne au président le pouvoir de négocier des accords commerciaux et d’ajuster les tarifs en conséquence. Cette section n’a jamais été utilisée dans l’histoire moderne, ce qui signifie que son opération pratique est complètement incertaine. Mais précisément parce qu’elle n’a jamais été testée juridiquement, elle pourrait offrir à Trump une marge de manœuvre que les tribunaux n’ont pas encore circonscrite. Le secrétaire au Trésor Scott Bessent a confirmé en septembre que la Section 338 était « activement considérée » comme plan B si l’IEEPA était invalidée. L’avantage? Elle ne nécessite pas de déclarer une urgence nationale, évitant ainsi l’obstacle juridique central qui a fait trébucher l’administration devant la Cour suprême. L’inconvénient? Elle est tellement obscure et inutilisée que personne ne sait vraiment comment elle fonctionnerait en pratique. Mais pour Trump, l’incertitude juridique n’est pas un bug — c’est une fonctionnalité. Ça lui donnerait des années de batailles juridiques durant lesquelles les tarifs resteraient en place, les recettes continueraient de couler, et lui pourrait prétendre que les « juges activistes » sabotent sa politique économique.
La Section 232 élargie au-delà de la sécurité
Trump utilise déjà la Section 232 du Trade Expansion Act de 1962 pour imposer des tarifs sur l’acier et l’aluminium, arguant qu’une base industrielle domestique forte dans ces secteurs est essentielle à la sécurité nationale. Cette autorité lui permet de cibler des secteurs spécifiques plutôt que d’imposer des tarifs universels. Mais rien n’empêche Trump d’élargir radicalement sa définition de « sécurité nationale » pour inclure pratiquement tous les secteurs industriels. Pourquoi les semi-conducteurs ne seraient-ils pas essentiels à la sécurité nationale? Les produits pharmaceutiques? Les batteries pour véhicules électriques? Les terres rares? L’électronique grand public? Avec une définition suffisamment large de sécurité nationale — et Trump a démontré sa volonté d’étirer les définitions jusqu’à la rupture — la Section 232 pourrait théoriquement couvrir une portion massive de l’économie. Les experts commerciaux notent que cette approche sectorielle serait plus laborieuse que les tarifs universels actuels, nécessitant des enquêtes séparées pour chaque industrie. Mais Trump a deux ans restants dans son mandat. C’est suffisamment de temps pour lancer des dizaines d’enquêtes Section 232 couvrant les secteurs les plus importants de l’économie. Le résultat final serait essentiellement le même: des tarifs massifs sur la plupart des importations, juste sous une justification légale différente.
Les enjeux économiques qui dépassent les milliards
Les 118 milliards déjà collectés en 2025
L’ampleur financière de ces tarifs est stupéfiante. Durant l’année fiscale 2025, les recettes douanières nettes ont augmenté de 118 milliards de dollars par rapport à l’année précédente — la plus grande partie venant directement des tarifs IEEPA imposés par Trump. C’est 118 milliards de dollars qui sont sortis de l’économie américaine sous forme de taxes à l’importation. Qui paie réellement ces tarifs? Contrairement à la rhétorique trumpiste selon laquelle « la Chine paie », ce sont les importateurs américains qui paient les tarifs au moment où les marchandises entrent aux États-Unis. Ces importateurs — entreprises américaines — répercutent ensuite ces coûts sur les consommateurs via des prix plus élevés. Donc finalement, ce sont les citoyens américains ordinaires qui financent ces 118 milliards. C’est une taxe régressive qui frappe le plus durement les ménages à revenus modestes, qui dépensent une proportion plus élevée de leurs revenus sur des biens de consommation. Si la Cour suprême invalide les tarifs IEEPA, le gouvernement pourrait théoriquement être forcé de rembourser une partie substantielle de ces 118 milliards aux entreprises qui les ont payés. Barrett, durant l’audience, a noté que cette situation pourrait devenir « chaotique » — un euphémisme judiciaire pour un cauchemar administratif et fiscal sans précédent.
L’impact sur les chaînes d’approvisionnement mondiales
Au-delà des recettes fiscales directes, les tarifs de Trump ont causé des perturbations massives dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. Des entreprises qui avaient passé des décennies à optimiser leurs réseaux de production internationaux se sont retrouvées face à des coûts soudainement explosifs. Certaines ont tenté de répercuter ces coûts sur les consommateurs, perdant des parts de marché face à des concurrents qui absorbaient les tarifs. D’autres ont entrepris des relocalisations coûteuses de leurs chaînes d’approvisionnement, cherchant des pays non tarifés ou ramenant la production aux États-Unis — un processus qui prend des années et coûte des centaines de millions. Les petites entreprises, particulièrement, ont été dévastées. Elles n’ont pas la flexibilité financière des grandes corporations pour absorber des augmentations de coûts de 10%, 25%, parfois 50% sur leurs importations. Des centaines de petites entreprises ont fait faillite depuis janvier 2025, directement attribuable aux tarifs. C’est précisément ces petites entreprises qui ont formé la coalition poursuivant Trump devant les tribunaux — elles se battent littéralement pour leur survie économique contre une politique qu’elles considèrent à la fois destructrice et illégale.
Les représailles commerciales qui s’accumulent
Les partenaires commerciaux américains n’ont pas accepté passivement les tarifs de Trump. Ils ont riposté avec leurs propres mesures de rétorsion, ciblant spécifiquement des produits américains dans une stratégie calculée pour maximiser la douleur politique à Trump. L’Union européenne a imposé des tarifs sur le bourbon du Kentucky, les motocyclettes du Wisconsin, les produits agricoles du Midwest — tous des États ou secteurs politiquement importants pour les républicains. La Chine a ciblé le soja, le porc, les avions — frappant directement les agriculteurs américains qui sont une composante clé de la base électorale trumpiste. Le Canada et le Mexique, les deux plus grands partenaires commerciaux des États-Unis, ont également imposé leurs propres tarifs de représailles. Le résultat? Les exportations américaines ont chuté, causant des pertes d’emplois dans les secteurs exportateurs — souvent dans des régions rurales qui dépendent fortement du commerce agricole. Les agriculteurs américains, déjà sous pression financière, font face à des marchés d’exportation fermés ou restreints. Le gouvernement a dû mettre en place des programmes d’aide d’urgence pour compenser une partie des pertes agricoles, utilisant l’argent des contribuables pour subventionner les dégâts causés par la propre politique tarifaire du président. C’est une spirale économique destructrice où tout le monde perd — sauf peut-être les avocats commerciaux qui font fortune en naviguant ce chaos.
La rhétorique apocalyptique de Trump
Les États-Unis rendus « sans défense » selon le président
La réaction de Trump face à la possibilité d’une défaite juridique a été typiquement hyperbolique et alarmiste. Il a averti que si la Cour suprême invalidait ses tarifs, les États-Unis seraient rendus « sans défense » et potentiellement « réduits à un statut de Tiers-Monde ». Analysons cette rhétorique absurde. Les États-Unis possèdent la plus grande économie du monde avec un PIB de plus de 28 trillions de dollars. Ils ont l’armée la plus puissante de l’histoire humaine. Ils dominent la technologie, la finance, la culture populaire mondiale. Et Trump prétend qu’une décision judiciaire limitant son pouvoir tarifaire transformerait instantanément cette superpuissance en pays en développement? C’est tellement ridicule que ça ne mérite même pas d’être réfuté. Mais Trump ne parle pas à des économistes ou des experts commerciaux. Il parle à sa base électorale, qu’il a passé des années à convaincre que l’Amérique est en déclin catastrophique, exploitée par des partenaires commerciaux rusés, affaiblie par des élites mondialistes traîtresses. Dans cet univers narratif, les tarifs deviennent la seule chose qui protège l’Amérique de l’effondrement total. Et les juges qui les bloquent deviennent des ennemis de la sécurité nationale. C’est de la propagande autoritaire classique: créer une menace existentielle imaginaire, puis se présenter comme le seul rempart contre cette menace.
Le « désastre » d’une décision contre lui
Trump a également qualifié une décision défavorable de la Cour suprême de « désastreuse pour notre nation ». Encore une fois, retournons cette affirmation. Ce qui serait réellement désastreux, c’est de permettre à n’importe quel président de déclarer unilatéralement des « urgences nationales » sur des situations économiques permanentes, puis d’utiliser ces déclarations pour s’arroger des pouvoirs législatifs que la Constitution attribue au Congrès. Ce qui serait désastreux, c’est d’éroder complètement la séparation des pouvoirs au point où le président devient effectivement un dictateur économique capable d’imposer des taxes massives sans autorisation parlementaire. Ce qui serait désastreux, c’est de normaliser l’idée que les présidents peuvent simplement ignorer les décisions judiciaires défavorables en trouvant des « plans B » pour contourner les tribunaux. Mais dans l’univers trumpiste, ces considérations constitutionnelles n’ont aucune importance. Ce qui compte, c’est la volonté du leader. Si le leader veut des tarifs, il doit avoir des tarifs. Si les tribunaux disent non, trouvez une autre voie. Si le Congrès objecte, ignorez-le. Si les alliés se plaignent, menacez-les davantage. C’est une vision présidentielle qui rejette fondamentalement les freins et contrepoids constitutionnels comme des obstacles à éliminer plutôt que comme des protections essentielles à préserver.
Le positionnement victimaire face aux juges
Malgré le fait que Trump a lui-même nommé trois des neuf juges de la Cour suprême — et que ces nominations étaient explicitement destinées à sécuriser une majorité conservatrice favorable à ses politiques — il se positionne maintenant en victime d’un système judiciaire hostile. C’est une stratégie qu’il a perfectionnée au fil des années: quand les tribunaux le bloquent, ce n’est jamais parce que ses actions sont illégales. C’est toujours parce que les juges sont « activistes », « partisans », font partie du « Deep State », conspirent contre lui. Le fait que certains de ces juges sont ses propres nominations ne change rien au narratif. Si Barrett ou Gorsuch votent contre lui, ils deviennent instantanément des traîtres qui ont trahi le président qui leur a donné leur siège. Cette approche sert plusieurs objectifs politiques. Elle prépare sa base à rejeter une décision défavorable comme illégitime. Elle maintient le récit victimaire qui est central à son appel politique. Et elle intimide potentiellement les juges — leur rappelant que voter contre Trump pourrait les transformer en cibles de sa colère et de celle de sa base. C’est une pression politique indécente sur une branche judiciaire supposément indépendante. Mais l’indécence n’a jamais arrêté Trump.
Le silence complice du Congrès républicain
L’abdication du pouvoir commercial constitutionnel
Ce qui est peut-être le plus frappant dans cette affaire, c’est le silence quasi-total du Congrès républicain. La Constitution donne explicitement au Congrès — pas au président — le pouvoir de « réguler le commerce avec les nations étrangères » et de « lever des taxes et des impôts ». Les tarifs sont des taxes sur les importations. Donc constitutionnellement, c’est le Congrès qui devrait décider de la politique tarifaire américaine. Au fil des décennies, le Congrès a délégué une partie de ce pouvoir au président dans des circonstances limitées et spécifiques. Mais il n’a jamais — jamais — voulu donner au président un pouvoir tarifaire illimité et discrétionnaire. Pourtant, face à l’usurpation trumpiste de ce pouvoir congressionnel fondamental, les républicains au Congrès restent silencieux ou activement complices. Où sont les champions de la séparation des pouvoirs? Où sont les constitutionalistes stricts qui passaient les années Obama à dénoncer chaque action exécutive comme tyrannie présidentielle? Ils ont disparu, remplacés par des serviteurs dociles qui approuvent tout ce que fait Trump tant que ça sert leurs intérêts politiques immédiats. C’est une abdication historique de responsabilité constitutionnelle — le Congrès abandonnant volontairement un de ses pouvoirs les plus fondamentaux à un exécutif qui l’utilise sans contrainte ni supervision.
Les sénateurs qui profitent politiquement des tarifs
Pourquoi cette complaisance républicaine? En partie parce que certains secteurs économiques bénéficient effectivement des tarifs et exercent une influence politique disproportionnée. L’industrie de l’acier et de l’aluminium adore les tarifs qui augmentent artificiellement les prix domestiques et éliminent la concurrence étrangère. Les syndicats industriels dans ces secteurs — traditionnellement démocrates mais qui ont migré vers Trump — soutiennent les tarifs comme protection des emplois américains. Les agriculteurs qui cultivent du maïs pour l’éthanol plutôt que pour l’alimentation bénéficient des politiques protectionnistes. Pour les sénateurs et représentants de ces districts et États, soutenir les tarifs de Trump est politiquement avantageux même si c’est économiquement destructeur pour le pays dans son ensemble. La politique commerciale est toujours caractérisée par cette dynamique: les perdants (consommateurs payant plus cher, entreprises dépendant des importations) sont nombreux mais diffus, tandis que les gagnants (producteurs protégés) sont concentrés et organisés. Les perdants diffus ont peu d’influence politique. Les gagnants concentrés dominent le débat. Donc le Congrès reste paralysé ou complice même face à une politique commerciale objectivement néfaste.
Les démocrates impuissants face à l’unanimité républicaine
Les démocrates au Congrès ont dénoncé les tarifs de Trump comme illégaux et économiquement destructeurs. Mais dénonciation n’est pas action. Avec les républicains contrôlant la Chambre et détenant une majorité au Sénat, les démocrates n’ont aucun pouvoir législatif pour bloquer ou modifier la politique tarifaire trumpiste. Ils pourraient théoriquement adopter une loi révoquant ou limitant explicitement les pouvoirs tarifaires présidentiels. Mais une telle loi nécessiterait un soutien républicain — qui n’existe pas — et Trump la vèterait de toute façon. Pour renverser un véto présidentiel, il faudrait une majorité des deux tiers dans chaque chambre — complètement inaccessible dans l’environnement politique actuel. Donc les démocrates sont réduits au commentariat et à soutenir les poursuites judiciaires menées par des États démocrates et des groupes de petites entreprises. Ils espèrent que les tribunaux feront ce que le Congrès ne peut pas: imposer des limites constitutionnelles sur un président qui ne reconnaît aucune limite. Mais même si les tribunaux bloquent les tarifs IEEPA, Trump a déjà son plan B, C, D prêt. Le Congrès reste l’acteur absent de ce drame constitutionnel — un fantôme institutionnel qui a abandonné son rôle dans l’équilibre des pouvoirs.
Les précédents historiques qui hantent cette affaire
Smoot-Hawley et la Grande Dépression aggravée
L’histoire commerciale américaine offre un précédent terrifiant pour les tarifs massifs: le Tariff Act Smoot-Hawley de 1930. Adopté au début de la Grande Dépression dans une tentative désespérée de protéger les emplois américains, cette loi a augmenté les tarifs sur plus de 20 000 produits importés. Les partenaires commerciaux américains ont immédiatement riposté avec leurs propres tarifs. Le commerce mondial s’est effondré — les exportations américaines ont chuté de plus de 60% entre 1929 et 1933. Au lieu de protéger l’économie américaine, Smoot-Hawley a transformé une récession sévère en dépression catastrophique prolongée. Les économistes débattent encore aujourd’hui de la magnitude exacte de l’impact de Smoot-Hawley par rapport aux autres facteurs de la Dépression. Mais il y a un consensus presque universel: les tarifs ont substantiellement aggravé la situation. C’est précisément pour éviter une répétition de ce désastre que le Congrès, après la Seconde Guerre mondiale, a construit un système commercial international basé sur la réduction progressive des barrières tarifaires et la négociation multilatérale. Trump rejette explicitement ce système, le qualifiant de trahison des intérêts américains. Il veut revenir à l’ère pré-Smoot-Hawley du protectionnisme agressif. Mais ignorer l’histoire ne change pas ses leçons. Les mêmes causes produisent les mêmes effets.
Nixon et l’abus du Trading with the Enemy Act
Un autre précédent pertinent est l’utilisation par le président Richard Nixon en 1971 du Trading with the Enemy Act — précurseur législatif de l’IEEPA — pour imposer une surtaxe temporaire de 10% sur toutes les importations. Nixon affirmait que la crise du dollar et les déséquilibres commerciaux constituaient une urgence économique justifiant des mesures extraordinaires. Cette action a choqué les partenaires commerciaux américains et a précipité une crise dans le système monétaire de Bretton Woods. Les critiques ont attaqué Nixon pour avoir abusé d’une loi censée gérer des guerres et des conflits armés pour imposer une politique commerciale controversée. C’est précisément en réponse aux abus de Nixon que le Congrès a adopté l’IEEPA en 1977 — une loi destinée à encadrer plus strictement les pouvoirs d’urgence présidentiels. Le Congrès voulait s’assurer qu’un futur président ne pourrait pas simplement déclarer une « urgence » économique pour contourner l’autorité commerciale du Congrès. Mais Trump fait exactement ce que l’IEEPA était censée prévenir. Il invoque la loi d’urgence pour imposer la politique commerciale la plus expansive de l’histoire moderne sans autorisation congressionnelle substantielle. C’est Nixon en stéroïdes — et le Congrès cette fois ne fait rien pour l’arrêter.
Les guerres commerciales qui n’ont jamais de gagnants
L’histoire économique mondiale offre une leçon claire et répétée: les guerres commerciales ne produisent que des perdants. Quand un pays impose des tarifs, les partenaires ripostent. Les exportations des deux côtés chutent. Les consommateurs des deux côtés paient plus cher. Les entreprises des deux côtés font face à des coûts accrus et une incertitude destructrice. Les chaînes d’approvisionnement optimisées sur des décennies sont détruites. Et à la fin, après des années de douleur économique mutuelle, les pays finissent généralement par négocier un retour à un commerce plus ouvert — essentiellement revenant au point de départ mais après avoir causé des dégâts massifs. C’était vrai dans les années 1930. C’était vrai durant les tensions commerciales des années 1970 et 1980. C’est toujours vrai aujourd’hui. Mais Trump et ses conseillers économiques nationalistes rejettent cette sagesse historique comme propaganda mondialiste. Ils croient — ou prétendent croire — que l’Amérique peut « gagner » une guerre commerciale grâce à sa taille économique. Que les autres pays céderont face à la pression américaine et accepteront des termes commerciaux plus favorables aux États-Unis. Peut-être que ça fonctionnera avec quelques petits pays désespérés pour l’accès au marché américain. Mais avec des économies majeures comme l’Union européenne, la Chine, le Japon? Ils ont autant à perdre qu’à gagner en cédant. Donc ils ne cèdent pas. Et la guerre commerciale s’enlise, causant des dégâts croissants à tous les participants.
La décision à venir et ses implications
Le vote préliminaire secret du 7 novembre
Selon la tradition de la Cour suprême, les neuf juges se réuniront en conférence privée le jeudi 7 novembre — deux jours après l’audience orale — pour tenir un vote préliminaire sur l’affaire. Cette conférence est strictement confidentielle. Aucun clerc, aucun assistant, personne d’autre que les juges n’est présent. Ils discutent de l’affaire, expriment leurs vues, et votent. Le juge senior de la majorité — si c’est le Chief Justice John Roberts, alors lui, sinon le juge conservateur le plus senior — assigne ensuite la rédaction de l’opinion majoritaire à l’un des juges de la majorité. Le processus de rédaction prend généralement plusieurs semaines ou mois. L’auteur produit un brouillon, le circule aux autres juges, reçoit des commentaires et suggestions, révise. Pendant ce temps, les juges dissidents rédigent leurs propres opinions expliquant pourquoi ils désapprouvent. Parfois, durant ce processus, des juges changent d’avis — un vote préliminaire 5-4 peut devenir 6-3 ou même 4-5 si les opinions écrites convainquent quelqu’un. Donc le vote du 7 novembre n’est pas final. Mais il donne une indication forte de la direction probable. Et tout ce qu’on sait des questions posées durant l’audience suggère qu’une majorité — possiblement une large majorité — des juges sont sceptiques de l’usage que Trump fait de l’IEEPA.
Le timing incertain de la décision finale
La Cour suprême n’a aucune deadline légale pour rendre sa décision. Elle peut prendre tout le temps qu’elle juge nécessaire. Historiquement, les décisions sur des affaires entendues en novembre sont généralement rendues entre février et juin de l’année suivante. Mais cette affaire a une urgence particulière — chaque jour qui passe, le gouvernement collecte des millions de dollars supplémentaires en tarifs potentiellement illégaux, et l’économie subit des distorsions croissantes. Les plaignants ont demandé une décision accélérée. L’administration Trump, ironiquement, pourrait préférer un délai — plus longtemps les tarifs restent en place, plus ils deviennent la nouvelle normalité, plus difficile devient leur renversement. Si la Cour statue contre Trump mais ne rend sa décision qu’en juin 2026, ça lui donne 18 mois de collecte tarifaire et de temps pour préparer et implémenter son plan B. Les experts juridiques estiment qu’une décision pourrait venir dès janvier-février 2026, mais pourrait aussi être retardée jusqu’en mai-juin. Cette incertitude elle-même cause des dégâts économiques — les entreprises ne peuvent pas planifier quand elles ne savent pas si les tarifs actuels dureront un mois ou un an.
Les scénarios possibles du 5-4 au 8-1
Quels sont les scénarios plausibles pour le vote final? À une extrémité du spectre, un vote 8-1 ou 7-2 contre Trump, avec seulement les juges les plus conservateurs (peut-être Clarence Thomas et Samuel Alito) acceptant l’interprétation expansive de l’IEEPA. Ce serait une répudiation judiciaire dévastatrice, signalant un consensus presque universel que Trump a dépassé son autorité. À l’autre extrémité, un vote 5-4 en faveur de Trump, avec les six conservateurs se raliant finalement à une vision maximaliste du pouvoir présidentiel malgré leurs doutes exprimés durant l’audience. Ce serait une victoire pour Trump mais controversée, avec trois juges dissidents et beaucoup de critiques sur la politisation de la Cour. Le scénario le plus probable, basé sur l’audience? Probablement 6-3 ou 7-2 contre Trump. Les trois juges progressistes voteront certainement contre. Barrett et Gorsuch semblaient très sceptiques. Roberts et Kavanaugh ont également exprimé des doutes, quoique plus modérés. Alito et Thomas sont les plus susceptibles de soutenir Trump. Donc une majorité confortable contre les tarifs IEEPA semble l’issue la plus plausible. Mais jusqu’à ce que l’opinion soit publiée, tout reste possible — y compris des développements surprenants où la Cour trouve un compromis étroit qui invalide certains tarifs mais en maintient d’autres.
Conclusion
Voilà donc où nous en sommes ce samedi 8 novembre 2025. La Cour suprême des États-Unis — dont trois membres ont été personnellement nommés par Donald Trump — a passé trois heures mercredi à démanteler les arguments juridiques de son administration sur les tarifs IEEPA. Les juges, conservateurs comme progressistes, ont exprimé un scepticisme profond face à l’idée qu’un déficit commercial vieux de cinquante ans constitue soudainement une « urgence nationale » justifiant que le président s’arroge des pouvoirs tarifaires illimités appartenant constitutionnellement au Congrès. Amy Coney Barrett a questionné l’absurdité de tarifer littéralement tous les pays — l’Espagne? La France? — comme menaces à la sécurité nationale. Neil Gorsuch a souligné que le Congrès a déjà délégué des pouvoirs tarifaires spécifiques et limités, suggérant qu’il n’a jamais voulu donner un mandat général. Les trois juges progressistes ont attaqué les implications constitutionnelles d’un président devenant législateur économique sans contrainte. Tout indique qu’une majorité confortable votera contre Trump. Et sa réaction? « Je pense que nous allons devoir préparer un plan B. » Pas de respect pour le verdict judiciaire à venir. Pas d’acceptation que peut-être — juste peut-être — il a dépassé son autorité légale. Juste la détermination à contourner les tribunaux et à continuer sa guerre commerciale par d’autres moyens.
Ce « plan B » existe déjà, méticuleusement préparé par ses avocats et conseillers commerciaux. La Section 301 pour cibler des pays spécifiques accusés de pratiques déloyales. La Section 338, dormante depuis la Grande Dépression, offrant des pouvoirs commerciaux jamais testés juridiquement. La Section 232 élargie pour couvrir pratiquement tous les secteurs sous prétexte de sécurité nationale. Trump a raison sur un point: même si la Cour suprême le bloque, il a d’autres options. Le Congrès a délégué tellement de pouvoirs tarifaires fragmentés au fil des décennies qu’un président déterminé peut les assembler pour construire pratiquement n’importe quelle architecture tarifaire. Les experts estiment qu’il pourrait reconstruire l’essentiel de ses tarifs actuels en quelques mois via ces autorités alternatives. Donc la bataille juridique devant la Cour suprême, aussi importante soit-elle constitutionnellement, pourrait finalement ne changer que peu de choses économiquement. Les tarifs resteront. Les prix élevés pour les consommateurs américains continueront. Les représailles commerciales étrangères persisteront. Les petites entreprises continueront de faire faillite. Le Congrès républicain continuera d’abdiquer sa responsabilité constitutionnelle. Et Trump continuera à prétendre qu’il « gagne » sa guerre commerciale même pendant que l’économie américaine saigne lentement. Nous documentons en temps réel non seulement un abus de pouvoir exécutif, mais l’effondrement d’un système entier de freins et contrepoids constitutionnels. Les tribunaux peuvent encore imposer des limites — peut-être. Mais quand un président est déterminé à ignorer ces limites et dispose des outils légaux pour les contourner, qu’est-ce que les limites signifient vraiment?
TRUMP !.Quelle est la limite terrestre tolérable par la vie afin d accorder l intégration des etres qui de l intemporalité visée par la conscience vers l inconscience et que cela demeure la seule loi de la vie définie par cette LOI DU RETOUR qui détermine un acces a cette facette la plus propre et la plus puissante de la justice et de la paix face a l existence sur la terre voire meme dans l univers ?