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Barrett démonte l’argument de l’urgence nationale universelle

Mercredi 5 novembre, la Cour suprême a tenu une audience de trois heures sur la légalité des tarifs trumpistes — une durée extraordinaire qui signale l’importance et la complexité de l’affaire. Les avocats de l’administration ont présenté leur argument central: le déficit commercial américain constitue une urgence nationale sous l’IEEPA de 1977, donnant au président le pouvoir de prendre des mesures économiques extraordinaires, incluant l’imposition de tarifs massifs. Mais dès les premières minutes, il était évident que cet argument ne passait pas. La juge Amy Coney Barrett, nomination trumpiste de 2020, a posé la question qui tue: « Est-ce votre position que chaque nation devait être tarifée en raison de menaces à la défense et à la base industrielle? Par exemple, l’Espagne? La France? » Sa question exposait l’absurdité logique de la position gouvernementale. Comment peut-on prétendre que littéralement tous les partenaires commerciaux américains — y compris des alliés de l’OTAN, des démocraties stables, des pays avec lesquels les États-Unis entretiennent des relations pacifiques depuis des décennies — représentent soudainement une menace à la sécurité nationale? Barrett n’a pas formulé ça comme une question rhétorique. Elle voulait vraiment comprendre la logique. Et l’avocat du gouvernement n’avait pas de réponse convaincante.

Gorsuch et les limites du pouvoir présidentiel

Le juge Neil Gorsuch, autre nomination de Trump en 2017, a également exprimé des doutes profonds. Gorsuch est connu pour sa philosophie textualiste et originaiste — il croit que les lois doivent être interprétées selon leur texte clair et l’intention originale du Congrès au moment de leur adoption. Et l’IEEPA de 1977 a été adoptée pour gérer des crises internationales aiguës — des prises d’otages, des invasions, des effondrements économiques soudains — pas pour réorganiser fondamentalement le système commercial mondial selon les caprices présidentiels. Gorsuch a questionné si l’administration ne transformait pas une loi d’urgence étroitement définie en mandat général pour la politique économique présidentielle. Il a souligné que le Congrès a explicitement délégué au président des pouvoirs tarifaires limités dans plusieurs autres lois — la Section 232 pour les menaces à la sécurité nationale dans des secteurs spécifiques, la Section 301 pour les pratiques commerciales déloyales de pays particuliers. Si le Congrès avait voulu donner au président un pouvoir tarifaire illimité, il l’aurait fait explicitement. Le fait qu’il ait créé ces canaux étroits et procéduraux suggère qu’il n’a jamais voulu que l’IEEPA devienne un outil de politique commerciale de masse. C’était un argument dévastateur pour l’administration, et il venait d’un juge que Trump pensait pouvoir compter comme allié automatique.

Les juges libéraux unanimement opposés

Si les juges conservateurs montraient du scepticisme, les trois juges progressistes — Elena Kagan, Sonia Sotomayor et Ketanji Brown Jackson — étaient franchement hostiles aux arguments gouvernementaux. Kagan a attaqué l’idée qu’un déficit commercial permanent pourrait constituer une « urgence » au sens où l’IEEPA utilise ce terme. Les États-Unis ont un déficit commercial chaque année depuis 1975 — cinquante ans consécutifs. Si c’est une urgence, c’est la plus longue urgence de l’histoire américaine. Et si chaque situation économique déplaisante peut être déclarée urgence nationale donnant au président des pouvoirs extraordinaires, alors le concept d’urgence perd tout son sens. Sotomayor a souligné les implications constitutionnelles: la Constitution donne au Congrès — pas au président — le pouvoir de « réguler le commerce avec les nations étrangères » et de « lever des taxes et des impôts ». Les tarifs sont des taxes. Permettre au président de les imposer unilatéralement sans véritable autorisation congressionnelle viole la séparation fondamentale des pouvoirs. Jackson a noté les conséquences pratiques catastrophiques: si cette interprétation de l’IEEPA est valide, qu’est-ce qui empêche n’importe quel futur président de déclarer n’importe quoi urgence nationale et de prendre des mesures économiques drastiques? Le chômage? Le changement climatique? Les inégalités de revenu? Ça transformerait le président en législateur économique quasi-illimité. C’est exactement le type de pouvoir exécutif impérial que la Constitution visait à prévenir.

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claude giard
claude giard
40 minutes ago

TRUMP !.Quelle est la limite terrestre tolérable par la vie afin d accorder l intégration des etres qui de l intemporalité visée par la conscience vers l inconscience et que cela demeure la seule loi de la vie définie par cette LOI DU RETOUR qui détermine un acces a cette facette la plus propre et la plus puissante de la justice et de la paix face a l existence sur la terre voire meme dans l univers ?

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