Matt Gaetz, l’avocat de la débauche législative
Le nom de Matt Gaetz résonne désormais comme un symbole de déchéance politique. L’ancien représentant de Floride, ce fervent défenseur de Donald Trump qui se voyait déjà procureur général des États-Unis, a vu son rêve s’écrouler sous le poids d’un rapport d’éthique accablant publié en décembre 2024. Le document de trente-sept pages, fruit d’une enquête minutieuse du Comité d’éthique de la Chambre, dresse un portrait sordide d’un élu qui aurait transformé son mandat en une longue débauche financée par l’argent public. Prostitution, viol statutaire, consommation de drogues illicites, utilisation abusive de fonds—la liste des accusations est si longue qu’elle en devient vertigineuse.
Ce qui frappe dans ce rapport, c’est la banalité du mal. Gaetz ne cachait même pas ses activités. Les enquêteurs ont récupéré des messages textuels où il désignait les drogues par des euphémismes transparents— »party favors », « rolls », « vitamines ». Comme si la cocaïne était devenue aussi ordinaire qu’un complément alimentaire dans son quotidien. Plus troublant encore, le comité a découvert qu’il avait créé une fausse adresse électronique depuis son bureau du Capitole dans le seul but d’acheter de la marijuana. Voilà donc comment se comportait un homme qui, quelques mois auparavant, se présentait comme le futur gardien de la justice américaine.
Une adolescente, quatre cents dollars et deux rapports sexuels
Mais le plus glaçant dans cette affaire, c’est le témoignage de la « Victime A ». Cette jeune fille, âgée de dix-sept ans à l’époque des faits en 2017, venait tout juste de terminer sa troisième année de lycée lorsqu’elle a croisé la route de Gaetz lors d’une soirée. Le rapport détaille comment le représentant a eu des relations sexuelles avec elle à deux reprises cette nuit-là, lui remettant ensuite quatre cents dollars en espèces qu’elle a compris comme étant un paiement pour services rendus. La jeune fille a également déclaré avoir vu Gaetz consommer de la cocaïne durant la soirée. Elle n’avait pas révélé son âge, et il ne le lui avait pas demandé—un détail qui n’excuse rien mais qui révèle l’insouciance criminelle du personnage.
Face à ces accusations explosives, Gaetz a choisi la fuite en avant. Il a démissionné du Congrès en novembre 2024, juste après que Trump ait annoncé vouloir le nommer procureur général—une nomination qui s’est écroulée une semaine plus tard face à l’opposition de ses propres collègues républicains. Puis, dans un geste désespéré, il a intenté un procès fédéral pour empêcher la publication du rapport d’éthique, arguant qu’en tant que citoyen privé, il n’était plus sous la juridiction du comité. Le rapport a été publié quelques heures plus tard, pulvérisant ses dernières prétentions à l’innocence.
Je regarde ce naufrage et je me demande combien d’autres se cachent encore derrière les portes capitonnées. Combien de « vitamines » circulent encore dans les couloirs du pouvoir ? Combien de carrières politiques reposent sur des mensonges si épais qu’ils en deviennent suffocants ? On nous parle de valeurs, de morale, de décence—mais la vérité, c’est que certains ont construit leur empire sur du sable mouvant et qu’ils s’enfoncent maintenant, inexorablement.
Madison Cawthorn, le jeune loup qui a osé briser l'omerta
Des accusations qui ont fait trembler le GOP
Si Matt Gaetz représente le scandale avéré, Madison Cawthorn incarne celui qui a osé dénoncer l’hypocrisie de son propre camp avant d’en payer le prix fort. En mars 2022, ce jeune représentant de Caroline du Nord, alors âgé de vingt-six ans et plus jeune membre du Congrès, a lâché une bombe lors d’une apparition dans le podcast conservateur « Warrior Poet Society ». Il a affirmé avoir été invité à des orgies à Washington et avoir vu des figures importantes du mouvement anti-drogue consommer de la cocaïne devant lui. Des personnalités dans la soixantaine et la soixantaine-dizaine d’années, a-t-il précisé, des gens qu’on imagine respectables, intègres, au-dessus de tout soupçon.
L’onde de choc a été immédiate et dévastatrice. Ses collègues républicains, furieux d’être potentiellement désignés, ont exigé qu’il « nomme les noms ». Lors d’une réunion à huis clos de la conférence républicaine, le représentant Steve Womack de l’Arkansas s’est levé pour exprimer sa colère—lui qui prenait rarement la parole dans ce genre de contexte. Le leader de la minorité Kevin McCarthy a convoqué Cawthorn pour une discussion sérieuse, tout comme Scott Perry, président du House Freedom Caucus auquel appartenait le jeune représentant. Le message était clair : tu fermes ta gueule ou tu dévoiles tout, mais tu ne peux pas balancer des accusations pareilles sans conséquences.
La chute rapide d’un iconoclaste
Cawthorn n’a jamais fourni de preuves concrètes ni révélé d’identités précises. Ses accusations sont restées dans le flou, oscillant entre la dénonciation courageuse et la diffamation irresponsable. Ce qui est certain, c’est que sa carrière politique en a pris un coup fatal. Déjà controversé pour avoir soutenu l’insurrection du 6 janvier 2021, pour avoir tenu des propos racistes envers le sénateur Cory Booker et pour avoir été accusé de harcèlement sexuel par plusieurs femmes, Cawthorn s’est retrouvé isolé au sein de son propre parti. Les républicains ont fermé les rangs contre lui, non pas pour défendre la vérité, mais pour protéger leur réputation collective.
L’histoire de Cawthorn soulève une question troublante : disait-il la vérité ou cherchait-il simplement à se positionner comme plus vertueux que ses pairs ? Les deux hypothèses peuvent coexister. Il est possible qu’il ait effectivement assisté à des scènes dérangeantes tout en étant lui-même loin d’être un saint. Ce qui est indéniable, c’est que ses déclarations ont fissuré le vernis de respectabilité du Parti républicain et ont ouvert une boîte de Pandore que beaucoup auraient préféré garder scellée.
La vérité fait mal, n’est-ce pas ? Elle brûle comme de l’acide sur la peau. Cawthorn a peut-être menti, exagéré, dramatisé—mais il a aussi peut-être simplement dit tout haut ce que tout le monde savait déjà tout bas. Et c’est ça qui dérange le plus. Pas les accusations elles-mêmes, mais le fait qu’elles aient été prononcées publiquement, qu’elles aient été entendues, enregistrées, diffusées.
L'hypocrisie monumentale de la guerre contre la drogue
Hunter Biden, le bouc émissaire parfait
Pendant des années, les républicains ont fait de Hunter Biden leur cible favorite. Le fils du président, dont les luttes contre l’addiction à la cocaïne et au crack sont publiquement connues, est devenu le symbole de tout ce qui clochait selon eux avec l’administration Biden. Ils ont organisé des auditions, commandé des enquêtes, exigé des poursuites judiciaires—et ils ont obtenu gain de cause avec des accusations fédérales pour possession illégale d’arme à feu et fraude fiscale. La moralisation était constante : regardez cette famille corrompue, regardez ces démocrates décadents, regardez ce fils indigne d’un président.
Sauf que Hunter Biden n’a jamais occupé de poste au sein de l’administration de son père. Il n’a jamais été conseiller à la Maison-Blanche, ni secrétaire adjoint de quoi que ce soit. Ses problèmes de drogue n’ont affecté que sa propre vie, pas la politique nationale. Contrairement à Matt Gaetz qui légiférait potentiellement sous influence, contrairement aux membres du Congrès qui selon Cawthorn consommaient de la cocaïne tout en dirigeant des initiatives anti-drogue, Hunter Biden était un citoyen privé confronté à ses démons personnels. Mais ça n’a pas empêché le GOP de le crucifier publiquement, d’en faire un épouvantail médiatique, un repoussoir moral.
Trump et ses nominations controversées
L’ironie atteint son paroxysme lorsqu’on examine les nominations de Donald Trump pour son administration. Durant son premier mandat, il a nommé Larry Kudlow comme conseiller économique en chef—un homme qui avait ouvertement parlé de son passé de toxicomane et de son parcours de sobriété. Kudlow n’a d’ailleurs pas cherché à revenir pour un second mandat. Pour son retour en 2025, Trump a contourné les vérifications de sécurité du FBI pour certains de ses candidats au Cabinet, choisissant de ne pas exposer publiquement les détails potentiellement embarrassants de leur passé. Une stratégie de l’opacité qui soulève des questions légitimes sur qui a vraiment accès aux leviers du pouvoir et sous quelles conditions.
Cette double mesure est révélatrice. Quand il s’agit d’un démocrate, chaque faiblesse devient un scandale national. Quand il s’agit d’un républicain, on parle de « parcours de sobriété », de « rédemption », de « seconde chance ». Les règles du jeu ne sont manifestement pas les mêmes selon le camp politique. Et pendant ce temps, l’administration Trump a retardé ou annulé près de cent-quarante millions de dollars de subventions destinées aux programmes de lutte contre les overdoses de fentanyl en 2025. Des programmes qui sauvent des vies, qui offrent des traitements, qui donnent de l’espoir—mais qui ont été sacrifiés sur l’autel de l’efficacité budgétaire du Department of Government Efficiency (DOGE).
Les coupes budgétaires qui tuent
En juillet 2025, l’administration Trump a gelé le financement du programme OD2A (Overdose Data to Action), un dispositif crucial financé par le CDC pour répondre aux crises d’overdose au fentanyl. Selon des fonctionnaires du CDC interrogés anonymement par NPR, cette suspension découle directement des initiatives de réduction des coûts menées par DOGE et le Bureau de la gestion et du budget. Les départements de santé publique à travers le pays, qui dépendent de ces fonds pour maintenir leurs programmes de traitement des addictions, se sont retrouvés dans l’incertitude totale. Beaucoup ont déjà cessé toute nouvelle dépense, ne sachant pas s’ils recevraient les financements promis avant la fin de leur budget actuel en septembre.
Les chiffres sont éloquents : en janvier 2025, le CDC a enregistré environ quatre-vingt-deux mille décès par overdose aux États-Unis. C’est une baisse significative par rapport au pic d’août 2023 où cent-quatorze mille décès avaient été recensés—une amélioration directement attribuable aux programmes de traitement et de prévention que l’administration cherche maintenant à démanteler. Les experts en santé publique interrogés par NPR ont exprimé leur inquiétude : ces actions pourraient détruire tout le cadre de traitement des addictions qui avait été péniblement construit et qui commençait enfin à porter ses fruits. Ironie suprême, ces mêmes responsables ont souligné que l’administration Trump et les législateurs républicains ont affiché publiquement leur soutien à la prévention des overdoses—mais que les processus budgétaires opaques impliquant le CDC, le HHS, l’OMB et DOGE ont paralysé l’allocation des subventions.
Il y a quelque chose de profondément révoltant dans cette hypocrisie. Pendant qu’ils coupent les financements aux toxicomanes ordinaires, pendant qu’ils laissent mourir des milliers de personnes par overdose faute de traitement accessible, certains de leurs propres membres sniffent tranquillement leur cocaïne dans les bureaux du Capitole. C’est de la cruauté pure, de l’indifférence élevée au rang de politique publique.
Le système judiciaire à deux vitesses
Gaetz échappe aux poursuites
Malgré l’accumulation de preuves contre lui, Matt Gaetz n’a jamais été inculpé par le Département de la Justice. L’enquête fédérale sur ses activités présumées s’est terminée sans qu’aucune accusation ne soit portée. Cette absence de poursuites judiciaires ne signifie pas innocence—elle signifie simplement que les procureurs ont estimé qu’ils ne pouvaient pas obtenir une condamnation au-delà de tout doute raisonnable. Peut-être par manque de preuves admissibles en cour, peut-être par crainte que les témoins ne soient pas jugés crédibles, peut-être parce que les connexions politiques de Gaetz lui ont offert une protection tacite. Le rapport d’éthique de la Chambre a conclu qu’il existait des « preuves substantielles » de violations graves, mais ces preuves n’ont jamais été testées devant un tribunal.
Comparez cela au traitement réservé à un citoyen ordinaire accusé des mêmes faits. Un homme lambda surpris en train d’acheter de la cocaïne, de fréquenter des prostituées, d’avoir des relations sexuelles avec une mineure—cet homme serait derrière les barreaux avant même d’avoir pu appeler un avocat. Mais Gaetz, protégé par son statut d’élu, par ses connexions au sein du Parti républicain, par sa proximité avec Donald Trump, a pu démissionner tranquillement et poursuivre sa vie comme si de rien n’était. Il a même eu l’audace d’intenter un procès pour empêcher la publication du rapport qui l’accable, invoquant son nouveau statut de « citoyen privé » pour échapper à la responsabilité.
Les républicains ordinaires derrière les barreaux
L’histoire politique américaine est parsemée d’élus républicains condamnés pour des infractions liées à la drogue. En 2013, le représentant Trey Radel de Floride est devenu le premier membre actif du Congrès à être condamné pour un crime lié à la cocaïne. Il avait plaidé coupable pour possession après avoir tenté d’acheter trois grammes et demi de cocaïne pour deux-cent-cinquante dollars auprès d’un agent infiltré. L’ironie était savoureuse : Radel venait juste de voter avec ses collègues républicains pour imposer des tests de dépistage de drogue aux bénéficiaires de bons alimentaires. Nancy Pelosi, leader de la minorité démocrate à l’époque, avait résumé la situation avec une éloquence cinglante : « C’est genre, quoi !? »
Dans les années 1980, le représentant texan Charlie Wilson avait été accusé à trois reprises de consommation de cocaïne—une fois à Las Vegas, deux fois aux îles Caïmans. Le Département de la Justice avait évoqué des « problèmes juridictionnels » et conclu qu’il n’y avait pas suffisamment de « preuves crédibles et admissibles » pour l’inculper. Wilson a poursuivi sa carrière politique sans véritable conséquence. Les exemples se multiplient, dessinant un portrait troublant d’un système où le pouvoir politique offre une immunité de facto contre les conséquences de ses propres transgressions.
La justice est censée être aveugle, mais elle semble avoir une vision parfaite quand il s’agit de distinguer les puissants des faibles. Elle sait reconnaître un costume cravate d’un sweat à capuche, un badge du Congrès d’un casier judiciaire. Et cette distinction n’est pas accidentelle—elle est structurelle, institutionnalisée, défendue.
La marijuana, le nouveau champ de bataille idéologique
Le revirement spectaculaire du soutien républicain
Un sondage publié en novembre 2025 a révélé un changement dramatique dans l’opinion républicaine concernant la légalisation de la marijuana. Le soutien parmi les électeurs du GOP pour l’usage légal du cannabis a chuté de cinquante-trois pour cent en 2023 à quarante pour cent en 2025—le pourcentage le plus bas jamais enregistré. Ce revirement est d’autant plus surprenant qu’il intervient alors que la marijuana médicale gagne du terrain dans des États traditionnellement conservateurs et que les démocrates poussent pour une légalisation fédérale. Qu’est-ce qui explique ce durcissement soudain ? La réponse se trouve probablement dans la polarisation politique croissante et dans la volonté du Parti républicain de se réapproprier la rhétorique de la « loi et l’ordre » en prévision des élections futures.
En novembre 2025, le sénateur démocrate Jeff Merkley de l’Oregon a dénoncé avec véhémence la décision du leadership républicain du Sénat de bloquer le vote sur son amendement qui aurait permis aux vétérans militaires d’obtenir des recommandations pour le cannabis médical auprès des médecins du Département des Affaires des vétérans. « C’est tout simplement cruel, » a-t-il déclaré à Marijuana Moment. Des milliers de vétérans souffrant de stress post-traumatique, de douleurs chroniques, de troubles du sommeil—des hommes et des femmes qui ont servi leur pays et qui méritent l’accès à tous les traitements disponibles—se voient refuser cette option thérapeutique par idéologie politique pure.
Le chanvre THC, nouvelle cible républicaine
En parallèle, le Congrès a récemment adopté une loi fédérale pour recriminaliser les produits à base de THC dérivé du chanvre. Cette décision a été insérée discrètement dans un projet de loi plus large, sans débat public approfondi—ce que l’opérateur politique républicain Roger Stone a qualifié de « solution de facilité bon marché ». Stone, habituellement aligné avec les positions conservatrices, a fustigé cette approche : « Les agriculteurs, les fabricants, les détaillants et oui, les patients qui en sont venus à compter sur les produits dérivés du chanvre pour se soulager sont tous des dommages collatéraux. » Sa critique révèle une fissure au sein même du mouvement conservateur entre les libertariens qui prônent la liberté individuelle et les moralistes qui veulent imposer leurs valeurs par la loi.
Le gouverneur démocrate du Kentucky, Andy Beshear, a critiqué cette interdiction fédérale en affirmant que « nous devrions établir ces réglementations ici au Kentucky » et que l’État pouvait « faire ce qu’il faut pour protéger tous nos citoyens sans handicaper une industrie qui fait vivre beaucoup de gens. » Dans le Rhode Island, les sénateurs Jack Reed et Sheldon Whitehouse ont défendu leur vote en faveur de la recriminalisation en invoquant les demandes de « la vaste majorité des procureurs généraux des États. » Mais ces justifications sonnent creux lorsqu’on sait que l’industrie du chanvre employait des milliers de personnes et générait des centaines de millions de dollars en activité économique—une industrie décimée du jour au lendemain par une décision politique déguisée en préoccupation de santé publique.
C’est toujours la même histoire qui se répète : les règles pour vous, la liberté pour nous. Tu ne peux pas fumer un joint pour soulager ta douleur chronique, mais moi je peux sniffer une ligne entre deux votes au Congrès. Tu perds ton emploi si tu échoues un test de dépistage, mais moi je deviens procureur général même avec un rapport d’éthique qui m’accable. L’égalité devant la loi ? Un mythe, une blague cruelle.
La campagne militaire contre les cartels, diversion ultime
Les frappes secrètes dans les Caraïbes et le Pacifique
En octobre 2025, l’administration Trump a lancé une campagne militaire contre ce qu’elle présente comme des navires transportant de la drogue dans les Caraïbes et le Pacifique. Ces opérations, menées sans consultation ni autorisation du Congrès, ont suscité l’inquiétude même parmi les républicains habituellement loyaux à Trump. Le représentant Brian Mast de Floride, président du Comité des affaires étrangères, a justifié les frappes en affirmant qu’elles reposaient sur « des renseignements crédibles fournis par de nombreuses agences. » Mais le sénateur John Kennedy de Louisiane a admis que des auditions de supervision seraient nécessaires, surtout après qu’un survivant d’une frappe du 16 octobre ait été rapatrié puis relâché—soulevant des questions sur l’exactitude des renseignements utilisés pour justifier ces attaques.
Le 30 octobre 2025, l’administration a fourni aux sénateurs républicains une justification légale secrète et une liste de cibles pour ces opérations. Mais lors d’un briefing à la Chambre, les démocrates ont découvert que les narcotiques ciblés dans les cargaisons étaient principalement de la cocaïne, pas du fentanyl qui cause pourtant la majorité des overdoses mortelles aux États-Unis. La représentante Sara Jacobs de Californie a déclaré : « Ils ont admis que tous les narcotiques provenant de cette partie du monde sont de la cocaïne. Ils ont un peu parlé du lien entre cocaïne et fentanyl, mais je ne suis pas convaincue que ce qu’ils ont dit était exact. » Cette révélation soulève une question dérangeante : cette guerre contre les cartels est-elle réellement destinée à protéger les Américains, ou est-ce une diversion politique pour détourner l’attention des scandales domestiques ?
Le Bureau de la politique nationale de contrôle des drogues sous pression
Le Département de la Justice a publié en novembre 2025 un mémo du Bureau du conseiller juridique justifiant les attaques militaires contre les navires suspects. Mais la base légale de ces opérations reste floue. Des sénateurs des deux partis ont exprimé leur frustration concernant cette justification et ont exigé de l’administration qu’elle présente un argumentaire juridique plus solide. Le secrétaire d’État Marco Rubio a assuré aux sénateurs républicains lors d’un briefing que l’administration était sur des « bases légales solides » et a décrit les renseignements soutenant l’opération comme « exquis ». Mais ces assurances verbales ne suffisent pas à calmer les inquiétudes sur une expansion du pouvoir exécutif qui contourne les mécanismes de contrôle constitutionnels.
Pendant ce temps, le financement des programmes de traitement des addictions continue d’être saboté. Les fonctionnaires du CDC ont confié à NPR que l’administration avait déjà licencié une équipe de chercheurs qui suivaient la consommation de drogue chez les Américains depuis cinquante ans—des données considérées comme essentielles par les professionnels de santé en première ligne. Le plan budgétaire du président Trump approuvé en juillet inclut des réductions substantielles de Medicaid, le programme d’assurance gouvernementale qui finance la plupart des traitements contre l’alcoolisme et la toxicomanie aux États-Unis. Selon des recherches publiées début juillet, jusqu’à cent-cinquante-six mille personnes dépendantes au fentanyl ou à d’autres opioïdes pourraient perdre l’accès à des traitements médicaux efficaces comme la méthadone et le suboxone. Voilà la réalité derrière la rhétorique guerrière : on bombarde des bateaux à l’étranger pendant qu’on abandonne les toxicomanes chez soi.
La guerre contre la drogue a toujours été un mensonge, une mascarade, une excuse pour exercer le pouvoir et contrôler les populations. Mais là, on atteint un nouveau niveau de cynisme : on frappe des cibles dans les Caraïbes pour faire des manchettes pendant qu’on coupe les budgets qui sauvent réellement des vies. C’est du spectacle pur, du théâtre politique au détriment des plus vulnérables.
Quand la santé publique devient une arme partisane
L’instrumentalisation de la crise des opioïdes
La crise des opioïdes a fait plus d’un million de morts aux États-Unis depuis les années 1990. C’est une tragédie nationale qui a dévasté des communautés entières, particulièrement dans les régions rurales et ouvrières qui votent massivement républicain. On aurait pu penser que ce parti, qui prétend défendre les valeurs des Américains ordinaires, aurait fait de la lutte contre cette épidémie une priorité absolue. Au lieu de cela, l’administration Trump de 2025 a systématiquement démantelé les infrastructures de santé publique destinées à combattre cette crise. Les licenciements de chercheurs fédéraux spécialisés dans les addictions, le gel des financements OD2A, les coupes dans Medicaid—chaque décision a affaibli la capacité du pays à répondre efficacement aux overdoses.
Ce qui rend cette situation encore plus révoltante, c’est que les responsables républicains continuent de proclamer leur soutien aux initiatives de prévention des overdoses. Ils votent pour des résolutions symboliques, prononcent des discours émouvants sur l’importance de sauver des vies, posent pour des photos avec des familles endeuillées—puis ils retournent à Washington et sabotent les programmes qui fonctionnent réellement. Cette dissonance cognitive n’est pas accidentelle : elle permet de maintenir une image publique de compassion tout en servant les intérêts idéologiques et budgétaires du parti. Les morts par overdose deviennent des statistiques abstraites, des dommages collatéraux acceptables dans la guerre contre le « gros gouvernement ».
Le silence assourdissant sur les solutions qui fonctionnent
Les données sont pourtant claires : les programmes d’échange de seringues, les sites de consommation supervisée, les traitements de substitution comme la méthadone et le suboxone—toutes ces approches de réduction des méfaits ont prouvé leur efficacité pour diminuer les overdoses et les infections liées à l’usage de drogues. Des pays comme le Portugal, la Suisse, les Pays-Bas ont adopté ces politiques et ont vu leurs taux de mortalité par overdose chuter drastiquement. Mais aux États-Unis, ces solutions se heurtent à un mur idéologique insurmontable. Pour beaucoup de conservateurs, reconnaître que la prohibition pure et dure ne fonctionne pas reviendrait à admettre que cinquante ans de « guerre contre la drogue » ont été un échec monumental—et cette admission est politiquement inacceptable.
Alors on continue de criminaliser les usagers, de remplir les prisons, de détruire des vies pour des quantités dérisoires de substances. Pendant ce temps, des élus comme Matt Gaetz consommaient tranquillement leur cocaïne sans jamais craindre de conséquences légales. Cette hypocrisie n’est pas un bug du système—c’est une fonctionnalité intentionnelle. Les lois sur les drogues n’ont jamais vraiment été destinées à protéger la santé publique. Elles ont toujours servi à contrôler certaines populations, à justifier la surveillance de masse, à alimenter le complexe carcéral-industriel. Et les républicains, qui se présentent comme les champions de la liberté individuelle, sont en réalité les architectes de ce système oppressif.
Je pense aux vies brisées, aux familles détruites, aux potentiels gâchés—tout ça à cause de politiques punitives imposées par des gens qui ne respectent même pas leurs propres règles. Il y a quelque chose de profondément immoral dans cette situation. Pas seulement immoral—criminel. Car chaque overdose qui aurait pu être évitée, chaque toxicomane qui aurait pu être soigné mais qui est mort faute d’accès aux soins, c’est un meurtre par négligence politique délibérée.
Conclusion
Le Parti républicain s’est construit sur une promesse de moralité, de discipline, de respect de la loi. Mais les révélations de ces dernières années ont pulvérisé cette façade. De Matt Gaetz à Madison Cawthorn, des accusations d’orgies cocaïnées aux rapports d’éthique accablants, le tableau qui émerge est celui d’une organisation rongée par l’hypocrisie la plus toxique. Ces élus qui prêchent la vertu sniffent de la cocaïne dans les toilettes du Capitole. Ces législateurs qui votent pour criminaliser les usagers de drogue échappent eux-mêmes à toute conséquence légale grâce à leurs connexions et leur statut. Cette administration qui se vante de combattre les cartels à l’étranger sabote les programmes de traitement des addictions sur le sol américain, condamnant des dizaines de milliers de personnes à mourir par overdose.
Il ne s’agit plus de cas isolés ou de pommes pourries dans un panier sain. C’est le panier tout entier qui est contaminé, le système tout entier qui est corrompu. La guerre contre la drogue n’a jamais été une guerre pour protéger les citoyens—c’était une guerre contre les citoyens, particulièrement les plus vulnérables, les plus marginalisés, ceux qui n’ont pas les moyens de s’offrir des avocats de luxe ou des connexions politiques. Pendant que des mères de famille se faisaient arrêter pour possession de marijuana, des membres du Congrès organisaient des soirées arrosées de cocaïne. Pendant que des jeunes noirs se faisaient incarcérer pour des délits mineurs, des représentants blancs créaient de fausses adresses email depuis leur bureau du Capitole pour acheter de la drogue.
L’ironie ultime, c’est que tout ceci se passe sous le regard d’une administration qui a fait de la « loi et l’ordre » son slogan principal. Donald Trump, qui a nommé Matt Gaetz comme futur procureur général avant de devoir reculer face au scandale, qui contourne les vérifications de sécurité du FBI pour ses nominations, qui coupe les financements aux programmes salvateurs tout en lançant des frappes militaires spectaculaires mais inefficaces—cet homme incarne parfaitement la dégénérescence morale du Parti républicain moderne. Ce n’est plus un parti politique au sens traditionnel du terme. C’est devenu une machine à perpétuer le pouvoir et les privilèges d’une élite qui se croit au-dessus des lois qu’elle impose aux autres.
Alors oui, le Parti républicain est devenu un parti de toxicomanes. Pas seulement au sens littéral, bien que les preuves s’accumulent dans ce sens. Mais surtout dans un sens plus profond : toxicomane du pouvoir, toxicomane de l’hypocrisie, toxicomane de cette dissonance cognitive qui permet de prêcher la morale tout en vivant dans le vice. Et comme tous les toxicomanes, ils refusent d’admettre qu’ils ont un problème. Ils pointent du doigt les autres, ils trouvent des boucs émissaires, ils créent des diversions—tout plutôt que de regarder leur propre reflet dans le miroir et d’affronter la vérité hideuse qui les fixe. Mais la vérité a cette qualité particulière : elle finit toujours par émerger, par suinter à travers les fissures, par exploser au grand jour. Et quand elle le fait, aucune quantité de cocaïne ne peut engourdir la douleur de la révélation.