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Un programme de réarmement historique

Le programme SAFE n’est pas né du hasard. Il s’inscrit dans le plan Readiness 2030 de la Commission européenne, une initiative ambitieuse visant à mobiliser jusqu’à mille trois cents milliards de dollars pour renforcer les capacités de défense du continent. L’invasion de l’Ukraine par la Russie en février deux mille vingt-deux a servi de déclencheur brutal, révélant les faiblesses criantes de l’industrie de défense européenne et sa dépendance excessive aux importations américaines. Les stocks de munitions se sont révélés dramatiquement insuffisants, les chaînes d’approvisionnement fragiles, et la capacité de production industrielle inadaptée aux besoins d’un conflit de haute intensité. Face à cette réalité, les dirigeants européens ont compris qu’ils devaient agir vite et massivement. SAFE représente la réponse financière à cette urgence existentielle.

Le mécanisme de SAFE repose sur l’émission d’obligations par l’Union européenne, bénéficiant de sa notation de crédit exceptionnelle, pour ensuite prêter ces fonds aux États membres à des conditions avantageuses. Les prêts sont destinés exclusivement à l’acquisition d’équipements militaires prioritaires, regroupés en deux catégories distinctes. La catégorie un comprend les besoins les plus urgents : munitions et missiles, systèmes d’artillerie incluant les capacités de frappe de précision à longue portée, capacités de combat terrestre et leurs systèmes de soutien, petits drones de classe un de l’OTAN et systèmes anti-drones associés, protection des infrastructures critiques, cyberdéfense, et mobilité militaire. La catégorie deux englobe des systèmes plus complexes : défense aérienne et antimissile, capacités maritimes de surface et sous-marines, drones de classes deux et trois de l’OTAN, moyens stratégiques comme le transport aérien stratégique, le ravitaillement en vol, les systèmes C4ISTAR ainsi que les actifs et services spatiaux, protection des actifs spatiaux, intelligence artificielle et guerre électronique.

L’Europe se réarme. Enfin. Après des décennies à vivre sous le parapluie nucléaire américain, à compter sur l’OTAN comme si c’était une garantie éternelle, voilà que le réveil sonne. Brutal. Nécessaire. L’Ukraine brûle, et l’Europe comprend soudain qu’elle pourrait être la prochaine. Alors elle sort le chéquier. Cent cinquante milliards. Ce n’est pas de l’argent. C’est de la survie qu’on achète.

Des critères d’éligibilité stricts pour protéger l’industrie européenne

Pour bénéficier des prêts SAFE, les équipements acquis doivent respecter des règles d’origine strictes. Au moins soixante-cinq pour cent du coût des composants doit provenir de l’Union européenne, de la Norvège ou de l’Ukraine. Cette exigence vise à garantir que les investissements massifs réalisés profitent prioritairement à l’industrie de défense européenne, créant des emplois sur le continent et renforçant l’autonomie stratégique de l’Europe. Les équipements de catégorie deux sont soumis à des conditions encore plus strictes, notamment l’obligation pour les contractants de posséder la capacité de modifier l’équipement en cas de besoin sans restrictions imposées par des pays tiers. Cette clause vise directement à éviter les situations où des pays européens se retrouveraient dépendants de technologies américaines ou chinoises dont ils ne maîtriseraient ni la maintenance ni l’évolution.

L’accord avec le Canada prévoit des dérogations limitées à ces règles, permettant aux fabricants canadiens de participer au-delà du plafond habituel de trente-cinq pour cent réservé aux pays tiers. Cette exception s’explique par plusieurs facteurs stratégiques. D’abord, le Canada est membre de l’OTAN et partage avec l’Europe des valeurs démocratiques et des intérêts de sécurité communs. Ensuite, l’industrie de défense canadienne possède des expertises spécifiques dans des domaines où l’Europe présente des lacunes, notamment en matière de systèmes de communication sécurisés, de technologies arctiques et de cyberdéfense. Enfin, cette ouverture au Canada permet à l’Europe de diversifier ses sources d’approvisionnement sans pour autant dépendre des États-Unis, créant ainsi une forme de triangulation stratégique. Les dix-neuf États membres qui ont soumis leurs plans nationaux d’investissement en défense à la fin novembre deux mille vingt-cinq ont d’ailleurs intégré cette dimension canadienne dans leurs projections, quinze d’entre eux prévoyant explicitement des projets communs avec l’Ukraine.

Soixante-cinq pour cent européen. C’est la ligne rouge. La frontière entre dépendance et autonomie. L’Europe a compris qu’on ne peut pas acheter sa sécurité à crédit chez un fournisseur unique. Surtout quand ce fournisseur s’appelle les États-Unis et qu’il a élu un président imprévisible. Le Canada, lui, se glisse dans cette brèche. Intelligent. Opportuniste. Nécessaire.

Sources

Sources primaires

Gouvernement du Canada, Communiqué de presse du Premier ministre, « Prime Minister Carney secures Canada’s participation in the European Union’s SAFE initiative », 1er décembre 2025. Commission européenne, « SAFE | Security Action for Europe », Programme officiel de l’Union européenne, 29 mai 2025. Conseil de l’Union européenne, Règlement 2025/1106 établissant le programme SAFE, Journal officiel de l’Union européenne, 27 mai 2025. Gouvernement du Canada, « Security and Defence Partnership between Canada and the European Union », Affaires mondiales Canada, 23 juin 2025. Commission européenne, « White Paper for European Defence readiness 2030 », 20 mars 2025.

Sources secondaires

Euractiv, « Canada to pay €10 million for preferential access to EU-funded defence deals », 3 décembre 2025. Reuters, « Canada agrees to join EU initiative to surge defense spending », 1er décembre 2025. Al Jazeera, « Canada joins key EU defence programme as PM Carney pivots away from US », 2 décembre 2025. The Globe and Mail, « Canada reaches deal to join EU military procurement fund », novembre 2025. CBC News, « Canada now in the ‘tent’ of EU’s loans-for-weapons programs », décembre 2025. Defense News, « Canada could use EU loans for next-gen warplane, submarine purchases », 3 décembre 2025. National Post, « Carney looks to Europe for defence, but at what cost? », décembre 2025. Politico, « Canada clinches deal to join Europe’s €150B defense scheme », décembre 2025. The Toronto Star, « Europe says Canada must pay 10M euros to join EU defence pact », décembre 2025.

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