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Une règle unique pour les gouverner tous

L’ordre exécutif que Trump s’apprête à signer porte un nom qui sonne comme un slogan marketing : « ONE RULE ». Une règle. Une seule. Pour tout le pays. L’idée, sur le papier, paraît séduisante. Fini le casse-tête pour les entreprises qui doivent jongler entre les législations de la Californie, du Colorado, de New York ou du Texas. Fini les coûts de conformité qui explosent. Fini les délais interminables pour obtenir des autorisations dans chaque État. Une règle nationale, claire, uniforme, qui permettrait aux États-Unis de rester compétitifs face à la Chine dans la course à l’intelligence artificielle. Voilà le discours officiel. Mais creusons un peu. Que signifie vraiment cette « règle unique » ? Trump l’a écrit noir sur blanc sur Truth Social : « Nous battons TOUS LES PAYS à ce stade de la course, mais cela ne durera pas longtemps si nous allons avoir cinquante États, dont beaucoup sont de mauvais acteurs, impliqués dans les RÈGLES et le PROCESSUS D’APPROBATION. » Cinquante États, « dont beaucoup sont de mauvais acteurs ». Traduisez : des États qui osent vouloir protéger leurs citoyens contre les dérives potentielles de l’IA. Des États comme la Californie, qui a tenté de mettre en place des réglementations sur l’utilisation de l’IA dans le recrutement, la justice pénale, ou encore la surveillance. Des États comme le Colorado, qui a voté une loi pionnière sur la responsabilité des systèmes d’IA en cas de discrimination.

Ces initiatives, Trump les voit comme des obstacles. Des freins à l’innovation. Des entraves à la compétitivité américaine. Mais sont-elles vraiment cela ? Ou sont-elles au contraire des tentatives légitimes de poser des garde-fous avant qu’il ne soit trop tard ? L’histoire de la technologie nous a appris une chose : quand on laisse les entreprises s’autoréguler, ça finit rarement bien. Les réseaux sociaux en sont l’exemple parfait. Pendant des années, Facebook, Twitter, YouTube ont fonctionné sans véritable régulation. Le résultat ? Désinformation massive, manipulation électorale, atteintes à la vie privée, harcèlement en ligne, radicalisation. Il a fallu des scandales à répétition, des témoignages devant le Congrès, des amendes colossales pour que les choses commencent à bouger. Et encore, le mal était déjà fait. Avec l’intelligence artificielle, les enjeux sont encore plus élevés. On ne parle plus seulement de posts Facebook ou de tweets. On parle de systèmes qui peuvent décider qui obtient un prêt bancaire, qui est embauché, qui est arrêté par la police, qui reçoit des soins médicaux. On parle de technologies qui peuvent créer des deepfakes indétectables, manipuler des élections à une échelle jamais vue, automatiser des cyberattaques, voire contrôler des armes autonomes. Et Trump veut que tout cela se développe sans que les États puissent intervenir.

Le vide réglementaire comme stratégie

Mais alors, quelle est l’alternative proposée par Trump ? Quelle est cette fameuse « règle unique » qui doit remplacer les législations étatiques ? C’est là que le bât blesse. Car pour l’instant, cette règle n’existe pas. Trump parle d’un « sommet sur l’IA », de discussions à venir, de consultations avec l’industrie. Mais rien de concret. Aucun projet de loi fédérale. Aucun cadre réglementaire détaillé. Juste des promesses vagues et un ordre exécutif qui interdit aux États d’agir. Le résultat ? Un vide réglementaire. Un no man’s land juridique où les entreprises peuvent faire ce qu’elles veulent, sans contraintes, sans supervision, sans responsabilité. C’est exactement ce que craignent les experts en sécurité nationale et les défenseurs des droits civiques. Elizabeth Warren, sénatrice démocrate du Massachusetts, a été l’une des premières à tirer la sonnette d’alarme. « Cela risque de turbocharger la course de la Chine vers la domination technologique et militaire et de saper la sécurité économique et nationale des États-Unis », a-t-elle déclaré dans un communiqué. Warren n’est pas seule. Chuck Schumer, le leader démocrate au Sénat, a été encore plus direct : « Donald Trump est en train de vendre l’Amérique pour son propre ego et son propre gain. »

Ces accusations sont graves. Mais sont-elles fondées ? Regardons les faits. Trump a autorisé Nvidia à vendre ses puces H200 à la Chine. Ces puces sont parmi les plus puissantes au monde pour l’entraînement de modèles d’intelligence artificielle. Elles offrent 32% de puissance de traitement en plus et 50% de bande passante mémoire supplémentaire par rapport aux meilleures puces chinoises. En d’autres termes, elles donnent à la Chine un avantage technologique considérable. Certes, Trump a négocié une part de 25% des revenus pour les États-Unis. Mais est-ce suffisant ? Est-ce que quelques milliards de dollars valent le risque de voir la Chine rattraper son retard dans la course à l’IA ? Chris McGuire, expert de la Chine au Council on Foreign Relations, ne mâche pas ses mots : « C’est une grosse blessure auto-infligée qui pourrait finalement faire perdre aux États-Unis leur leadership en IA. » McGuire a travaillé au Conseil de sécurité nationale sous Biden et au Département d’État sous Trump. Il sait de quoi il parle. Et son verdict est sans appel : cette décision est une erreur stratégique majeure. Elle donne à la Chine exactement ce dont elle a besoin pour combler son retard technologique. Et une fois que la Chine aura ces puces, elle les copiera, les reproduira en masse, et finira par éliminer Nvidia comme concurrent. C’est le playbook chinois, répété dans tous les secteurs critiques.

Je me demande parfois si Trump comprend vraiment ce qu’il fait. Ou s’il s’en fiche. L’intelligence artificielle n’est pas un jeu. Ce n’est pas un terrain où on peut improviser, négocier au coup par coup, faire des deals à la va-vite. C’est une technologie qui va redéfinir le monde dans lequel nous vivons. Et nous sommes en train de la brader pour quelques points de pourcentage et un tweet triomphaliste. Graham le voit. Warren le voit. Schumer le voit. Même des républicains commencent à le voir. Mais Trump, lui, reste sourd. Aveuglé par son besoin de victoires rapides, de deals spectaculaires, de headlines flatteuses. Et pendant ce temps, la Chine sourit. Elle reçoit les puces dont elle a besoin, elle étudie la technologie, elle prépare sa riposte. Et dans quelques années, quand elle dominera le marché de l’IA, nous nous demanderons comment nous avons pu être aussi naïfs.

Sources

Sources primaires

Raw Story, « You’ll drive everybody crazy! Trump ally undercuts him on key regulation issue », 8 décembre 2025. Politico, « Trump says AI executive order limiting state rules coming this week », 8 décembre 2025. Politico, « US to allow powerful AI chip sales to China, Trump says », 8 décembre 2025. Fox Business, « Schumer accuses Trump of ‘selling out America’ after greenlighting Nvidia AI chip exports to China », 9 décembre 2025. Wall Street Journal, entretien avec le sénateur Lindsey Graham, 8 décembre 2025. Truth Social, publications du président Donald Trump, 8 décembre 2025.

Sources secondaires

Council on Foreign Relations, analyses de Chris McGuire sur la politique technologique américaine vis-à-vis de la Chine, décembre 2025. Foundation for Defense of Democracies, analyses de Craig Singleton sur les exportations de technologies sensibles, décembre 2025. Institute for Progress, étude sur les implications de la vente des puces H200 à la Chine, décembre 2025. Senate Banking Committee, communiqués de la sénatrice Elizabeth Warren sur les exportations de puces vers la Chine, décembre 2025. House Select Committee on the Chinese Communist Party, communiqué sur la décision d’autoriser les ventes de puces H200, 9 décembre 2025. Nvidia Corporation, déclarations officielles sur les autorisations d’exportation, décembre 2025. Union européenne, AI Act (Artificial Intelligence Act), adopté en 2024. États de Californie, Colorado et New York, législations sur l’intelligence artificielle adoptées en 2025.

Ce contenu a été créé avec l'aide de l'IA.

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