28,8% d’augmentation en pleine guerre
Reprenons depuis le début, lentement, pour que personne ne puisse prétendre ne pas avoir compris. De janvier à août 2024, le Canada a importé pour 49,4 millions de dollars de produits russes. De janvier à août 2025, ce montant est passé à 63,6 millions de dollars. La différence ? 14,2 millions de dollars de plus. En pourcentage, ça donne 28,8% d’augmentation. Ces chiffres proviennent directement de Statistique Canada, l’organisme fédéral chargé de collecter et d’analyser les données économiques du pays. Ils ne sont pas contestés. Ils ne sont pas contestables. Ils sont là, froids, factuels, indiscutables. Pendant cette même période, l’Ukraine a continué de subir des bombardements quotidiens. Des villes ont été détruites. Des civils ont été tués. Des infrastructures énergétiques ont été systématiquement ciblées. La communauté internationale, dont le Canada fait partie, a multiplié les déclarations de soutien à Kiev, promis des aides militaires, financières, humanitaires. Les dirigeants occidentaux se sont succédé à la tribune de l’ONU pour dénoncer l’agression russe, réclamer justice, brandir la menace de nouvelles sanctions.
Et pendant ce temps, nos importations russes grimpaient. Pas un peu. Beaucoup. Presque 30%. Comment expliquer cette contradiction ? Comment justifier qu’au moment même où nous prétendons serrer la vis à Moscou, nous augmentons nos achats de produits russes ? La réponse officielle tient en un mot : exemptions. Le gouvernement canadien a accordé des dérogations à certaines entreprises pour leur permettre de continuer à importer des matériaux jugés essentiels à leur production. Le titanium en tête de liste. Ce métal léger et résistant est crucial pour l’industrie aéronautique, et la Russie, via son producteur VSMPO-AVISMA, en est l’un des principaux fournisseurs mondiaux. Couper l’approvisionnement en titanium russe aurait signifié des perturbations majeures pour des entreprises comme Airbus, qui assemble ses A220 à Mirabel, au Québec. Des emplois auraient été menacés. Des contrats auraient été retardés. Des clients auraient été mécontents. Alors on a trouvé une solution : sanctionner la Russie… sauf quand ça nous arrange pas. Sanctionner Poutine… sauf quand ça touche à nos intérêts. Défendre l’Ukraine… sauf quand ça coûte trop cher.
Ces 28,8% me hantent. Ils ne sont pas qu’un chiffre, ils sont le symbole de notre lâcheté collective. Chaque point de pourcentage représente un compromis, une concession, un renoncement. Et moi, je suis là, à écrire ces lignes en sachant que demain, rien ne changera. Que les importations continueront. Que les exemptions seront renouvelées. Que les discours resteront creux. Mais au moins, au moins, que ces chiffres soient connus. Que personne ne puisse dire qu’on ne savait pas. Qu’on ne puisse pas prétendre, dans dix ans, qu’on ignorait ce qui se passait vraiment.
Le secteur aéronautique explose
Si l’augmentation globale de 28,8% est déjà problématique, celle du secteur aéronautique est carrément obscène. Les importations liées à cette industrie ont littéralement doublé entre 2024 et 2025, passant de 15,4 millions à 30,9 millions de dollars. Un bond de 100%. Cent pour cent. Pendant que le reste du monde occidental prétend isoler économiquement la Russie, le Canada double ses achats de composants aéronautiques russes. L’essentiel de ces importations concerne des trains d’atterrissage et des pièces détachées, selon Affaires mondiales Canada. Mais surtout, surtout, du titanium. Ce métal qui entre dans la fabrication des structures d’avions, des moteurs, des systèmes hydrauliques. Ce métal dont la Russie contrôle une part significative de la production mondiale. Ce métal sans lequel l’industrie aéronautique occidentale se retrouverait dans une situation extrêmement délicate. Et c’est précisément là que le bât blesse : notre dépendance au titanium russe révèle une vulnérabilité stratégique majeure que personne n’a voulu voir venir.
Pendant des années, les industriels ont privilégié l’efficacité économique à court terme plutôt que la sécurité d’approvisionnement à long terme. Acheter du titanium russe était moins cher, plus simple, plus pratique. Pourquoi se compliquer la vie à diversifier les sources quand VSMPO-AVISMA offrait des prix compétitifs et une qualité reconnue ? Personne ne s’est vraiment posé la question de ce qui se passerait si les relations avec la Russie se détérioraient. Ou plutôt, certains se la sont posée, mais leurs avertissements ont été ignorés. Trop alarmistes. Trop pessimistes. Trop coûteux à prendre en compte. Et maintenant, nous voilà coincés. Coincés entre nos principes affichés et nos besoins industriels. Coincés entre notre soutien à l’Ukraine et notre dépendance à la Russie. Coincés dans une contradiction que nous avons nous-mêmes créée par notre myopie stratégique. Le doublement des importations aéronautiques n’est pas un accident, c’est le symptôme d’un système qui a choisi la facilité plutôt que la prévoyance, le profit immédiat plutôt que la résilience à long terme.
Cent pour cent d’augmentation. Je relis ce chiffre et je ne peux m’empêcher de penser à tous ces discours sur la souveraineté, l’indépendance stratégique, la nécessité de ne pas dépendre de régimes autoritaires. Tout ça pour ça. Pour doubler nos achats au moment même où nous devrions les réduire à zéro. Il y a quelque chose de pathétique dans cette incapacité à aligner nos actes sur nos paroles. Quelque chose qui dépasse la simple hypocrisie politique pour toucher à une forme de faillite morale collective.
Le titanium, ce métal qui vaut plus que les principes
Airbus et la dépendance russe
Au cœur de cette affaire se trouve Airbus, le géant européen de l’aéronautique qui assemble ses A220 à Mirabel, au Québec. Cet avion monocouloir, anciennement connu sous le nom de Bombardier CSeries, est devenu un pilier de l’industrie aéronautique québécoise. Des centaines d’emplois directs et indirects en dépendent. Des milliards de dollars d’investissements sont en jeu. Et tout ça repose, en partie, sur du titanium russe. Pas entièrement, bien sûr. Airbus a commencé à diversifier ses sources d’approvisionnement, notamment en signant un accord avec le norvégien Norsk Titanium pour développer des pièces fabriquées par impression 3D. Mais cette transition prend du temps. Des années. Pendant ce temps, la production continue, et elle continue avec du titanium qui vient, au moins en partie, de Russie. Plus précisément de VSMPO-AVISMA, le producteur russe qui domine le marché mondial du titanium aéronautique.
En avril 2024, le Canada est devenu le premier pays occidental à inclure formellement VSMPO-AVISMA dans sa liste de sanctions. Une décision courageuse en apparence. Sauf qu’au même moment, Ottawa a discrètement accordé à Airbus une exemption pour lui permettre de continuer à importer du titanium de cette même entreprise sanctionnée. L’exemption était présentée comme temporaire, le temps pour Airbus de trouver des alternatives. Mais en novembre 2025, le gouvernement canadien a renouvelé cette exemption, confirmant que la dépendance au titanium russe n’était pas près de disparaître. Airbus a justifié cette situation en expliquant qu’elle avait « obtenu les autorisations nécessaires pour sécuriser ses opérations en conformité avec les sanctions applicables ». Une formule bureaucratique qui masque mal la réalité : les sanctions ne s’appliquent pas vraiment quand elles gênent les intérêts économiques majeurs. Le titanium russe continue de couler vers les usines québécoises, et personne ne semble vraiment s’en offusquer à Ottawa.
Il y a quelque chose de profondément cynique dans cette façon de sanctionner une entreprise d’un côté tout en lui accordant une exemption de l’autre. C’est comme dire à quelqu’un : « Tu es interdit de territoire, mais entre quand même par la porte de derrière. » Ça permet de sauver les apparences, de prétendre qu’on agit, tout en s’assurant que rien ne change vraiment. Et le pire, c’est que tout le monde joue le jeu. Airbus obtient son exemption. Le gouvernement sauve ses emplois. Les médias rapportent l’information sans trop insister. Et la machine continue de tourner, alimentée par du métal russe et de l’hypocrisie occidentale.
Les exemptions qui arrangent tout le monde
L’exemption accordée à Airbus n’est pas un cas isolé. Bombardier, le fleuron québécois de l’aviation d’affaires, a également obtenu une dérogation similaire pour ses jets Global 7500. Ces appareils haut de gamme, qui se vendent plusieurs dizaines de millions de dollars pièce, utilisent eux aussi du titanium dans leur structure. Couper l’approvisionnement russe aurait signifié des retards de production, des pénalités contractuelles, des clients mécontents. Alors Bombardier a demandé une exemption. Et elle l’a obtenue. Même chose pour Safran, le motoriste français qui a des installations au Canada. Même chose pour RTX (anciennement Raytheon Technologies), qui possède Pratt & Whitney et Collins Aerospace. Cette dernière a d’ailleurs dû passer une charge de 175 millions de dollars américains au premier trimestre 2024 pour se désengager de contrats d’approvisionnement en titanium avec des entités russes sanctionnées. Une somme colossale qui montre à quel point la dépendance était profonde.
Ces exemptions ont été accordées au cas par cas, dans une opacité relative. Le gouvernement canadien n’a pas publié de liste exhaustive des entreprises bénéficiaires, ni des montants concernés, ni des durées précises des dérogations. On sait juste qu’elles existent, qu’elles sont « temporaires » et « limitées », selon la terminologie officielle. Mais temporaire, ça veut dire quoi exactement ? Six mois ? Un an ? Cinq ans ? Et limité, ça couvre quoi ? Uniquement le titanium ? Ou aussi d’autres matériaux stratégiques ? Ces questions sont restées sans réponse claire. Ce qui est certain, c’est que ces exemptions ont permis aux importations russes de continuer à croître malgré les sanctions. Elles ont créé une situation absurde où le Canada sanctionne officiellement la Russie tout en autorisant ses plus grandes entreprises à commercer avec elle. Une schizophrénie politique qui arrange tout le monde : le gouvernement peut prétendre être ferme, les entreprises peuvent continuer leurs affaires, et seule l’Ukraine paie le prix de cette hypocrisie.
Je pense aux Ukrainiens qui se battent chaque jour pour leur survie, qui voient leurs maisons détruites, leurs proches tués, leur pays dévasté. Et je pense à nos dirigeants qui signent des exemptions pour que nos entreprises puissent continuer à acheter du métal russe. Comment peut-on regarder un Ukrainien dans les yeux et lui dire qu’on le soutient, qu’on est avec lui, qu’on fait tout ce qu’on peut… tout en sachant qu’on finance indirectement son agresseur ? Comment peut-on vivre avec cette contradiction ? Apparemment, assez facilement. Il suffit de ne pas trop y penser, de se concentrer sur les emplois, sur l’économie, sur les intérêts nationaux. Et de laisser la morale de côté.
Quand Ottawa joue sur les mots
4000 sanctions… et des exceptions
Le gouvernement canadien aime rappeler qu’il a imposé des sanctions à près de 4000 individus, entités et navires russes depuis le début de l’invasion de l’Ukraine. C’est un chiffre impressionnant, qui place le Canada parmi les pays les plus actifs dans la réponse occidentale à l’agression russe. Ces sanctions couvrent un large éventail de mesures : gel des avoirs, interdictions de voyage, restrictions commerciales, embargos sur certains produits, interdictions de fournir des services financiers ou techniques. Sur le papier, c’est un arsenal redoutable. Dans la pratique, c’est beaucoup plus nuancé. Parce que chaque sanction vient avec ses exceptions, ses dérogations, ses clauses d’exemption. Et ces exceptions finissent par créer des trous béants dans le filet censé étrangler l’économie russe. Le titanium en est l’exemple le plus flagrant, mais ce n’est pas le seul. Les engrais russes, par exemple, continuent d’être importés au Canada malgré les sanctions, parce qu’ils sont jugés essentiels pour l’agriculture canadienne.
Le gouvernement justifie ces exemptions en invoquant l’intérêt national, la protection des emplois, la nécessité de ne pas se tirer une balle dans le pied. Des arguments qui ne sont pas dénués de logique, certes. Mais qui posent une question fondamentale : à quoi servent des sanctions si elles sont systématiquement contournées dès qu’elles deviennent contraignantes ? À quoi bon sanctionner VSMPO-AVISMA si on autorise ensuite Airbus à continuer à acheter son titanium ? À quoi bon geler les avoirs de milliers de Russes si on laisse les flux commerciaux se poursuivre dans les secteurs qui comptent vraiment ? La réponse est simple : ça sert à faire de la communication politique. Ça permet de montrer qu’on agit, qu’on est du bon côté de l’histoire, qu’on soutient l’Ukraine. Mais dans les faits, l’impact économique réel de ces sanctions est largement dilué par les exceptions qu’on y a greffées. Ottawa joue sur les mots, jongle avec les chiffres, multiplie les annonces… tout en s’assurant que les intérêts économiques canadiens ne soient jamais vraiment menacés.
Quatre mille sanctions. Le chiffre sonne bien, il impressionne, il rassure. Mais quand on gratte un peu, quand on regarde ce qui se cache derrière, on découvre un système de passe-droits, d’arrangements, de compromis qui vident ces sanctions de leur substance. Et moi, je me demande : qui trompe-t-on vraiment ? Les Russes ? Ou nous-mêmes ? Parce que si on croit sincèrement qu’on peut sanctionner un pays tout en continuant à commercer avec lui, on se ment. Et ce mensonge, il a un coût. Un coût moral, un coût politique, un coût en termes de crédibilité internationale.
La rhétorique du soutien à l’Ukraine
Depuis février 2022, le Canada n’a cessé de réaffirmer son soutien indéfectible à l’Ukraine. Les déclarations se sont multipliées, du Premier ministre aux ministres en passant par les députés de tous les partis. Le Canada a fourni une aide militaire substantielle : des armes, des munitions, des véhicules blindés, des systèmes de défense aérienne. Il a accueilli des dizaines de milliers de réfugiés ukrainiens. Il a imposé des sanctions massives contre la Russie. Il a gelé des milliards de dollars d’avoirs russes. Sur le plan rhétorique, le soutien canadien à l’Ukraine est total, inconditionnel, sans faille. Mais voilà : la rhétorique ne nourrit pas les soldats, ne reconstruit pas les villes, ne stoppe pas les missiles. Ce qui compte, au final, c’est la cohérence entre les paroles et les actes. Et sur ce plan, le Canada montre des failles béantes. Comment peut-on prétendre soutenir l’Ukraine tout en augmentant ses importations russes de près de 30% ? Comment peut-on affirmer vouloir isoler économiquement la Russie tout en accordant des exemptions à nos plus grandes entreprises pour qu’elles continuent à commercer avec Moscou ?
Cette contradiction n’échappe pas à la diaspora ukrainienne au Canada, qui compte près de 1,4 million de personnes. Le Congrès des Ukrainiens-Canadiens, qui représente cette communauté, a exprimé sa « profonde déception » face aux chiffres révélés par Statistique Canada. Dans une lettre adressée au comité parlementaire chargé des affaires étrangères en novembre 2024, l’organisme a qualifié la politique de sanctions canadienne d' »échec ». Un mot fort, qui tranche avec la langue de bois habituelle. La présidente du Congrès, Alexandra Chyczij, a été encore plus directe : « L’augmentation des importations russes au Canada signifie que les entreprises canadiennes contribuent de plus en plus à l’effort de guerre de la Russie. » Une accusation grave, mais difficile à réfuter. Parce que c’est exactement ce qui se passe : chaque dollar dépensé en produits russes finit, d’une manière ou d’une autre, par alimenter la machine de guerre du Kremlin. Que ce soit directement, via les taxes et les revenus d’exportation, ou indirectement, en maintenant l’économie russe à flot malgré les sanctions.
Il y a quelque chose de profondément blessant dans ce décalage entre les mots et les actes. Parce que les mots, eux, sont beaux. Ils parlent de solidarité, de justice, de défense des valeurs démocratiques. Ils nous font nous sentir bien, nous donnent l’impression d’être du bon côté. Mais les actes, eux, racontent une autre histoire. Une histoire de compromis, de calculs économiques, d’intérêts qui priment sur les principes. Et cette histoire-là, elle est beaucoup moins glorieuse. Elle est même franchement honteuse.
La colère de la diaspora ukrainienne
Le Congrès des Ukrainiens-Canadiens dénonce
Le Congrès des Ukrainiens-Canadiens ne mâche pas ses mots. Dans sa lettre au comité parlementaire, l’organisme affirme sans détour que « la politique de sanctions du Canada à l’égard de la Russie est un échec ». Un constat brutal qui contraste avec les auto-congratulations habituelles du gouvernement. Le PDG du Congrès, Ihor Michalchyshyn, a enfoncé le clou lors d’une entrevue avec Radio-Canada : « À un moment où nous sommes censés réduire nos échanges avec la Russie, voir le commerce augmenter de 30% est assez alarmant. » Alarmant, oui. Mais aussi révélateur. Révélateur d’une politique qui privilégie systématiquement les intérêts économiques à court terme sur la cohérence stratégique à long terme. Le Congrès réclame l’imposition d’un embargo commercial total contre la Russie, sans exceptions, sans dérogations, sans arrangements. Une position radicale, peut-être, mais au moins cohérente avec l’objectif affiché d’isoler économiquement le régime de Poutine.
Cette demande d’embargo total met le gouvernement canadien dans une position inconfortable. Parce qu’un tel embargo signifierait la fin des exemptions pour Airbus, Bombardier et les autres. Il signifierait des perturbations majeures dans les chaînes d’approvisionnement, des retards de production, potentiellement des pertes d’emplois. Il signifierait, en somme, que le Canada devrait payer un prix économique réel pour ses principes. Et c’est précisément là que le bât blesse : sommes-nous prêts à payer ce prix ? Sommes-nous prêts à sacrifier des emplois québécois pour la cohérence de notre politique étrangère ? Sommes-nous prêts à accepter des coûts économiques immédiats pour défendre des valeurs que nous prétendons chérir ? Les chiffres de Statistique Canada suggèrent que non. Que face au choix entre principes et profits, entre morale et économie, entre Ukraine et titanium, nous avons choisi le titanium. Et la diaspora ukrainienne le voit, le comprend, et le dénonce avec une colère légitime.
Je pense à ces Ukrainiens-Canadiens qui ont de la famille là-bas, qui reçoivent des nouvelles de bombardements, de morts, de destructions. Et qui découvrent que leur pays d’adoption, ce Canada qu’ils ont choisi, continue à commercer avec l’agresseur. Comment ne pas ressentir une forme de trahison ? Comment ne pas se sentir abandonné par un système qui prétend vous soutenir tout en finançant votre ennemi ? Leur colère n’est pas seulement légitime, elle est nécessaire. Parce que sans elle, sans cette voix qui refuse le compromis, nous glisserions encore plus facilement dans l’acceptation de l’inacceptable.
« Un échec » selon Alexandra Chyczij
Alexandra Chyczij, présidente du Congrès des Ukrainiens-Canadiens, n’a pas utilisé de formules diplomatiques. Elle a parlé d’échec. Un échec de la politique de sanctions canadienne. Un échec qui se mesure en millions de dollars d’importations russes en hausse. Un échec qui se traduit par une contribution croissante des entreprises canadiennes à l’effort de guerre russe. Ses mots résonnent comme une accusation, et ils le sont. Une accusation contre un gouvernement qui prétend défendre l’Ukraine tout en permettant à ses entreprises de commercer avec la Russie. Une accusation contre un système qui place les intérêts économiques au-dessus des principes moraux. Une accusation contre nous tous, citoyens canadiens, qui laissons faire sans trop protester. Parce que oui, ces exemptions, ces dérogations, ces arrangements se font en notre nom. C’est notre gouvernement qui les accorde. Ce sont nos entreprises qui en profitent. C’est notre économie qui en bénéficie. Et c’est notre crédibilité internationale qui en pâtit.
Le Congrès des Ukrainiens-Canadiens ne se contente pas de dénoncer, il propose aussi des solutions. L’organisme réclame un embargo commercial total, mais aussi une meilleure application des sanctions existantes, une transparence accrue sur les exemptions accordées, et un mécanisme de surveillance indépendant pour s’assurer que les entreprises canadiennes ne contournent pas les restrictions. Des demandes raisonnables, qui devraient faire consensus. Mais qui se heurtent à la résistance des lobbies industriels, à l’inertie bureaucratique, et à la réticence politique à prendre des mesures qui pourraient avoir un coût économique visible. Parce que voilà le problème : les bénéfices de l’hypocrisie sont immédiats et tangibles (des emplois préservés, des profits maintenus), tandis que les coûts sont diffus et lointains (une crédibilité érodée, une cohérence perdue). Dans ce calcul politique, l’hypocrisie l’emporte presque toujours. Et Alexandra Chyczij le sait. Mais elle continue de se battre, parce que l’alternative—accepter, se taire, laisser faire—serait pire encore.
Il faut un courage particulier pour appeler un échec un échec. Pour refuser les euphémismes, les nuances, les contextualisations qui finissent par noyer la vérité. Alexandra Chyczij a ce courage. Et sa voix, même si elle reste minoritaire, même si elle dérange, est essentielle. Parce qu’elle nous rappelle ce que nous avons perdu en chemin : la capacité à dire non, à refuser le compromis quand il devient compromission, à défendre nos valeurs même quand ça coûte cher. Sans cette voix, nous serions déjà complètement perdus.
L'industrie aéronautique québécoise en otage
Mirabel et la production de l’A220
L’usine Airbus de Mirabel, au nord de Montréal, est un symbole de la réussite industrielle québécoise. C’est là que sont assemblés les A220, ces avions monocouloirs qui ont sauvé le programme CSeries de Bombardier après son rachat par Airbus en 2018. L’usine emploie des centaines de personnes directement, et des milliers indirectement via les sous-traitants et fournisseurs. Elle représente des milliards de dollars d’investissements, des décennies de savoir-faire, une fierté nationale. Et elle dépend, en partie, de titanium russe. Pas entièrement, certes. Airbus a commencé à diversifier ses sources, notamment avec Norsk Titanium en Norvège. Mais cette transition prend du temps, et en attendant, la production continue avec du métal qui vient de Russie. Cette dépendance place le gouvernement canadien dans une position délicate : comment sanctionner la Russie sans mettre en péril un fleuron industriel québécois ? Comment défendre l’Ukraine sans sacrifier des emplois à Mirabel ?
La réponse d’Ottawa a été de choisir les emplois. De privilégier l’économie sur la cohérence. D’accorder des exemptions à Airbus pour que la production puisse continuer sans interruption. Une décision compréhensible d’un point de vue économique, mais désastreuse d’un point de vue moral et stratégique. Parce qu’elle envoie un message clair : nos principes sont négociables. Nos sanctions ont des limites. Notre soutien à l’Ukraine s’arrête là où commencent nos intérêts économiques. Et ce message, il est entendu. Par la Russie, qui voit que l’Occident n’est pas prêt à payer le prix de ses convictions. Par l’Ukraine, qui constate que le soutien occidental a des clauses en petits caractères. Par nos alliés, qui se demandent si on peut vraiment compter sur le Canada quand les choses deviennent difficiles. L’usine de Mirabel n’est pas responsable de cette situation. Ses employés non plus. Ils font leur travail, produisent des avions, contribuent à l’économie. Mais ils sont devenus, malgré eux, les otages d’une dépendance stratégique que personne n’a voulu anticiper.
Je pense à ces travailleurs de Mirabel qui se lèvent chaque matin, qui font leur boulot, qui sont fiers de ce qu’ils produisent. Et je me demande s’ils savent. S’ils savent que le métal qu’ils manipulent vient de Russie. S’ils savent que leur travail, aussi légitime soit-il, contribue indirectement à maintenir l’économie russe à flot. S’ils savent qu’ils sont devenus, sans l’avoir choisi, des pions dans un jeu géopolitique qui les dépasse. Probablement pas. Probablement qu’ils ne veulent pas savoir. Et je les comprends. Parce que savoir, c’est porter un poids. Le poids de la contradiction, de la complicité involontaire, de l’impossibilité de faire autrement.
Les emplois contre les principes
Le dilemme est réel, et il serait malhonnête de le nier. D’un côté, il y a des emplois. Des vrais emplois, occupés par de vraies personnes, qui ont des familles à nourrir, des hypothèques à payer, des vies à mener. Ces emplois dépendent de la continuité de la production à Mirabel, et cette production dépend, au moins partiellement, de titanium russe. Couper l’approvisionnement du jour au lendemain aurait des conséquences immédiates et douloureuses. Des retards de livraison. Des pénalités contractuelles. Potentiellement des licenciements. De l’autre côté, il y a des principes. Le principe de ne pas financer un régime qui mène une guerre d’agression. Le principe de cohérence entre nos paroles et nos actes. Le principe de solidarité avec l’Ukraine. Ces principes sont abstraits, certes. Ils ne se mangent pas, ne paient pas les factures. Mais ils définissent qui nous sommes en tant que société, en tant que nation. Ils tracent la ligne entre ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas.
Le gouvernement canadien a choisi les emplois. Et on peut le comprendre. Aucun politicien ne veut être celui qui a causé des licenciements massifs dans une région déjà économiquement fragile. Aucun gouvernement ne veut porter la responsabilité d’avoir tué un fleuron industriel national. Mais ce choix a un coût. Un coût en termes de crédibilité. Un coût en termes de cohérence. Un coût en termes de message envoyé au reste du monde. Parce que si le Canada n’est pas prêt à payer le prix de ses sanctions, pourquoi d’autres pays le feraient-ils ? Si nous accordons des exemptions dès que ça devient inconfortable, pourquoi la Russie prendrait-elle nos menaces au sérieux ? La vraie question n’est pas de savoir si nous devons choisir entre emplois et principes. La vraie question est de savoir comment nous en sommes arrivés à devoir faire ce choix. Comment nous avons laissé notre industrie devenir si dépendante d’un régime autoritaire que nous savions instable et imprévisible. Et comment nous pouvons éviter de reproduire cette erreur à l’avenir.
Ce dilemme me déchire. Parce que je comprends les deux côtés. Je comprends les travailleurs qui veulent garder leur emploi. Je comprends le gouvernement qui ne veut pas être responsable d’une catastrophe économique. Mais je comprends aussi les Ukrainiens qui meurent pendant que nous débattons de nos intérêts économiques. Et au fond, je sais que ce dilemme est faux. Qu’il a été créé par notre propre négligence, notre propre myopie. Qu’on aurait pu l’éviter si on avait eu le courage de diversifier nos approvisionnements il y a dix ans, vingt ans. Mais on ne l’a pas fait. Et maintenant, on paie le prix. Ou plutôt, l’Ukraine paie le prix.
Bombardier, Safran et les autres complices silencieux
Les géants qui profitent des exemptions
Airbus n’est pas seul dans cette affaire. Bombardier, le fleuron québécois de l’aviation d’affaires, a également obtenu des exemptions pour continuer à importer du titanium russe. Ses jets Global 7500, qui se vendent à plus de 70 millions de dollars pièce, utilisent ce métal dans leur structure. Couper l’approvisionnement aurait signifié des retards de livraison, des clients mécontents, des pertes financières. Alors Bombardier a demandé une dérogation. Et elle l’a obtenue. Même chose pour Safran, le motoriste français qui a des installations au Canada et qui fournit des moteurs pour de nombreux programmes aéronautiques. Même chose pour RTX, le conglomérat américain qui possède Pratt & Whitney et Collins Aerospace. Tous ces géants industriels ont bénéficié de passes-droits qui leur ont permis de continuer leurs affaires comme si de rien n’était. Comme si la guerre en Ukraine n’existait pas. Comme si les sanctions ne les concernaient pas.
Ces entreprises ne sont pas des victimes innocentes. Elles ont fait des choix. Des choix de s’approvisionner en Russie parce que c’était moins cher, plus pratique. Des choix de ne pas diversifier leurs sources parce que ça coûtait trop cher, prenait trop de temps. Des choix de privilégier le profit à court terme sur la résilience à long terme. Et maintenant que ces choix se retournent contre elles, maintenant qu’elles se retrouvent coincées entre leurs engagements contractuels et les sanctions occidentales, elles demandent à l’État de les sauver. Et l’État s’exécute. Parce que ces entreprises sont « trop importantes pour faire faillite », parce qu’elles emploient trop de monde, parce qu’elles représentent trop d’investissements. Alors on leur accorde des exemptions. On leur permet de continuer à commercer avec la Russie. On ferme les yeux sur la contradiction flagrante entre nos déclarations et leurs pratiques. Et elles, elles continuent. En silence. Sans faire de vagues. Sans reconnaître publiquement leur dépendance au titanium russe. Sans s’excuser auprès de l’Ukraine.
Il y a quelque chose de profondément choquant dans ce silence. Ces entreprises profitent des exemptions, continuent leurs affaires, empochent leurs profits… et ne disent rien. Pas un mot d’excuse. Pas une reconnaissance de la situation inconfortable dans laquelle elles se trouvent. Pas un engagement clair à se désengager rapidement du titanium russe. Juste un silence complice, qui en dit long sur leurs priorités. Le profit d’abord. Toujours. Quoi qu’il en coûte. Même si ça signifie financer indirectement une guerre d’agression.
Le Global 7500 et le titanium russe
Le Global 7500 de Bombardier est un bijou technologique. Un jet d’affaires ultra-long-courrier capable de relier New York à Hong Kong sans escale. Un appareil qui incarne le savoir-faire québécois en matière d’aéronautique. Un produit qui se vend à prix d’or auprès d’une clientèle fortunée. Et un avion qui contient du titanium russe. Pas beaucoup, peut-être. Mais assez pour que Bombardier ait jugé nécessaire de demander une exemption aux sanctions canadiennes. Cette exemption lui a été accordée, permettant à l’entreprise de continuer sa production sans interruption. Les clients du Global 7500 ne savent probablement pas que leur jet contient du métal russe. Ils ne se posent probablement pas la question. Pour eux, c’est juste un avion. Un très bel avion, très cher, très performant. Mais pour nous, pour ceux qui regardent au-delà de la surface brillante, c’est un symbole. Un symbole de notre incapacité à aligner nos actes sur nos paroles. Un symbole de notre dépendance à des régimes que nous prétendons combattre.
Bombardier n’est pas une entreprise russe. C’est une entreprise québécoise, canadienne, qui emploie des milliers de personnes et contribue significativement à l’économie nationale. Mais elle est devenue, malgré elle ou par ses propres choix, dépendante d’un approvisionnement russe. Et cette dépendance la place dans une position moralement intenable. Parce que chaque Global 7500 produit avec du titanium russe contribue, même marginalement, à maintenir l’économie russe à flot. Chaque dollar dépensé en titanium russe finit, d’une manière ou d’une autre, par alimenter les caisses du Kremlin. Et ces caisses servent à financer la guerre en Ukraine. C’est une chaîne de causalité indirecte, certes. Mais elle existe. Et elle devrait nous déranger. Elle devrait nous pousser à exiger de Bombardier, et de toutes les autres entreprises dans la même situation, un plan clair et rapide pour se désengager du titanium russe. Pas dans dix ans. Pas quand ce sera pratique. Maintenant.
Je regarde ces jets luxueux, ces Global 7500 qui sillonnent le ciel, et je ne peux m’empêcher de penser à l’ironie de la situation. Ces avions transportent les plus riches, les plus puissants, ceux qui ont les moyens de s’offrir le meilleur. Et ils sont fabriqués, en partie, avec du métal qui vient d’un pays en guerre, d’un régime autoritaire, d’une économie que nous prétendons sanctionner. Il y a quelque chose de profondément pervers dans cette image. Quelque chose qui résume parfaitement notre époque : le luxe construit sur la compromission, le confort acheté au prix de la cohérence.
Le NPD et l'opposition impuissante
Alexandre Boulerice dénonce
Le député néo-démocrate Alexandre Boulerice n’a pas mâché ses mots. Pour lui, l’augmentation des importations russes au Canada est « une autre preuve que la politique de sanctions du Canada envers le régime de Vladimir Poutine n’est pas sérieuse ». Une déclaration cinglante qui résume bien le sentiment d’une partie de l’opposition. Le NPD, traditionnellement plus à gauche sur l’échiquier politique canadien, a souvent critiqué le gouvernement libéral pour son manque de fermeté face aux régimes autoritaires. Dans le cas de la Russie, cette critique trouve un écho particulier. Parce que les chiffres sont là, indiscutables, et ils contredisent frontalement la rhétorique gouvernementale. Comment peut-on prétendre avoir une politique de sanctions sérieuse quand les importations augmentent de près de 30% ? Comment peut-on affirmer isoler économiquement la Russie quand on accorde des exemptions à tour de bras ? Boulerice pose les bonnes questions. Mais il n’a pas les moyens d’imposer ses réponses.
Parce que voilà le problème de l’opposition au Canada : elle peut dénoncer, critiquer, pointer du doigt les contradictions. Mais elle ne peut pas changer la politique. Pas tant qu’elle n’est pas au pouvoir. Et le NPD, malgré son influence croissante, reste un parti minoritaire. Ses dénonciations font les manchettes pendant quelques jours, puis disparaissent, noyées dans le flot continu de l’actualité. Le gouvernement libéral continue sa route, accorde ses exemptions, maintient ses arrangements avec l’industrie. Et les importations russes continuent d’augmenter. Alexandre Boulerice le sait. Il sait que ses mots, aussi justes soient-ils, ne changeront probablement rien. Mais il continue de les prononcer. Parce que le silence serait pire. Parce que quelqu’un doit dire la vérité, même si personne ne veut l’entendre. Parce que l’opposition, même impuissante, a un rôle à jouer : celui de gardien de la cohérence, de défenseur des principes, de voix qui refuse le compromis quand il devient compromission.
Il y a quelque chose de tragique dans cette impuissance de l’opposition. Boulerice a raison. Tout le monde le sait. Même ceux qui défendent la politique gouvernementale savent, au fond, qu’il a raison. Mais ça ne change rien. Parce que le système est ainsi fait : ceux qui ont le pouvoir de changer les choses n’ont pas intérêt à le faire, et ceux qui ont intérêt à le faire n’ont pas le pouvoir. Et nous, citoyens, nous assistons à ce spectacle, impuissants nous aussi, en nous demandant si notre démocratie fonctionne vraiment comme elle le devrait.
Une politique « pas sérieuse »
L’expression utilisée par Alexandre Boulerice— »pas sérieuse »—est particulièrement bien choisie. Elle ne dit pas que la politique de sanctions canadienne est mauvaise, ou inefficace, ou mal conçue. Elle dit qu’elle n’est pas sérieuse. C’est-à-dire qu’elle n’est pas prise au sérieux par ceux-là mêmes qui l’ont mise en place. Qu’elle est un exercice de communication plus qu’une véritable stratégie économique. Qu’elle vise à donner l’impression d’agir plutôt qu’à obtenir des résultats concrets. Et les chiffres lui donnent raison. Une politique de sanctions sérieuse devrait conduire à une diminution des échanges commerciaux avec le pays sanctionné. Pas à une augmentation de 28,8%. Une politique de sanctions sérieuse ne devrait pas être truffée d’exemptions qui en annulent l’effet. Une politique de sanctions sérieuse devrait être cohérente, prévisible, appliquée uniformément. Ce n’est manifestement pas le cas de la politique canadienne envers la Russie.
Cette absence de sérieux a des conséquences. Elle envoie un message de faiblesse à Moscou. Elle mine la crédibilité du Canada sur la scène internationale. Elle démoralise ceux qui, comme la diaspora ukrainienne, comptaient sur le soutien canadien. Elle crée un précédent dangereux : si les sanctions peuvent être contournées dès qu’elles deviennent gênantes, pourquoi d’autres pays les respecteraient-ils ? Pourquoi la Chine, par exemple, prendrait-elle au sérieux nos menaces de sanctions si elle voit que nous ne sommes pas capables d’appliquer celles que nous avons déjà imposées à la Russie ? Le manque de sérieux dans l’application des sanctions n’est pas qu’un problème technique ou administratif. C’est un problème stratégique majeur qui affaiblit notre position dans un monde de plus en plus conflictuel. Et Boulerice a raison de le souligner, même si sa voix reste minoritaire, même si elle est ignorée par ceux qui ont le pouvoir de changer les choses.
Pas sérieuse. Ces deux mots résonnent en moi comme une condamnation. Parce qu’ils disent tout. Ils disent que nous jouons, que nous faisons semblant, que nous ne sommes pas vraiment engagés. Et dans un monde où les enjeux sont aussi graves—une guerre, des morts, un ordre international menacé—ne pas être sérieux, c’est être complice. Complice par négligence, par lâcheté, par calcul. Mais complice quand même.
L'Europe et son propre mensonge énergétique
Le gaz russe coule encore
Si le Canada a ses contradictions avec le titanium, l’Europe a les siennes avec le gaz naturel. Malgré trois ans de guerre en Ukraine, malgré des déclarations répétées sur la nécessité de se sevrer de l’énergie russe, le gaz russe continue de couler vers l’Europe. Pas autant qu’avant, certes. Les importations par gazoduc ont chuté drastiquement après la destruction des pipelines Nord Stream et les décisions politiques de réduire la dépendance. Mais le gaz naturel liquéfié (GNL) russe a pris le relais. En 2024, la Russie a fourni environ 18 à 19% du gaz importé par l’Union européenne, selon certaines estimations. Des pays comme l’Espagne, la Belgique et la France figurent parmi les principaux acheteurs de GNL russe. Ces importations génèrent des milliards d’euros de revenus pour Moscou, des revenus qui financent directement ou indirectement la machine de guerre russe. Et pourtant, l’Europe continue d’acheter. Parce qu’elle n’a pas le choix, dit-elle. Parce que les alternatives ne sont pas encore en place. Parce que couper le gaz russe du jour au lendemain provoquerait une crise énergétique majeure.
L’Union européenne a bien tenté de réagir. En juin 2024, elle a interdit la réexportation de GNL russe via les ports européens, une mesure visant à empêcher que l’Europe serve de plaque tournante pour le gaz russe destiné à d’autres marchés. Puis, en octobre 2025, les négociateurs européens ont avancé des plans pour interdire toutes les importations de GNL russe d’ici janvier 2027. Un calendrier qui reconnaît implicitement que l’Europe a besoin de temps pour se désengager, pour trouver des fournisseurs alternatifs, pour construire les infrastructures nécessaires. Mais d’ici là, le gaz russe continuera de couler. Les euros continueront de remplir les caisses du Kremlin. Et l’hypocrisie occidentale continuera d’être flagrante. Parce que comment peut-on prétendre soutenir l’Ukraine tout en finançant son agresseur ? Comment peut-on dénoncer la guerre tout en payant pour qu’elle continue ? L’Europe se trouve dans la même contradiction que le Canada avec son titanium : coincée entre ses principes et ses besoins, entre sa rhétorique et sa réalité.
Ce gaz qui coule, ces milliards qui transitent, cette dépendance qui persiste… tout ça me donne la nausée. Parce que c’est exactement la même logique qu’avec le titanium canadien. On sait que c’est mal. On sait que ça finance la guerre. On sait que ça contredit tout ce qu’on prétend défendre. Mais on continue. Parce que c’est pratique. Parce que c’est moins cher. Parce que changer prendrait du temps et de l’argent. Et pendant ce temps, des Ukrainiens meurent. Avec du gaz européen dans les réservoirs des tanks russes.
L’Allemagne et sa dépendance fatale
L’Allemagne mérite une mention spéciale dans cette histoire de dépendance énergétique. Avant la guerre en Ukraine, la Russie fournissait environ 55% du gaz importé par l’Allemagne. Une dépendance massive, construite sur des décennies de relations commerciales privilégiées avec Moscou. Cette dépendance était déjà problématique en temps de paix. Elle est devenue catastrophique en temps de guerre. Lorsque les flux de gaz russe ont chuté brutalement en 2022, l’Allemagne s’est retrouvée dans une situation de crise énergétique. Les prix de l’électricité ont explosé. Les industries énergivores ont souffert. Le gouvernement a dû dépenser des dizaines de milliards d’euros pour sécuriser des approvisionnements alternatifs, construire des terminaux de GNL en urgence, et subventionner les consommateurs pour éviter une catastrophe sociale. Tout ça parce que l’Allemagne avait choisi, pendant des années, de privilégier le gaz russe bon marché plutôt que la diversification de ses sources d’énergie.
Mais ce n’est pas tout. En avril 2023, en pleine crise énergétique, l’Allemagne a pris une décision qui restera dans les annales comme l’une des plus incompréhensibles de l’histoire énergétique moderne : elle a fermé ses trois dernières centrales nucléaires. Isar 2, Emsland et Neckarwestheim 2 ont été définitivement arrêtées, mettant fin à six décennies de production nucléaire en Allemagne. Cette décision, prise bien avant la guerre mais maintenue malgré le contexte, a privé le pays d’une source d’électricité bas-carbone, fiable et indépendante de la Russie. Elle a augmenté la dépendance allemande au gaz, y compris au gaz russe qui continuait d’arriver via des routes détournées. Elle a forcé l’Allemagne à rallumer des centrales au charbon pour compenser. Et elle a coûté des dizaines de milliards d’euros en mesures d’urgence. Tout ça au nom d’une politique anti-nucléaire décidée après Fukushima en 2011, mais appliquée au pire moment possible. L’ironie est cruelle : en voulant se débarrasser du nucléaire, l’Allemagne s’est rendue encore plus dépendante du gaz russe.
Cette décision de fermer les centrales nucléaires en pleine crise énergétique me laisse sans voix. C’est d’une telle absurdité, d’une telle inconséquence, que j’ai du mal à croire que ça s’est vraiment passé. Mais ça s’est passé. Et maintenant, l’Allemagne paie le prix. Un prix économique, un prix politique, un prix en termes de crédibilité. Et pendant ce temps, la Russie rigole. Parce qu’elle voit que l’Occident est capable de se tirer une balle dans le pied tout seul, sans même qu’elle ait besoin d’intervenir.
Trump avait raison : l'Allemagne captive de la Russie
La prophétie de 2018
Le 11 juillet 2018, lors d’un petit-déjeuner de l’OTAN à Bruxelles, le président américain Donald Trump a lâché une phrase qui a fait l’effet d’une bombe : « L’Allemagne est captive de la Russie. » Il a poursuivi en disant qu’il était « très inapproprié » pour l’Allemagne de dépendre de Moscou pour son énergie tout en attendant la protection américaine via l’OTAN. À l’époque, ses propos ont été largement critiqués. Les médias européens ont dénoncé son ton agressif, son manque de diplomatie, sa tendance à exagérer. Les dirigeants allemands ont rejeté ses accusations, affirmant que leur politique énergétique était souveraine et qu’ils savaient ce qu’ils faisaient. Trump a été traité de populiste, d’ignorant, de provocateur. Mais voilà : quatre ans plus tard, en 2022, lorsque la Russie a envahi l’Ukraine et coupé ses livraisons de gaz, l’Allemagne s’est retrouvée exactement dans la situation que Trump avait décrite. Captive. Dépendante. Vulnérable.
La prophétie de 2018 s’est réalisée avec une précision glaçante. L’Allemagne a dû supplier pour obtenir du gaz de sources alternatives. Elle a dû payer des prix exorbitants sur les marchés spot. Elle a dû rationner sa consommation, fermer des usines, subventionner massivement les ménages. Elle a dû, en somme, payer le prix de sa dépendance. Et Trump, avec toute son imprévisibilité, son manque de tact, ses déclarations controversées, avait vu juste. Il avait identifié une vulnérabilité stratégique majeure que les Européens refusaient de reconnaître. Cela ne fait pas de lui un génie de la géopolitique. Cela ne valide pas l’ensemble de sa politique étrangère. Mais sur ce point précis, il avait raison. Et l’Allemagne, en refusant de l’écouter, en continuant à construire Nord Stream 2 malgré les avertissements, en fermant ses centrales nucléaires au pire moment, a payé le prix de son arrogance. Une leçon coûteuse, qui devrait nous rappeler que parfois, la vérité vient de là où on ne l’attend pas.
Reconnaître que Trump avait raison me coûte. Parce que je n’aime pas Trump. Parce que je trouve sa politique étrangère erratique et dangereuse. Parce que je déteste l’idée de lui donner raison sur quoi que ce soit. Mais les faits sont là. Il avait raison. Et l’Allemagne avait tort. Et cette vérité inconfortable devrait nous forcer à nous poser des questions. Combien d’autres avertissements ignorons-nous parce qu’ils viennent de sources que nous n’aimons pas ? Combien d’autres vulnérabilités refusons-nous de voir parce qu’elles remettent en question nos certitudes ?
La fermeture nucléaire, une erreur historique
La décision de l’Allemagne de fermer ses centrales nucléaires en avril 2023 restera comme l’une des plus grandes erreurs stratégiques de l’histoire énergétique européenne. Cette décision, prise dans le sillage de la catastrophe de Fukushima en 2011, était motivée par des préoccupations légitimes sur la sécurité nucléaire et par une forte pression de l’opinion publique allemande, historiquement anti-nucléaire. Mais son timing était catastrophique. En pleine crise énergétique, en pleine guerre en Ukraine, en pleine dépendance au gaz russe, l’Allemagne a choisi de se priver d’une source d’électricité fiable, bas-carbone et indépendante de Moscou. Les trois réacteurs fermés—Isar 2, Emsland et Neckarwestheim 2—produisaient environ 6% de l’électricité allemande. Pas énorme, mais significatif. Et surtout, ils produisaient cette électricité de manière stable, prévisible, sans dépendre des caprices géopolitiques de la Russie ou des fluctuations des marchés du gaz.
Pour compenser cette perte, l’Allemagne a dû augmenter sa production d’électricité à partir de charbon et de gaz. Le charbon, plus polluant, plus émetteur de CO2. Le gaz, dont une partie continuait de venir de Russie via des routes détournées. Résultat : les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté, la dépendance énergétique a persisté, et les coûts ont explosé. Tout ça pour respecter un calendrier de sortie du nucléaire décidé dans un contexte complètement différent. Plusieurs voix, y compris au sein du gouvernement allemand, avaient plaidé pour un report de la fermeture, au moins jusqu’à ce que la crise énergétique soit résolue. Mais la pression politique était trop forte. Les Verts, partenaires de la coalition gouvernementale, étaient inflexibles. Et l’Allemagne a maintenu le cap, fermant ses réacteurs au pire moment possible. Une décision idéologique qui a primé sur le pragmatisme, avec des conséquences économiques et stratégiques désastreuses.
Cette fermeture nucléaire me met en colère. Pas parce que je suis un fanatique du nucléaire. Mais parce que c’est un exemple parfait de comment l’idéologie peut aveugler au point de faire prendre des décisions absurdes. L’Allemagne avait une source d’énergie propre, fiable, indépendante. Et elle l’a jetée. Par principe. Par peur. Par calcul politique. Et maintenant, elle brûle du charbon et achète du gaz russe. Bravo. Vraiment. Bravo.
Les sanctions, cette arme à double tranchant
Qui punit qui vraiment ?
Les sanctions économiques sont censées être une arme. Une arme pour punir un adversaire, pour le priver de ressources, pour le forcer à changer de comportement. Mais comme toute arme, elles peuvent se retourner contre celui qui les utilise. Et c’est exactement ce qui se passe avec les sanctions occidentales contre la Russie. Oui, elles ont eu un impact. L’économie russe a souffert, les importations de technologies occidentales ont chuté, certains secteurs industriels ont été perturbés. Mais l’Occident a aussi payé un prix. Un prix en termes de coûts énergétiques. Un prix en termes d’inflation. Un prix en termes de perturbations des chaînes d’approvisionnement. Et surtout, un prix en termes de crédibilité. Parce que des sanctions qui sont systématiquement contournées, qui sont truffées d’exceptions, qui permettent aux échanges commerciaux d’augmenter plutôt que de diminuer… ce ne sont pas vraiment des sanctions. Ce sont des gesticulations. Des symboles. Des exercices de communication politique.
La question « qui punit qui ? » est donc légitime. La Russie souffre-t-elle plus de nos sanctions que nous ne souffrons de leurs conséquences ? Difficile à dire. Ce qui est certain, c’est que Moscou a trouvé des moyens de contourner une partie des restrictions. En se tournant vers la Chine et l’Inde pour ses exportations de pétrole. En développant des circuits financiers alternatifs pour échapper aux sanctions bancaires. En exploitant les failles et les exemptions que l’Occident lui-même a créées. Et pendant ce temps, l’Occident se retrouve coincé dans ses propres contradictions. Le Canada qui augmente ses importations russes de 28,8%. L’Europe qui continue d’acheter du gaz russe. Les entreprises occidentales qui demandent des dérogations pour continuer leurs affaires. Tout ça crée une situation absurde où les sanctions existent sur le papier mais sont largement inefficaces dans la réalité. Et cette inefficacité mine la crédibilité de l’Occident, affaiblit sa position dans les négociations futures, et envoie un message dangereux : nos menaces sont creuses, nos engagements sont négociables, nos principes ont un prix.
Cette question—qui punit qui ?—me hante. Parce que je crains que la réponse soit : nous nous punissons nous-mêmes. Nous nous punissons en révélant nos faiblesses, nos dépendances, nos contradictions. Nous nous punissons en montrant au monde que nous ne sommes pas capables de tenir nos engagements quand ils deviennent coûteux. Nous nous punissons en perdant notre crédibilité, notre autorité morale, notre capacité à mener. Et pendant ce temps, la Russie encaisse les coups, s’adapte, trouve des solutions. Et continue sa guerre.
Le contournement organisé
Les sanctions ne fonctionnent que si elles sont appliquées rigoureusement et uniformément. Dès qu’il y a des failles, des exceptions, des moyens de contournement, leur efficacité s’effondre. Et dans le cas des sanctions contre la Russie, les moyens de contournement sont nombreux. Certains sont légaux, comme les exemptions accordées par les gouvernements occidentaux à leurs propres entreprises. D’autres sont illégaux, comme les réseaux de sociétés écrans qui permettent de masquer l’origine russe de certains produits. D’autres encore sont dans une zone grise, comme les réexportations via des pays tiers qui ne participent pas aux sanctions. La Turquie, par exemple, est devenue une plaque tournante pour le commerce entre la Russie et l’Occident. Les Émirats arabes unis aussi. Ces pays achètent des produits russes, les transforment ou les réemballent, puis les revendent à l’Occident. Ou inversement, ils achètent des produits occidentaux et les revendent à la Russie. Un commerce triangulaire qui permet de contourner les sanctions tout en respectant formellement la lettre de la loi.
Ce contournement organisé n’est pas un secret. Les gouvernements occidentaux le savent. Les médias en parlent. Les ONG le dénoncent. Mais rien ne change vraiment. Parce que fermer ces failles demanderait une coordination internationale beaucoup plus poussée, une surveillance beaucoup plus stricte, et une volonté politique beaucoup plus forte. Or, cette volonté fait défaut. Chaque pays a ses propres intérêts, ses propres priorités, ses propres entreprises à protéger. Le Canada veut sauver son industrie aéronautique. L’Europe veut sécuriser son approvisionnement en gaz. La Turquie veut profiter de sa position de pont entre l’Est et l’Ouest. Et la Russie, elle, exploite toutes ces failles, tous ces intérêts divergents, toutes ces contradictions. Elle sait que l’Occident n’est pas uni, qu’il n’est pas cohérent, qu’il n’est pas prêt à payer le prix de ses principes. Et elle en profite. Pendant que nous débattons de nos exemptions, elle contourne nos sanctions. Pendant que nous nous félicitons de nos 4000 entités sanctionnées, elle trouve 4000 moyens de faire du commerce quand même.
Ce contournement organisé me déprime. Parce qu’il montre à quel point nos sanctions sont un château de cartes. Impressionnant de loin, mais qui s’effondre dès qu’on souffle dessus. Et le pire, c’est qu’on le sait. On sait que ça ne marche pas vraiment. On sait que la Russie trouve des moyens de contourner. On sait que nos exemptions créent des failles béantes. Mais on continue. Parce que c’est plus facile de faire semblant que d’affronter la réalité. Plus facile de maintenir l’illusion que de reconnaître l’échec.
Le coût réel de l'hypocrisie occidentale
Financer la guerre qu’on prétend combattre
Voici la vérité brutale, celle qu’on préfère ne pas dire trop fort : chaque dollar, chaque euro dépensé en produits russes finit par alimenter la machine de guerre du Kremlin. Directement ou indirectement. Via les taxes, les revenus d’exportation, les profits des entreprises d’État. Quand le Canada importe pour 63,6 millions de dollars de produits russes, une partie de cet argent retourne à Moscou. Quand l’Europe achète du gaz russe pour des milliards d’euros, cet argent finance les missiles qui tombent sur Kiev. Quand Airbus achète du titanium à VSMPO-AVISMA, cet argent contribue à maintenir l’économie russe à flot. C’est une chaîne de causalité indirecte, certes. On peut toujours argumenter que le titanium n’est pas directement utilisé pour fabriquer des armes, que les taxes représentent une fraction minime du budget militaire russe, que notre contribution est marginale. Mais au final, le résultat est le même : nous finançons la guerre que nous prétendons combattre. Nous soutenons l’économie que nous prétendons sanctionner. Nous enrichissons le régime que nous prétendons isoler.
Cette hypocrisie a un coût. Un coût moral, d’abord. Parce qu’elle nous force à vivre avec une contradiction insupportable : comment peut-on regarder un Ukrainien dans les yeux et lui dire qu’on le soutient, tout en sachant qu’on finance son agresseur ? Un coût politique, ensuite. Parce qu’elle mine notre crédibilité internationale. Si nous ne sommes pas capables de tenir nos propres engagements, pourquoi d’autres pays nous feraient-ils confiance ? Un coût stratégique, enfin. Parce qu’elle révèle nos faiblesses, nos dépendances, nos vulnérabilités. Elle montre à la Russie, à la Chine, à tous les régimes autoritaires du monde que l’Occident n’est pas aussi fort qu’il le prétend. Que nos sanctions peuvent être contournées. Que nos principes peuvent être négociés. Que notre unité n’est qu’une façade. Et cette révélation, elle a des conséquences. Elle encourage ces régimes à tester nos limites, à défier nos règles, à ignorer nos menaces. Parce qu’ils savent que nous ne sommes pas prêts à payer le prix de nos convictions.
Financer la guerre qu’on prétend combattre. Cette phrase me poursuit. Parce qu’elle résume tout. Toute notre hypocrisie, toute notre lâcheté, toute notre incohérence. On se dit du bon côté de l’histoire, on se drape dans nos valeurs, on se félicite de notre soutien à l’Ukraine. Et pendant ce temps, on paie pour les bombes qui tombent sur Kiev. Pas directement, bien sûr. Jamais directement. Toujours via des circuits compliqués, des chaînes de causalité indirectes, des mécanismes qu’on peut nier si on fait semblant de ne pas comprendre. Mais au fond, on sait. On sait tous. Et on continue quand même.
Les milliards qui continuent de couler vers Moscou
Parlons chiffres. Depuis le début de la guerre en Ukraine, la Russie a continué d’exporter massivement du pétrole, du gaz, du charbon, des métaux, des engrais. Malgré les sanctions, malgré les embargos, malgré les restrictions. Les revenus d’exportation russes ont certes diminué par rapport aux niveaux d’avant-guerre, mais ils restent substantiels. Des dizaines de milliards de dollars par an. Une grande partie de ces revenus provient de l’Europe, qui continue d’acheter du gaz russe. Une autre partie provient de l’Asie, notamment de la Chine et de l’Inde, qui ont augmenté leurs achats de pétrole russe à prix réduit. Et une petite partie, mais non négligeable, provient de pays comme le Canada, qui continuent d’importer certains produits russes jugés essentiels. Tous ces flux financiers, additionnés, représentent des sommes colossales qui permettent à la Russie de maintenir son économie à flot, de financer son budget, et de poursuivre sa guerre.
Les milliards qui coulent vers Moscou ne sont pas une abstraction. Ce sont des ressources concrètes qui permettent d’acheter des armes, de payer des soldats, de produire des missiles, de maintenir la machine de guerre en marche. Chaque milliard qui entre dans les caisses russes prolonge la guerre d’un jour, d’une semaine, d’un mois. Et une partie de ces milliards vient de nous. De l’Occident. Des pays qui prétendent soutenir l’Ukraine. C’est une réalité inconfortable, que nous préférons ne pas regarder en face. Mais elle est là. Indéniable. Et elle pose une question fondamentale : combien de temps allons-nous continuer à financer notre propre ennemi ? Combien de temps allons-nous maintenir cette schizophrénie où nous soutenons l’Ukraine d’une main tout en payant la Russie de l’autre ? Combien de temps allons-nous prétendre que nos sanctions fonctionnent alors que les chiffres prouvent le contraire ? La réponse, malheureusement, semble être : aussi longtemps que ce sera économiquement pratique. Aussi longtemps que les alternatives seront trop coûteuses. Aussi longtemps que nous pourrons nous mentir à nous-mêmes.
Ces milliards qui coulent vers Moscou me donnent envie de hurler. Parce que chaque milliard, c’est du sang ukrainien. Chaque milliard, c’est une ville détruite, une famille brisée, une vie perdue. Et nous, nous continuons à payer. Nous continuons à alimenter cette machine de mort. Tout en nous disant qu’on fait ce qu’on peut, qu’on n’a pas le choix, que c’est compliqué. Mais c’est pas compliqué. C’est simple. Arrêter de payer. Arrêter d’acheter. Arrêter de financer. Mais ça, ça demanderait du courage. Et du courage, on n’en a pas.
Vers un embargo total ou vers plus de mensonges ?
Les demandes du Congrès ukrainien
Le Congrès des Ukrainiens-Canadiens est clair dans ses demandes : il veut un embargo commercial total contre la Russie. Pas de demi-mesures. Pas d’exemptions. Pas d’arrangements. Un embargo complet, qui couperait tous les flux commerciaux entre le Canada et la Russie. Cette position est radicale, mais elle a le mérite de la cohérence. Si l’objectif est vraiment d’isoler économiquement la Russie, si l’objectif est vraiment de priver le régime de Poutine de ressources, alors il faut aller jusqu’au bout. Il faut accepter de payer le prix. Il faut accepter que des entreprises souffrent, que des emplois soient menacés, que des chaînes d’approvisionnement soient perturbées. Parce que c’est ça, la réalité d’un embargo. Ce n’est pas gratuit. Ce n’est pas indolore. Ça coûte. Mais c’est le prix de la cohérence. Le prix de l’intégrité. Le prix de la crédibilité. Et selon le Congrès ukrainien, c’est un prix que le Canada devrait être prêt à payer.
Cette demande d’embargo total met le gouvernement canadien face à ses responsabilités. Soit il accepte, et il assume les conséquences économiques. Soit il refuse, et il assume l’hypocrisie de sa position. Pour l’instant, Ottawa a choisi une troisième voie : celle du compromis mou, des sanctions avec exceptions, de la fermeté rhétorique sans fermeté réelle. Une voie qui ne satisfait personne. Ni la diaspora ukrainienne, qui y voit une trahison. Ni l’industrie, qui reste dans l’incertitude. Ni les alliés internationaux, qui constatent le manque de cohérence. Le Congrès des Ukrainiens-Canadiens ne lâchera pas. Il continuera de faire pression, de dénoncer, de réclamer. Parce que pour lui, c’est une question de survie. La survie de l’Ukraine. La survie de ses proches restés là-bas. La survie d’un pays qui se bat pour son existence pendant que nous débattons de nos intérêts économiques. Et face à cette urgence existentielle, les arguments économiques sonnent creux. Les préoccupations pour les emplois à Mirabel semblent dérisoires. Les calculs politiques paraissent obscènes.
Je comprends la demande du Congrès ukrainien. Je la comprends viscéralement. Parce que si c’était mon pays qui était envahi, si c’était ma famille qui était bombardée, je voudrais que le monde entier coupe tous les liens avec l’agresseur. Immédiatement. Sans conditions. Sans exceptions. Je ne voudrais pas entendre parler d’emplois, de chaînes d’approvisionnement, d’intérêts économiques. Je voudrais juste que ça s’arrête. Que l’argent arrête de couler vers Moscou. Que les bombes arrêtent de tomber sur Kiev. Et je trouverais insupportable qu’on me dise que c’est compliqué, que c’est pas si simple, qu’il faut être réaliste. Parce que la réalité, c’est que des gens meurent. Et que nous, nous continuons à commercer avec ceux qui les tuent.
La réalité des intérêts économiques
Mais voilà, il y a l’autre côté de la médaille. La réalité des intérêts économiques. Les emplois à Mirabel. Les contrats de Bombardier. Les investissements de Safran. Les chaînes d’approvisionnement de RTX. Tout ça représente des milliards de dollars, des milliers d’emplois, des décennies de savoir-faire. Couper l’approvisionnement en titanium russe du jour au lendemain aurait des conséquences immédiates et douloureuses. Des retards de production. Des pénalités contractuelles. Des clients mécontents. Potentiellement des licenciements. Et ces conséquences ne seraient pas abstraites. Elles toucheraient des vraies personnes. Des travailleurs qui n’ont rien demandé, qui font juste leur boulot, qui ont des familles à nourrir. Est-il juste de leur demander de payer le prix de notre cohérence morale ? Est-il juste de sacrifier leur gagne-pain pour nos principes ? Ce sont des questions difficiles, qui n’ont pas de réponses simples.
Le gouvernement canadien est coincé entre ces deux impératifs. D’un côté, la pression morale et politique pour être cohérent avec ses déclarations de soutien à l’Ukraine. De l’autre, la pression économique et sociale pour protéger les emplois et l’industrie nationale. Et pour l’instant, il a choisi de naviguer entre les deux, en accordant des exemptions qui permettent de maintenir les flux commerciaux tout en prétendant sanctionner la Russie. Une solution bancale, qui ne satisfait personne mais qui évite les choix difficiles. Le problème, c’est que cette solution ne peut pas durer éternellement. À un moment, il faudra choisir. Soit on assume l’embargo total et on paie le prix économique. Soit on assume qu’on n’est pas prêt à payer ce prix et on arrête de prétendre qu’on sanctionne sérieusement la Russie. Mais continuer à jouer sur les deux tableaux, à maintenir l’illusion, à accumuler les contradictions… ça ne peut que finir par exploser. En termes de crédibilité, en termes de cohérence, en termes de confiance.
Ce dilemme entre emplois et principes me déchire. Parce que je vois les deux côtés. Je vois les travailleurs de Mirabel qui ne veulent pas perdre leur job. Je vois les Ukrainiens qui ne veulent pas perdre leur vie. Et je ne sais pas comment réconcilier les deux. Je ne sais pas comment dire aux uns qu’ils doivent sacrifier leur gagne-pain pour les autres. Je ne sais pas comment dire aux autres qu’ils doivent accepter qu’on continue à financer leur agresseur parce qu’on a des intérêts économiques. C’est un dilemme impossible. Et peut-être que c’est ça, le vrai problème : on s’est mis dans une situation où il n’y a pas de bonne solution. Où toutes les options sont mauvaises. Et maintenant, on doit vivre avec.
Quand les mots remplacent les actes
La communication politique versus la réalité
Le gouvernement canadien excelle dans l’art de la communication politique. Les communiqués de presse se succèdent, annonçant de nouvelles vagues de sanctions, de nouvelles mesures de soutien à l’Ukraine, de nouveaux engagements fermes contre la Russie. Les ministres multiplient les déclarations martiales, promettant que le Canada ne faiblira pas, que le soutien à Kiev est indéfectible, que l’isolement de Moscou sera total. Les chiffres sont brandis : 4000 entités sanctionnées, des milliards d’avoirs gelés, des millions d’aide militaire et humanitaire. Sur le papier, c’est impressionnant. Dans les discours, c’est convaincant. Mais dans la réalité ? Dans la réalité, les importations russes augmentent de 28,8%. Dans la réalité, les exemptions se multiplient. Dans la réalité, le titanium russe continue de couler vers nos usines. Il y a un gouffre entre les mots et les actes. Entre la rhétorique et la réalité. Entre ce qu’on dit et ce qu’on fait.
Ce gouffre n’est pas accidentel. Il est le résultat d’une stratégie délibérée : dire ce que les gens veulent entendre tout en faisant ce qui arrange le gouvernement. Promettre la fermeté tout en accordant des exemptions. Afficher le soutien à l’Ukraine tout en protégeant les intérêts économiques canadiens. C’est une forme de double langage, de schizophrénie politique, qui permet de satisfaire tout le monde à court terme mais qui mine la crédibilité à long terme. Parce que les gens ne sont pas dupes. La diaspora ukrainienne voit bien que les chiffres contredisent les discours. L’opposition voit bien que les sanctions sont truffées d’exceptions. Les médias voient bien que les importations augmentent malgré les embargos. Et petit à petit, la confiance s’érode. La crédibilité se perd. Et les mots, aussi beaux soient-ils, ne valent plus rien. Parce qu’ils ne sont plus adossés à des actes. Parce qu’ils ne sont plus que du vent. Du bruit. De la communication.
Cette communication politique me rend malade. Parce qu’elle nous prend pour des idiots. Parce qu’elle suppose qu’on va gober les beaux discours sans regarder les chiffres. Parce qu’elle mise sur notre paresse, notre indifférence, notre capacité à oublier. Et le pire, c’est que ça marche. La plupart du temps, ça marche. Les gens lisent les communiqués, hochent la tête, se disent que le gouvernement fait ce qu’il faut. Et ils passent à autre chose. Ils ne creusent pas. Ils ne vérifient pas. Ils ne confrontent pas les mots à la réalité. Et pendant ce temps, l’hypocrisie continue. Les importations augmentent. Le titanium coule. Et les bombes tombent sur Kiev.
Le double langage d’Ottawa
Le double langage d’Ottawa est particulièrement visible dans la façon dont le gouvernement parle des exemptions. D’un côté, il affirme que les sanctions contre la Russie sont les plus sévères jamais imposées, qu’elles visent à isoler économiquement le régime de Poutine, qu’elles sont appliquées rigoureusement. De l’autre, il accorde discrètement des dérogations à Airbus, Bombardier, Safran et d’autres, leur permettant de continuer à importer du titanium russe. Ces exemptions ne sont jamais mises en avant. Elles ne font pas l’objet de communiqués de presse. Elles sont accordées au cas par cas, dans une relative opacité. Et quand les médias les découvrent, quand les chiffres de Statistique Canada révèlent l’augmentation des importations, le gouvernement minimise. Il parle de « fluctuations », de « volumes faibles », de « mesures temporaires ». Il contextualise, il relativise, il noie le poisson. Mais il ne nie jamais vraiment. Parce qu’il ne peut pas. Les chiffres sont là.
Ce double langage crée une confusion délibérée. Il permet au gouvernement de prétendre qu’il sanctionne sévèrement la Russie tout en protégeant les intérêts économiques canadiens. Il permet de satisfaire la diaspora ukrainienne avec des discours fermes tout en rassurant l’industrie avec des exemptions discrètes. Il permet de maintenir une façade de cohérence tout en gérant les contradictions dans l’ombre. Mais cette stratégie a ses limites. Parce qu’à force de jongler avec les mots, à force de dire une chose et d’en faire une autre, on finit par perdre toute crédibilité. Les alliés internationaux se demandent s’ils peuvent vraiment compter sur le Canada. Les adversaires voient les failles et en profitent. Et les citoyens, eux, perdent confiance dans leurs institutions. Parce qu’ils constatent que les mots ne veulent plus rien dire. Que les promesses ne sont pas tenues. Que le double langage est devenu la norme. Et ça, c’est dangereux. Parce qu’une démocratie ne peut pas fonctionner sans confiance. Sans la conviction que les dirigeants disent la vérité, tiennent leurs engagements, agissent en cohérence avec leurs paroles.
Ce double langage me révolte. Parce qu’il nous traite comme des enfants à qui on peut raconter n’importe quoi. Parce qu’il suppose qu’on ne va pas vérifier, qu’on ne va pas comparer les discours aux actes, qu’on va juste avaler la pilule et passer à autre chose. Et le plus triste, c’est que ça marche souvent. Parce qu’on est fatigués. Parce qu’on a d’autres préoccupations. Parce qu’il est plus facile de croire les beaux discours que de creuser la réalité. Mais moi, je refuse. Je refuse d’accepter ce double langage. Je refuse de faire semblant que tout va bien. Je refuse de laisser les mots remplacer les actes.
Conclusion : le prix de notre lâcheté collective
Ce que ces chiffres révèlent vraiment
Les 63,6 millions de dollars d’importations russes au Canada entre janvier et août 2025 ne sont pas qu’un chiffre. Ils sont un symbole. Un symbole de notre incapacité à aligner nos actes sur nos paroles. Un symbole de notre dépendance à des régimes que nous prétendons combattre. Un symbole de notre lâcheté collective face aux choix difficiles. Ces chiffres révèlent que nos sanctions ne sont pas sérieuses. Qu’elles sont truffées d’exemptions qui en annulent l’effet. Qu’elles visent plus à donner l’impression d’agir qu’à obtenir des résultats concrets. Ils révèlent que nous avons choisi les emplois plutôt que les principes, l’économie plutôt que la cohérence, le confort plutôt que le courage. Et ce choix, il a un coût. Un coût en termes de crédibilité internationale. Un coût en termes de cohérence morale. Un coût en termes de soutien réel à l’Ukraine. Parce qu’on ne peut pas prétendre soutenir un pays tout en finançant son agresseur. On ne peut pas prétendre isoler un régime tout en continuant à commercer avec lui.
Ces chiffres révèlent aussi notre myopie stratégique. Notre incapacité à anticiper les crises, à diversifier nos approvisionnements, à nous préparer aux chocs géopolitiques. Pendant des années, nous avons construit des dépendances économiques avec des régimes autoritaires parce que c’était pratique, parce que c’était moins cher, parce que personne ne voulait imaginer que ça pourrait mal tourner. Et maintenant que ça a mal tourné, maintenant que la Russie a envahi l’Ukraine, maintenant que nous sommes censés sanctionner Moscou, nous découvrons que nous sommes pieds et poings liés. Que nous ne pouvons pas couper nos approvisionnements sans nous faire mal. Que notre industrie aéronautique dépend du titanium russe. Que notre économie est plus fragile qu’on ne le pensait. Et cette découverte, elle devrait nous servir de leçon. Elle devrait nous pousser à repenser nos chaînes d’approvisionnement, à diversifier nos sources, à réduire nos dépendances. Mais le fera-t-on vraiment ? Ou continuerons-nous sur la même voie, en espérant que la prochaine crise n’arrivera pas ?
Ces 63,6 millions me poursuivent. Ils sont devenus pour moi le chiffre de notre honte collective. Le chiffre qui résume tout ce qui ne va pas dans notre façon de gérer cette crise. Notre hypocrisie, notre lâcheté, notre incohérence. Et je me demande : dans dix ans, dans vingt ans, quand on regardera en arrière, comment jugera-t-on cette période ? Comment jugera-t-on notre réponse à l’invasion de l’Ukraine ? Dira-t-on que nous avons fait ce qu’il fallait ? Ou dira-t-on que nous avons trahi nos valeurs, que nous avons choisi le confort plutôt que le courage, que nous avons financé la guerre que nous prétendions combattre ? Je crains que ce soit la deuxième option. Et cette crainte me hante.
L’urgence d’une cohérence retrouvée
Il n’est pas trop tard pour changer de cap. Il n’est pas trop tard pour retrouver une cohérence entre nos paroles et nos actes. Mais ça demandera du courage. Le courage d’accepter que nos sanctions doivent avoir un coût. Le courage de dire non aux exemptions, même quand elles protègent des emplois. Le courage de diversifier nos approvisionnements, même si ça prend du temps et de l’argent. Le courage d’assumer que soutenir l’Ukraine ne peut pas se limiter à des discours et des aides financières. Que ça doit aussi passer par un véritable isolement économique de la Russie. Sans exceptions. Sans arrangements. Sans compromis. Le Congrès des Ukrainiens-Canadiens a raison de réclamer un embargo total. Pas parce que c’est facile. Mais parce que c’est cohérent. Parce que c’est la seule façon de donner du sens à nos déclarations de soutien. Parce que c’est la seule façon de montrer que nos principes ne sont pas négociables.
Cette cohérence retrouvée ne sera pas indolore. Elle aura un prix. Des emplois seront menacés. Des entreprises devront s’adapter. Des chaînes d’approvisionnement devront être reconstruites. Mais c’est le prix de l’intégrité. Le prix de la crédibilité. Le prix de la solidarité réelle avec l’Ukraine. Et si nous ne sommes pas prêts à payer ce prix, alors nous devrions au moins avoir l’honnêteté de le reconnaître. De dire clairement que notre soutien à l’Ukraine a des limites. Que nos sanctions contre la Russie s’arrêtent là où commencent nos intérêts économiques. Que nos principes sont négociables. Au moins, ce serait honnête. Au moins, on arrêterait de se mentir à nous-mêmes. Mais je préférerais qu’on choisisse l’autre voie. Celle du courage. Celle de la cohérence. Celle qui nous permettrait de regarder les Ukrainiens dans les yeux sans avoir honte. Celle qui nous permettrait de nous regarder dans le miroir sans détourner le regard. Celle qui ferait de nous ce que nous prétendons être : un pays qui défend ses valeurs, quoi qu’il en coûte.
Je termine cet article avec un sentiment de colère et de tristesse mêlées. Colère contre notre hypocrisie, contre notre lâcheté, contre notre incapacité à faire ce qui est juste. Tristesse pour l’Ukraine, qui se bat seule pendant que nous comptons nos dollars et nos emplois. Tristesse pour nous aussi, parce que nous avons perdu quelque chose d’essentiel en chemin. Cette capacité à dire non. Cette capacité à défendre nos valeurs même quand ça coûte cher. Cette capacité à être cohérents, intègres, dignes de confiance. Nous l’avons perdue. Et je ne sais pas si nous la retrouverons un jour. Mais j’espère. J’espère que ces chiffres, ces 63,6 millions de dollars, ces 28,8% d’augmentation, réveilleront quelque chose en nous. Une conscience. Une indignation. Un refus. Et que nous déciderons, enfin, de choisir le courage plutôt que le confort. Les principes plutôt que les profits. L’Ukraine plutôt que le titanium.
Sources primaires
Statistique Canada, données sur les importations canadiennes par pays d’origine, janvier-août 2024 et 2025. Radio-Canada, « Les importations russes au Canada ont augmenté de 29% en un an », article publié le 13 janvier 2025, par Yasmine Mehdi. Affaires mondiales Canada, communiqués officiels sur les sanctions canadiennes liées à la Russie, 2024-2025. Congrès des Ukrainiens-Canadiens, lettre au comité parlementaire des affaires étrangères, novembre 2024. Reuters, « Airbus wins reprieve from Canadian sanctions on Russian titanium », 6 novembre 2025. Fliegerfaust, « Canada Suspends Sanctions on Russia: The Airbus Waiver », 6 novembre 2025.
Sources secondaires
Reuters, articles sur les sanctions occidentales contre la Russie et leurs impacts, 2022-2025. Clean Energy Wire, analyses sur la dépendance énergétique allemande, 2023-2024. Brookings Institution, « Europe’s messy Russian gas divorce », 2024. Trading Economics, données sur les importations canadiennes et russes, 2024-2025. Gazette du Canada, règlements modifiant les mesures économiques spéciales visant la Russie, 2024-2025. Norsk Titanium, communiqués sur les accords de fourniture avec Airbus, 2024. Global Affairs Canada, page officielle sur les sanctions canadiennes liées à la Russie, consultée en janvier 2025.
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