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Washington DC, octobre 2025 : soldats en armes dans la capitale

Union Station, Washington DC. Des centaines de touristes tirant leurs valises côtoient désormais des soldats de la Garde nationale en armes qui scrutent chaque passant avec cette vigilance militaire qu’on associe aux zones de guerre, pas aux démocraties occidentales. Septembre 2025 — depuis plus d’un mois, 2 000 militaires patrouillent dans les rues de la capitale américaine sur ordre direct de Donald Trump. L’image qui aurait terrifié l’Amérique il y a encore quelques années devient routine quotidienne. Les commuters s’habituent, les enfants s’accoutument, la démocratie s’anesthésie.

Rosa Brooks — experte en relations civilo-militaires à Georgetown, ancienne conseillère au Pentagone — diagnostique avec une précision clinique cette dérive autoritaire : « Cela habitue progressivement les Américains à l’idée que c’est normal, que dans votre vie quotidienne, vous devez simplement vous y habituer. » L’habituation à l’inacceptable — la méthode classique des régimes autoritaires pour normaliser l’anormal. Trump ne brise pas brutalement la démocratie — il l’érode méthodiquement, jour après jour, soldat après soldat, jusqu’à ce que l’Amérique oublie ce qu’était la liberté.

Quantico, 30 septembre : « guerre de l’intérieur » déclarée

Base militaire de Quantico, Virginie. Devant plus de 800 généraux et amiraux convoqués d’urgence des quatre coins du monde, Trump franchit un seuil historique dans la rhétorique présidentielle américaine : « Nous subissons une invasion de l’intérieur. Pas différent d’un ennemi étranger, mais plus difficile à bien des égards parce qu’ils ne portent pas d’uniforme. » L’ennemi intérieur officiellement désigné — les villes démocrates transformées en territoires hostiles à reconquérir.

Cette déclaration de guerre civile déguisée révèle la transformation de l’armée américaine en instrument de répression politique intérieure. « Nous devrions utiliser certaines des villes dangereuses comme terrains d’entraînement », annonce Trump avec cette désinvolture qui caractérise ses dérives autoritaires les plus graves. Los Angeles, Chicago, Portland — laboratoires de la militarisation trumpienne. L’armée américaine, conçue pour défendre la démocratie contre les ennemis extérieurs, recyclée en garde prétorienne contre les citoyens américains « désobéissants ».

L’expertise accablante : vers la dictature militaire

Daniel Schwartz, ancien conseiller juridique de la NSA, livre un diagnostic sans appel : « Il suggère qu’ils apprennent à devenir des guerriers dans les villes américaines. Cela devrait effrayer tout le monde. C’est aussi manifestement illégal. » L’illégalité assumée — Trump viole ouvertement la loi Posse Comitatus qui interdit l’usage domestique de l’armée depuis 1878. Un juge fédéral californien a déjà condamné ces déploiements comme « violation délibérée » de la législation fédérale. Peu importe — Trump continue, persiste, s’enfonce dans l’autoritarisme.

Cette transgression révèle la méthode trumpienne de destruction démocratique : violer ouvertement les lois pour habituer l’opinion à leur violation. Première transgression, scandale. Deuxième transgression, polémique. Troisième transgression, routine. L’Amérique découvre qu’elle peut s’habituer à l’inacceptable — et que cette habituation constitue la première étape vers la dictature. Rosa Brooks l’avait prévu : « Est-ce intimidant ? Est-ce glaçant pour la plupart des gens ordinaires ? Ça l’est pour beaucoup de gens. » Mais l’intimidation finit par s’user. L’exception devient norme. La démocratie meurt d’accoutumance.

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