Aller au contenu

Ils étaient plus de cent PDG réunis derrière des portes closes à Washington en septembre 2025, majoritairement républicains, et ce qu’ils ont dit là-bas résonne comme un coup de tonnerre dans le temple du capitalisme américain. Ces titans de l’industrie — ceux-là mêmes qui dirigent Gap, Ford, Nike, Home Depot, Target, Walmart — ont prononcé un verdict unanime et glaçant: les politiques de Trump ne fonctionnent pas. Pire encore, ils détournent maintenant le slogan sacré du président contre lui, réclamant de « rendre l’Amérique à l’Amérique » (Make America into America Again), une reformulation cinglante du célèbre MAGA qui sonne comme une déclaration de guerre économique. Ce n’est pas une simple critique — c’est une mutinerie silencieuse du monde des affaires contre l’homme qui prétendait incarner leurs intérêts.

Le forum du Yale Chief Executive Leadership Institute, tenu dans la capitale fédérale alors que des nuages s’amoncellaient littéralement au-dessus du Capitole, a révélé une vérité que personne n’ose prononcer publiquement: Trump sabote le système capitaliste américain. Deux tiers des PDG interrogés affirment que les tarifs douaniers ont nuit à leurs entreprises. Trois quarts estiment que le président agit illégalement avec ses tarifs et qu’il endommage durablement l’indépendance de la Réserve fédérale. Près de 85 pour cent considèrent que l’incertitude gouvernementale créée par Trump constitue un cadeau stratégique à la Chine. Et lorsqu’un commentateur a comparé le mouvement MAGA au maoïsme, il n’y a eu aucun cri d’indignation dans la salle — au contraire, un silence approbateur. Le capitalisme américain, ce système qui a dominé le monde pendant un siècle, tremble sous les coups de boutoir d’un président qui prétend le défendre.

La révolte silencieuse des géants économiques

Imaginez la scène: des PDG qui gèrent collectivement des milliards de dollars d’actifs, des empires commerciaux qui emploient des millions de personnes, assis dans une salle de conférence avec des sénateurs des deux partis et des officiels de l’administration Trump. La règle de Chatham House s’applique — on peut rapporter ce qui est dit, mais jamais identifier qui l’a dit. Cette protection de l’anonymat libère les langues, et ce qui émerge ressemble à une litanie de désespoir économique. « Les politiques de Trump ne fonctionnent pas », répètent-ils. « Il érode les fondations économiques américaines. » « Il transforme l’Amérique en un quasi-socialisme d’État. » Ces phrases, prononcées par des hommes et des femmes qui ont soutenu Trump publiquement par devoir patriotique, sonnent comme des aveux d’échec collectif.

Le plus frappant, c’est que ces critiques ne proviennent pas de progressistes de Silicon Valley ou de démocrates pur jus. Non. Ce sont des républicains traditionnels, des conservateurs fiscaux, des défenseurs acharnés du libre marché qui ont financé les campagnes du GOP pendant des décennies. Ils ont voté Trump en espérant des baisses d’impôts, une déréglementation, un environnement commercial favorable. Ils obtiennent à la place des tarifs erratiques qui provoquent l’inflation, des interventions gouvernementales qui ressemblent à du capitalisme d’État chinois, et une incertitude paralysante qui gèle tout investissement stratégique. Un PDG d’une grande entreprise manufacturière a résumé le dilemme: « Je ne veux pas avoir l’air d’un imbécile en changeant mon modèle d’affaires, pour découvrir que les tarifs changent encore dans 90 jours. Alors je retiens mes investissements. » C’est l’économie américaine en suspension, figée par la peur de ce que Trump fera ensuite.

facebook icon twitter icon linkedin icon
Copié!

Commentaires

0 0 votes
Évaluation de l'article
Subscribe
Notify of
guest
0 Commentaires
Newest
Oldest Most Voted
Inline Feedbacks
View all comments

Articles reliés

More Content