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Des décrets présidentiels controversés

Tout a commencé le 1er février 2025, lorsque Donald Trump a publié une série de décrets présidentiels imposant des droits de douane draconiens sur pratiquement toutes les importations américaines. Invoquant l’International Emergency Economic Powers Act de 1977, une loi conçue pour gérer les urgences nationales liées à la sécurité, Trump a déclaré que les déficits commerciaux américains constituaient une menace extraordinaire justifiant ces mesures. Les premiers tarifs visaient le Canada, le Mexique et la Chine — accusés de ne pas freiner le trafic de fentanyl vers les États-Unis. Puis vint le « Liberation Day » du 2 avril, où Trump imposa des tarifs allant de 10 % à 50 % sur les produits de quasiment tous les pays du monde. Une offensive protectionniste sans précédent qui a plongé l’économie mondiale dans l’incertitude.

Ces tarifs dits « de trafic » et « réciproques » ont immédiatement déclenché une onde de choc économique. Les entreprises canadiennes ont vu leurs exportations chuter, entraînant une baisse du PIB du pays. Au Québec, des designers et des PME qui dépendaient du marché américain ont dû revoir leurs stratégies ou fermer boutique. L’exemption initiale de 1 dollar américain pour les petits colis a pris fin le 1er septembre 2025, faisant grimper les frais à 50 dollars par article importé — un coup fatal pour les micro-entrepreneurs. Trump justifie cette politique en affirmant qu’elle ramènera la production industrielle aux États-Unis, mais dans l’immédiat, elle crée surtout du chaos économique et une hausse des prix pour les consommateurs, selon la majorité des économistes.

Une réponse judiciaire immédiate et coordonnée

Face à cette avalanche tarifaire, la résistance s’est organisée rapidement. Dès avril 2025, douze États américains — menés par l’Oregon et incluant la Californie — ont intenté des poursuites devant le Tribunal du commerce international des États-Unis. Leur argument était simple mais dévastateur : Trump n’a pas le pouvoir constitutionnel d’imposer des droits de douane, une prérogative qui appartient exclusivement au Congrès selon l’article I de la Constitution américaine. « Le plan de droits de douane insensé du président Trump est non seulement imprudent sur le plan économique, mais il est également illégal », a martelé la procureure générale de l’Arizona, Kris Mayes. Les États ont soutenu que l’IEEPA ne permettait pas d’utiliser des mesures d’urgence pour imposer des tarifs, et que Trump avait « bouleversé l’ordre constitutionnel et plongé l’économie américaine dans le chaos ».

Parallèlement, les petites entreprises ont lancé leurs propres batailles juridiques. À Washington D.C., Learning Resources et hand2mind ont attaqué les tarifs devant le juge de district Rudolph Contreras, qui leur a donné raison en mai 2025. Dans une décision retentissante, le magistrat a conclu que Trump avait excédé ses pouvoirs sous l’IEEPA. Un autre groupe de cinq petites entreprises, incluant le distributeur de vins et spiritueux V.O.S. Selections, a déposé une action similaire devant le Tribunal du commerce international. Ces compagnies ont insisté sur un point crucial : si le mot « réguler » dans l’IEEPA signifiait « taxer », cela bouleverserait l’interprétation de centaines d’autres lois fédérales où ce terme apparaît. Les enjeux juridiques dépassaient donc largement les tarifs eux-mêmes.

L’escalade vers la Cour suprême

En août 2025, la Cour d’appel du circuit fédéral, qui entend les appels du Tribunal du commerce international, a porté un coup majeur à l’administration Trump. Par un vote de 7 contre 4, elle a confirmé que l’IEEPA ne donnait pas au président le pouvoir d’imposer les tarifs de trafic ou réciproques. Le raisonnement de la majorité s’appuyait sur la doctrine des « questions majeures » — un principe selon lequel le Congrès doit clairement autoriser l’exécutif pour prendre des décisions ayant une « signification économique et politique vaste ». « L’utilisation des tarifs par Trump se qualifie comme une décision de signification économique et politique vaste », a écrit la cour, exigeant une autorisation congressionnelle claire que le gouvernement ne pouvait fournir. Ce jugement a été suspendu jusqu’au 14 octobre pour permettre un appel à la Cour suprême.

Trump a réagi avec une véhémence caractéristique sur son réseau Truth Social : « TOUS LES DROITS DE DOUANE SONT ENCORE EN VIGUEUR ! » a-t-il martelé en majuscules. Il a immédiatement annoncé son intention de saisir la Cour suprême, comptant sur la majorité conservatrice qu’il a lui-même consolidée durant son premier mandat pour renverser ces décisions embarrassantes. Le 9 septembre 2025, les juges ont accepté d’entendre l’affaire sur un calendrier inhabituellement accéléré, fixant les arguments oraux au 5 novembre — un signe que la cour cherche à résoudre rapidement cette crise constitutionnelle. Mais cette décision comportait un risque énorme pour Trump : si la Cour suprême confirmait l’illégalité des tarifs, l’administration pourrait devoir rembourser plus de 210 milliards de dollars américains déjà perçus depuis le printemps 2025.

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