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La rancune comme principe directeur

La rancune de Trump n’est pas ordinaire. Elle ne s’estompe pas avec le temps, ne se tempère pas avec la réflexion, ne cède pas devant les considérations pragmatiques. Au contraire, elle se nourrit d’elle-même, s’amplifie avec chaque jour qui passe, devient une obsession dévorante qui dicte littéralement les priorités présidentielles. Observez simplement l’allocation des ressources gouvernementales durant les neuf premiers mois de son second mandat — des milliards investis non pas dans les infrastructures, l’éducation ou la santé publique, mais dans la poursuite systématique de ceux qui ont osé le critiquer. Chicago, dirigée par le maire démocrate Brandon Johnson qui a refusé de « embrasser le derrière » présidentiel, se retrouve ciblée pour une occupation militaire malgré des statistiques de criminalité en amélioration. Portland, New York, Los Angeles — toutes les villes dont les dirigeants ont exprimé publiquement leur opposition voient maintenant des troupes fédérales patrouiller dans leurs rues.

Cette rancune présidentielle ne se limite pas aux adversaires politiques actuels — elle remonte des années, voire des décennies en arrière. Trump garde des listes mentales, cultive des griefs anciens, ressasse des injustices perçues qui remontent à son époque comme promoteur immobilier à New York dans les années 1980. Des journalistes qui ont écrit des articles critiques il y a quinze ans se retrouvent soudainement ciblés par des enquêtes de l’IRS. Des fonctionnaires qui ont témoigné contre lui lors de son premier impeachment voient leurs carrières détruites, leurs pensions menacées, leurs vies transformées en cauchemars bureaucratiques. Cette mémoire rancunière pathologique, cette incapacité à pardonner ou même simplement à oublier, ne caractérise pas un leader politique normal. Elle révèle un individu psychologiquement figé dans un état de blessure narcissique permanente, incapable de dépasser les atteintes à son ego, consacrant des ressources cognitives et émotionnelles énormes à entretenir des ressentiments qui devraient depuis longtemps être relégués à l’insignifiance historique.

Les attaques comme respiration quotidienne

Trump ne passe pratiquement aucune journée sans attaquer quelqu’un publiquement. Ses posts sur Truth Social — souvent rédigés à des heures indiquant une insomnie chronique, un autre symptôme préoccupant — déversent un flot constant de vitriol contre des cibles en rotation perpétuelle. Un jour c’est un juge qui a rendu une décision défavorable, qualifié de corrompu et incompétent. Le lendemain, c’est un ancien allié politique qui a osé une critique timide, immédiatement transformé en traître et ennemi. Le surlendemain, ce sont les médias mainstream accusés de comploter sa chute. Cette compulsion d’attaque permanente ne résulte pas d’une stratégie politique réfléchie — elle émane d’un besoin psychologique profond et pathologique de dominer, d’humilier, de détruire toute source perçue de menace ou de défi.

Les attaques de Trump présentent des caractéristiques cliniquement significatives. Elles sont disproportionnées — une critique mineure provoque une réaction explosive. Elles sont personnelles — plutôt que de débattre des idées, Trump attaque l’apparence physique, l’intelligence, la santé mentale de ses cibles. Elles sont obsessionnelles — il revient encore et encore sur les mêmes individus, incapable de passer à autre chose même après avoir obtenu une victoire. Et surtout, elles sont dépourvues d’autocritique — dans l’univers mental de Trump, il a toujours raison, ses échecs sont toujours causés par la trahison d’autrui, ses difficultés résultent invariablement de complots contre lui. Cette absence totale de capacité d’introspection ou de remise en question personnelle constitue l’un des marqueurs les plus inquiétants d’une pathologie narcissique sévère. Les psychologues parlent de « narcissisme malin » quand cette incapacité d’autocritique se combine avec une disposition à la cruauté, une absence d’empathie, et une volonté de détruire ceux perçus comme menaçants.

La persécution élevée en système de gouvernance

Sous Trump, la persécution n’est plus un abus de pouvoir occasionnel — elle est devenue la méthode de gouvernance privilégiée. Le Department of Justice, censément indépendant, fonctionne maintenant ouvertement comme l’instrument personnel de vengeance présidentielle. Des procureurs fédéraux reçoivent des directives explicites d’enquêter sur des individus spécifiques non pas parce qu’il existe des preuves de crimes, mais parce que ces individus ont publiquement critiqué le président. L’Internal Revenue Service, dont l’indépendance politique était autrefois sacrée, mène maintenant des audits ciblés contre les organisations à but non lucratif qui s’opposent aux politiques trumpiennes. L’ICE et d’autres agences d’application de la loi concentrent leurs ressources non pas sur les menaces réelles à la sécurité publique, mais sur les communautés qui ont voté massivement démocrate lors des dernières élections.

Cette persécution systématique a transformé le gouvernement fédéral américain en quelque chose de fondamentalement différent de ce qu’il était censé être. Les fonctionnaires ne servent plus la Constitution ou le peuple américain — ils servent les obsessions personnelles d’un homme profondément perturbé. Les agences fédérales ne poursuivent plus des objectifs politiques cohérents visant le bien public — elles exécutent les caprices d’un narcissique pathologique dont les décisions sont dictées par ses blessures égotiques plutôt que par l’intérêt national. Et cette transformation ne résulte pas d’une dérive bureaucratique progressive ou d’une corruption institutionnelle graduelle. Elle découle directement et explicitement de la pathologie mentale d’un individu unique qui se trouve contrôler le pouvoir exécutif de la nation la plus puissante du monde. C’est terrifiant précisément parce que ce n’est pas un système dysfonctionnel — c’est un système fonctionnant exactement comme prévu par un esprit dysfonctionnel.

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