Les sondages qui font mal
Les chiffres de popularité de Trump s’effondrent. Un sondage Quinnipiac publié récemment montre que seulement 38% des électeurs approuvent sa gestion économique, le taux d’approbation le plus bas depuis février 2017. 57% désapprouvent. C’est un désastre politique en gestation. Et ce n’est pas tout : un sondage NPR/PBS News/Marist révèle que par une marge de 38% contre 27%, les Américains blâmeraient davantage les républicains que les démocrates en cas de shutdown. Trois sur dix accusent les deux partis, mais le message est clair : les républicains portent la responsabilité principale de ce chaos. Trump, qui avait fait de l’économie son cheval de bataille en 2024, se retrouve maintenant piégé par ses propres décisions.
Mais il y a plus troublant encore. Un sondage Reuters/Ipsos montre que plus de la moitié des Américains, y compris environ trois républicains sur dix, pensent que Trump utilise les forces de l’ordre fédérales pour s’en prendre à ses ennemis. Cette perception d’un président autoritaire, combinée à l’incompétence économique perçue, crée un cocktail toxique. Les divisions politiques s’intensifient, neuf mois après le début de son second mandat. Même au sein du Parti républicain, des voix commencent à s’élever, timidement certes, mais elles s’élèvent quand même. Thom Tillis et Don Bacon, deux figures républicaines ayant tenté d’affirmer une certaine indépendance face à Trump, ont annoncé leur retraite. Leur message? Le pragmatisme et la coopération bipartisane ne sont plus les bienvenus dans le parti de Trump.
Le Project 2025, ce poison interne
Comme si les problèmes économiques ne suffisaient pas, Trump s’est mis à parler ouvertement du Project 2025, cette initiative conservatrice controversée développée par la Heritage Foundation. Ce plan de 920 pages propose des expulsions de masse, un retrait des droits reproductifs, et l’élimination du langage sur la diversité et l’inclusion des politiques fédérales. Durant sa campagne, Trump avait tenté de prendre ses distances avec ce projet, trop impopulaire dans les sondages. Mais maintenant qu’il est au pouvoir, il en parle librement, notamment en mettant en avant Russell Vought, directeur de l’Office of Management and Budget, co-auteur du projet.
Maggie Haberman, correspondante de la Maison Blanche pour le New York Times, a rapporté que des législateurs républicains sont « discrètement frustrés » par ces références. Pourquoi? Parce que ça donne des munitions aux démocrates, alors que les républicains essaient de blâmer l’opposition pour le shutdown. « C’était absurde de penser que le président n’avait aucune connaissance du Project 2025 durant la campagne, » a dit Haberman. « Mais maintenant, il en parle ouvertement, et ça complique la narratif. » Les démocrates en profitent pour dénoncer l’agenda extrémiste de Trump. Et les républicains modérés, ceux qui restent, se retrouvent coincés entre leur base MAGA et des électeurs indépendants de plus en plus méfiants. C’est une fracture interne qui ne fait que s’agrandir.
Les retraites qui en disent long
Thom Tillis et Don Bacon ne sont pas les seuls à partir. Ils rejoignent une longue liste de républicains qui ont soit pris leur retraite, soit perdu en primaires après avoir osé s’opposer à Trump. Jeff Flake, Bob Corker, Liz Cheney, Adam Kinzinger… Tous ont payé le prix de leur indépendance. Charlie Dent, ancien représentant républicain centriste, l’a expliqué clairement : « Parce qu’ils ont des opinions divergentes sur certaines questions, ils se sentent indésirables dans la conférence républicaine au sens large. » Le Parti républicain est devenu un monolithe trumpiste, où toute dissidence est étouffée, où toute voix alternative est chassée.
Mais ce triomphe de Trump pourrait bien se transformer en cauchemar électoral. Un parti si entièrement redéfini à son image peut-il continuer à obtenir des majorités à la Chambre et au Sénat? Avec le départ des républicains capables de se distancier du président, le GOP perd sa capacité à séduire les électeurs modérés et indépendants. Les districts swing, ceux qui font basculer les élections, nécessitent des candidats capables de nuances, pas des idéologues purs et durs. Or, le parti de Trump ne produit plus que des clones, des imitateurs, des courtisans. Et les sondages pour les élections de mi-mandat montrent que davantage d’Américains prévoient de voter démocrate que républicain. Les républicains n’ont qu’une avance de sept sièges à la Chambre. Ça peut basculer très vite.
Les politiques qui enfoncent le clou
Les tarifs, encore et toujours
Revenons aux tarifs, cette obsession trumpiste qui détruit l’économie américaine. Trump a lancé une guerre commerciale impliquant le Canada, le Mexique, la Chine et d’autres pays, avec l’objectif déclaré de ramener des emplois aux États-Unis et de réduire la dépendance aux nations étrangères. Pendant sa campagne, il avait assuré que les tarifs ne coûteraient rien aux Américains. « Ça ne sera pas un coût pour vous, » avait-il affirmé lors d’un rassemblement. « Ça sera un coût pour quelqu’un d’autre. » Sauf que les économistes le disent depuis le début : ce sont les consommateurs américains qui paient. Les entreprises importatrices répercutent les coûts sur les prix de vente. Et maintenant, les preuves s’accumulent.
Les prix du bœuf ont augmenté de près de 15% entre septembre 2024 et septembre 2025. Trump a annoncé vouloir importer du bœuf d’Argentine pour réduire les prix américains, une décision qui a suscité l’inquiétude des fermiers américains. Les prix du café ont grimpé de 19%. Les boissons non alcoolisées de 5,3%. Les céréales et produits de boulangerie de 1,6%. Chaque catégorie de produits alimentaires a vu ses prix augmenter. Et pendant ce temps, Trump continue de dire que les coûts baissent. C’est un déni systématique de la réalité. Une forme de gaslighting économique où le président essaie de convaincre les citoyens que ce qu’ils vivent n’existe pas.
La répression de l’immigration, un autre facteur
Mais les tarifs ne sont pas le seul problème. Trump a également intensifié la répression de l’immigration, notamment dans les lieux de travail. Cette politique contribue aussi à la hausse des prix. Pourquoi? Parce qu’elle réduit la main-d’œuvre disponible, surtout dans des secteurs comme l’agriculture, la construction, l’hôtellerie. Quand les travailleurs se font rares, les salaires augmentent, ce qui est bien pour les employés mais se traduit aussi par une hausse des coûts de production. Et ces coûts, encore une fois, sont répercutés sur les consommateurs. Les économistes préviennent que ces politiques pourraient entraîner des prix encore plus élevés à moins que l’administration ne change de cap. Mais Trump ne changera pas. Il est trop têtu, trop convaincu de sa propre infaillibilité.
Brian Coulton de Fitch Ratings l’a dit : on voit « lentement mais sûrement » les preuves d’un transfert accru des tarifs vers les consommateurs. D’autres économistes vont plus loin. Moody’s Analytics avait publié un rapport avant l’élection de 2024 prévoyant qu’une victoire de Trump avec un Congrès républicain entraînerait un taux d’inflation de 3,6% pour 2025, contre 2,4% avec Biden. On y est presque. Et ça ne va faire qu’empirer si Trump persiste dans ses politiques. La combinaison de tarifs élevés, de réductions fiscales pour les riches, et d’expulsions massives de migrants crée une tempête inflationniste parfaite. La Fed essaie de naviguer entre deux écueils : stimuler l’emploi sans relancer l’inflation. Mais c’est mission impossible quand l’administration sabote l’économie par ses propres décisions.
Le marché du travail en souffrance
Parlons de l’emploi. Les entreprises embauchent beaucoup moins qu’avant. Le taux de chômage augmente doucement mais sûrement. Des millions d’Américains se retrouvent dans une détresse financière accrue. La combinaison d’une inflation élevée et d’un marché du travail qui se dégrade, c’est la définition même de la stagflation. Ce phénomène économique rare et toxique qui a ravagé les États-Unis dans les années 1970. Et voilà qu’on y retourne, grâce aux politiques erratiques de Trump. Le président affirme que l’économie est « la plus forte qu’elle ait jamais été ». Mais les données, celles qui n’ont pas été retardées par le shutdown, montrent l’inverse. L’économie ralentit, les embauches diminuent, les salaires stagnent pendant que les prix explosent.
Les failles du système républicain
La stratégie législative bancale
Les républicains ne s’accordent même pas sur la stratégie législative pour faire passer l’agenda de Trump. John Thune, le nouveau leader de la majorité au Sénat, veut diviser les priorités en deux projets de loi distincts : un sur la sécurité frontalière et l’énergie, un autre sur les réductions d’impôts. Jason Smith, président du comité des voies et moyens de la Chambre et principal stratège fiscal républicain, s’oppose à cette division. Il préfère un seul grand paquet législatif regroupant toutes les priorités. Cette discorde interne montre que même avec le contrôle de la Chambre et du Sénat, les républicains peinent à s’organiser. Ils ont une majorité mince, fragile, et les désaccords internes pourraient faire dérailler l’agenda trumpiste.
Cette incapacité à s’unir sur la méthode révèle une faiblesse structurelle du parti. Trump domine certes, mais cette domination ne se traduit pas en efficacité législative. Les républicains craignent tellement les primaires MAGA qu’ils s’alignent publiquement sur Trump tout en traînant des pieds en coulisses. Tommy Tuberville, sénateur de l’Alabama, a même déclaré que ce n’est pas l’affaire du Sénat de véritablement examiner les nominations présidentielles. Une abdication complète du rôle constitutionnel du Congrès. Cette érosion des freins et contrepoids pourrait être le vrai danger à long terme. Un système où le pouvoir exécutif n’est plus contrôlé par le législatif, c’est la porte ouverte à l’autoritarisme.
Les nominations controversées et l’affaiblissement institutionnel
Trump a multiplié les nominations controversées, et les républicains au Sénat, terrifiés à l’idée de contrarier le président et sa base, ont majoritairement cédé. L’avertissement a été clair : ceux qui s’opposent risquent des primaires. Cette peur paralyse le parti. Et pendant ce temps, Trump envisage des nominations par interim qui contournent le processus de confirmation, l’appropriation de fonds approuvés par le Congrès, le déploiement du pouvoir présidentiel malgré les restrictions législatives. Tout ça pourrait devenir réalité si les républicains continuent à craindre que l’affirmation de leurs prérogatives sénatoriales signifierait la fin de leurs carrières politiques. C’est un effondrement des institutions, pierre par pierre.
Le rapport Project 2025 proposait même de poursuivre les responsables électoraux ayant protégé l’élection de 2020 pour crimes fédéraux. L’administration Trump a déjà commencé à cibler certains responsables, notamment Chris Krebs, que Trump lui-même avait nommé à la tête de l’Agence fédérale de cybersécurité et de sécurité des infrastructures en 2018, simplement parce qu’il avait nié que l’élection de 2020 était truquée. Cette volonté de revanche politique, cette obsession de punir ceux qui ont défendu l’intégrité électorale, c’est profondément antidémocratique. Et ça devrait alarmer tous les Américains, quelle que soit leur affiliation politique. Mais beaucoup de républicains ferment les yeux, préférant garder leur siège plutôt que défendre les principes.
La polarisation qui tue la démocratie
La polarisation atteint des niveaux jamais vus. Les sondages montrent une inquiétude croissante concernant les divisions politiques américaines. Neuf mois après le début du second mandat de Trump, le pays est plus fracturé que jamais. Les républicains et les démocrates vivent dans des réalités parallèles. Selon le sondage de l’Université du Michigan, les républicains s’attendent à une inflation de 0,1% tandis que les démocrates prévoyaient des hausses bien plus importantes. La réalité, 2,8% puis maintenant 3%, se situe quelque part entre les deux mais plus proche des craintes démocrates. Cette divergence de perception n’est pas anodine. Elle montre que les partisans s’accrochent à des récits opposés, imperméables aux faits.
Cette polarisation rend tout compromis impossible. Et sans compromis, pas de gouvernance efficace. Le shutdown en est l’illustration parfaite. Les républicains refusent de négocier sérieusement avec les démocrates, préférant jouer la confrontation. Mais cette stratégie a ses limites. Les Américains en ont assez du chaos. Ils veulent que le gouvernement fonctionne, que l’économie soit stable, que leurs vies s’améliorent. Et au lieu de ça, ils assistent à un spectacle désolant de postures partisanes, de mensonges présidentiels, et d’inaction législative. La confiance dans les institutions s’effrite. Et quand la confiance disparaît, c’est tout l’édifice démocratique qui vacille.
Les conséquences électorales qui se profilent
Les midterms, ce cauchemar annoncé
Les élections de mi-mandat de 2026 se profilent comme un cauchemar potentiel pour les républicains. Les sondages montrent que davantage d’Américains prévoient de voter démocrate que républicain. Le parti de Trump ne détient qu’une mince majorité à la Chambre, sept sièges d’avance seulement. Si l’inflation continue à grimper, si le chômage augmente, si les électeurs se sentent trahis par les promesses économiques non tenues, ils sanctionneront les républicains aux urnes. C’est exactement ce qui s’est passé avec Biden en 2022 et 2024. Les démocrates avaient perdu la Chambre en 2022 puis la présidence et le Sénat en 2024, en grande partie à cause de l’inflation. Maintenant, c’est au tour des républicains de potentiellement payer le prix.
Les retraites de Tillis et Bacon sont des signes avant-coureurs. Ces républicains modérés capables de gagner dans des districts ou États compétitifs disparaissent. À leur place, des candidats trumpistes purs et durs, qui séduisent la base mais repoussent les indépendants. Cette stratégie peut fonctionner dans des districts sûrement républicains, mais pas dans les swing districts. Et ce sont ces districts qui déterminent le contrôle de la Chambre. Charlie Dent l’a bien dit : « Un parti si entièrement redéfini à l’image de Trump peut-il continuer à obtenir des majorités? » La question est légitime. Et la réponse pourrait bien être non.
La rage des électeurs face au mensonge économique
Les électeurs ne sont pas dupes. Ils ressentent l’inflation dans leur quotidien. Trump peut répéter cent fois que les prix baissent, ça ne change rien à la réalité de leurs courses, de leurs factures, de leurs budgets serrés. Un rapport du Guardian montre que 75% des Américains déclarent que leurs dépenses mensuelles ont augmenté jusqu’à 749 dollars. C’est énorme. Et ça touche toutes les catégories sociales, même si ce sont évidemment les plus pauvres qui souffrent le plus. Cette rage silencieuse des électeurs, cette frustration accumulée, va s’exprimer tôt ou tard. Peut-être en 2026, peut-être avant dans des élections locales ou spéciales.
L’approbation économique de Trump est au plus bas depuis février 2017. Seulement 38% approuvent sa gestion. C’est catastrophique pour un président qui avait fait de l’économie son atout principal. Et contrairement à d’autres sujets où Trump peut manipuler les perceptions, l’économie est trop tangible, trop immédiate. Les gens savent ce qu’ils paient. Ils savent si leur salaire suit ou pas. Et quand le président leur dit que tout va bien alors qu’ils galèrent, ça crée un fossé de crédibilité impossible à combler. Parton a raison quand elle dit que même Trump, avec son talent pour marteler les mensonges, ne peut pas battre les « vibes » quand les gens paient plus et gagnent moins.
Les républicains pris au piège de Trump
Les élus républicains sont pris en otage. S’ils critiquent Trump, ils risquent une primaire. S’ils le soutiennent aveuglément, ils risquent de perdre l’élection générale. C’est un dilemme impossible. Et beaucoup choisissent la facilité : rester silencieux, voter avec Trump tout en espérant que ça passe. Mais cette stratégie a ses limites. Les électeurs modérés, ceux qui font basculer les élections, observent. Et ils voient un parti incapable de tenir tête à son leader, même quand il prend des décisions désastreuses. Ça ne donne pas confiance. Ça donne l’impression d’un parti faible, opportuniste, sans colonne vertébrale.
Certains républicains commencent à murmurer leur frustration. Maggie Haberman a rapporté que des législateurs sont « discrètement frustrés » par les références de Trump au Project 2025. Mais cette frustration reste privée. Personne n’ose parler publiquement. Parce que parler, c’est risquer la fin de sa carrière politique. Trump a réussi à instaurer un climat de peur au sein de son propre parti. Et cette peur paralyse toute velléité de résistance. Résultat? Un parti monolithique en apparence, mais rongé de l’intérieur par les doutes et les désaccords. Et tôt ou tard, cette façade va craquer.
Les signaux d'alarme que personne n'écoute
Les avertissements des experts ignorés
Les économistes, les analystes, les experts tirent la sonnette d’alarme depuis des mois. Moody’s Analytics avait prévenu avant l’élection que les politiques de Trump entraîneraient une inflation plus élevée. Fitch Ratings, le Tax Foundation, le Bureau of Labor Statistics, tous publient des rapports montrant la détérioration de la situation économique. Mais Trump ignore tout ça. Il préfère écouter ses conseillers les plus proches, ceux qui lui disent ce qu’il veut entendre. Russell Vought, son directeur du budget et co-auteur du Project 2025, fait partie de ces idéologues convaincus que les tarifs sont bons, que la réduction du gouvernement est nécessaire, que les sacrifices à court terme valent les gains à long terme. Sauf qu’il n’y aura pas de gains à long terme si l’économie s’effondre avant.
Heather Digby Parton n’est qu’une voix parmi d’autres, mais elle dit tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. L’inflation est une bombe à retardement. Et Trump, au lieu de la désamorcer, ajoute de la dynamite. Chaque nouveau tarif, chaque expulsion de travailleurs immigrés, chaque shutdown gouvernemental ajoute de la pression. Et à un moment, ça va exploser. Les républicains le savent. Certains le disent en privé. Mais publiquement, ils continuent à soutenir Trump, à répéter ses mensonges, à défendre l’indéfendable. C’est de la lâcheté politique à l’état pur.
L’Histoire comme miroir cruel
L’Histoire est remplie d’exemples de leaders qui ont ignoré les signaux d’alarme jusqu’à ce qu’il soit trop tard. Des empires qui se croyaient invincibles et qui se sont effondrés. Des partis politiques qui dominaient et qui ont disparu. Les systèmes politiques larges et complexes sont fragiles. Un article universitaire récent sur la crise de la conception du gouvernement américain le rappelle : « L’Histoire démontre que les grands systèmes politiques sont fragiles. Ils sont particulièrement enclins à s’effondrer dans des conditions turbulentes comme celles auxquelles le système américain est confronté dans les décennies à venir. » Cette analyse, publiée en juin 2025, identifie deux crises : celle du moment, liée aux actions controversées de Trump, et celle plus profonde de conception, liée aux défauts de l’architecture du système.
La sur-centralisation a contribué à quatre pathologies : surcharge, paralysie, polarisation sociétale, inefficacité programmatique et sclérose. Un système mieux conçu serait un système où l’autorité serait dévolue et les institutions centrales reconfigurées. Mais la réforme systémique sera difficile à accomplir à cause des contraintes constitutionnelles et d’une culture d’anti-gouvernementalisme. Pourtant, les changements structurels sont essentiels. Sinon, le système risque l’effondrement. Et on n’en est peut-être pas si loin. Les institutions américaines sont testées comme jamais depuis la guerre civile. Et pour l’instant, elles tiennent. Mais pour combien de temps encore?
La bombe qui attend son heure
La métaphore de la bombe à retardement utilisée par Parton est parfaitement choisie. Une bombe, c’est silencieux jusqu’à ce que ça explose. L’inflation monte lentement, les gens s’adaptent tant qu’ils peuvent, mais à un moment, ça devient insupportable. Et là, la colère éclate. Les républicains devraient avoir appris de l’expérience de Biden. Mais ils répètent les mêmes erreurs. Ils minimisent, ils nient, ils accusent les autres. Ils blâment les démocrates pour le shutdown alors que c’est leur propre intransigeance qui l’a causé. Ils prétendent que l’économie va bien alors que les chiffres montrent le contraire. Cette dissonance cognitive finira par les rattraper.
Et quand ça arrivera, quand les électeurs se retourneront massivement contre eux, il sera trop tard pour corriger le tir. Les dégâts seront faits. L’économie sera en ruine, les institutions affaiblies, la confiance pulvérisée. Trump aura peut-être satisfait son ego, consolidé son emprise sur le parti, mais à quel prix? Le prix de la destruction du Parti républicain tel qu’on le connaissait. Un parti qui avait des valeurs, des principes, une vision. Maintenant, ce n’est plus qu’un culte de la personnalité autour d’un homme qui refuse de voir la réalité. Et ce culte, comme tous les cultes, finira mal.
Le silence complice des médias conservateurs
Fox News et l’écosystème de la désinformation
Trump n’est pas seul dans ce déni. Les médias conservateurs, notamment Fox News, jouent un rôle crucial dans la propagation des mensonges économiques. Lors d’une interview sur Fox News, Trump a déclaré : « Nous n’avons presque plus d’inflation. » L’interviewer n’a pas contesté. Pas de fact-checking en direct, pas de confrontation avec les données réelles. Juste une plateforme offerte pour répandre la désinformation. Cet écosystème médiatique conservateur crée une bulle où les partisans de Trump ne sont jamais confrontés aux faits qui contredisent le récit présidentiel. Ils vivent dans une réalité alternative où l’économie va bien, où les tarifs fonctionnent, où Trump est un génie économique.
Cette bulle informationnelle est dangereuse. Elle empêche les électeurs républicains de réaliser l’ampleur du désastre économique en cours. Quand ils finissent par le réaliser, parce que leur propre portefeuille les oblige à voir la vérité, le choc est d’autant plus brutal. Et la colère d’autant plus grande. Parce qu’ils se rendent compte qu’on leur a menti. Pas seulement Trump, mais aussi les médias qu’ils écoutaient, les commentateurs qu’ils admiraient, les élus qu’ils soutenaient. Cette trahison pourrait provoquer un retour de bâton électoral massif. Ou au contraire, un repli encore plus profond dans le déni. C’est imprévisible, mais c’est explosif.
Les voix dissidentes marginalisées
Quelques voix conservatrices tentent de briser le consensus. Certains chroniqueurs, certains économistes de droite osent dire que les tarifs sont une erreur, que l’inflation est un problème réel. Mais ces voix sont marginalisées, traitées de traîtres, de RINO (Republicans In Name Only). La base trumpiste ne tolère aucune critique. Elle exige une loyauté absolue. Et quiconque dévie de la ligne est immédiatement attaqué, vilipendé, excommunié. Cette intolérance idéologique transforme le Parti républicain en secte. Une secte où la pensée critique est interdite, où la conformité est obligatoire, où la vérité n’a plus de place.
Adam Kinzinger, Liz Cheney, ces républicains qui ont osé dire la vérité sur Trump, ont été chassés du parti. Leurs carrières politiques ont été détruites. Pas parce qu’ils avaient tort, mais parce qu’ils avaient raison. Et ça, c’est un symptôme d’un parti profondément malade. Un parti sain accueille le débat, valorise la diversité de pensée, cherche la vérité même quand elle dérange. Le Parti républicain de Trump ne fait rien de tout ça. Il exige l’obéissance aveugle. Et ça, historiquement, ça finit toujours mal.
Le rôle des réseaux sociaux dans la propagande
Trump utilise les réseaux sociaux, notamment sa propre plateforme Truth Social, pour diffuser ses mensonges sans filtre. Pas de journalistes pour le contredire, pas de fact-checkers pour vérifier. Juste un flux constant de désinformation directement injecté dans le cerveau de ses partisans. Il martèle que l’inflation est réglée, que l’économie est la meilleure de l’Histoire, que tout va bien. Et ses millions de followers répètent, partagent, amplifient. C’est une machine de propagande d’une efficacité redoutable. Mais elle a une faiblesse : elle ne peut pas changer la réalité matérielle. Les gens paient ce qu’ils paient à la caisse, peu importe ce que dit Trump sur les réseaux sociaux.
Et c’est là que la dissonance devient insoutenable. Quand le récit propagandiste entre en collision frontale avec la réalité vécue, quelque chose doit céder. Soit les gens rejettent la propagande et ouvrent les yeux, soit ils s’enfoncent plus profondément dans le déni, rejetant la réalité elle-même. On voit les deux phénomènes se produire. Certains républicains commencent à douter, à questionner. D’autres se radicalisent encore plus, inventant des théories du complot pour expliquer pourquoi les prix montent malgré les assurances de Trump. C’est une fracture qui traverse tout le pays. Et elle continue à s’approfondir.
Conclusion
Donald Trump ignore volontairement, systématiquement, obstinément la bombe à retardement que représente l’inflation pour le Parti républicain. Heather Digby Parton a raison de tirer la sonnette d’alarme. Les chiffres sont là, implacables, têtus. L’inflation atteint 3%, la plus rapide augmentation depuis janvier. Les prix du bœuf, du café, des produits alimentaires explosent. Les Américains paient jusqu’à 749 dollars de plus par mois. Et pendant ce temps, le président continue de répéter qu’il a « déjà réglé l’inflation », que « les coûts sont en baisse ». C’est un mensonge éhonté, transparent, insultant. Un mensonge qui rappelle tragiquement les erreurs de l’administration Biden, celle qui a payé le prix fort électoralement pour avoir ignoré les préoccupations économiques des citoyens.
Les politiques de Trump – tarifs massifs, répression de l’immigration, shutdown gouvernemental – alimentent directement cette inflation. Les économistes le disent, les données le prouvent, mais Trump refuse d’écouter. Il préfère sa bulle de conseillers idéologues, son écosystème médiatique complaisant, ses réseaux sociaux où il peut mentir sans conséquence immédiate. Mais la réalité finit toujours par rattraper les menteurs. Et quand elle rattrapera Trump, le Parti républicain entier paiera le prix. Les sondages montrent déjà l’effondrement de son approbation économique : 38%, le plus bas depuis février 2017. Les républicains sont plus blâmés que les démocrates pour le shutdown. Les élections de mi-mandat 2026 se profilent comme un potentiel désastre électoral. Et pourtant, rien ne change. Trump continue sa course folle, entraînant son parti vers l’abîme.
Ce qui se passe dépasse la simple incompétence économique. C’est une crise systémique des institutions américaines. Un parti politique entier réduit au silence par peur de son leader. Des élus qui abdiquent leur rôle constitutionnel de contre-pouvoir. Des médias conservateurs qui propagent la désinformation plutôt que d’informer. Une base radicalisée qui refuse la réalité. Et au centre de tout ça, un président narcissique, menteur, autoritaire qui détruit tout sur son passage. La bombe à retardement dont parle Parton, c’est pas seulement l’inflation. C’est toute la structure démocratique américaine qui menace d’exploser. Les signes sont là. Les avertissements sont clairs. Mais personne n’écoute. Ou plutôt, ceux qui écoutent n’ont pas le pouvoir, et ceux qui ont le pouvoir refusent d’écouter. C’est une tragédie en temps réel. Et on ne sait pas encore comment elle va se terminer. Mais ça finira mal. C’est une certitude. La seule question qui reste, c’est : à quel point mal? Et quand exactement? La bombe continue de ticquer. Et Trump fait semblant de ne pas l’entendre.