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Juin 2025 : Los Angeles, le premier domino

Tout a commencé discrètement en juin 2025, quand Trump a ordonné le déploiement de la Garde nationale à Los Angeles. La justification officielle ? Lutter contre la criminalité et protéger les agents fédéraux impliqués dans l’application des lois sur l’immigration. Le problème, c’est que la criminalité à Los Angeles suivait en réalité une tendance à la baisse, et le gouverneur de Californie, un démocrate, n’avait jamais demandé d’aide fédérale. Normalement, le déploiement de la Garde nationale d’un état nécessite soit la demande du gouverneur de cet état, soit l’invocation de pouvoirs présidentiels extraordinaires. Trump a choisi une troisième voie : fédéraliser unilatéralement la Garde nationale californienne, l’arrachant du contrôle du gouverneur et la plaçant sous commandement fédéral. Cette manœuvre a stupéfié les experts constitutionnels qui n’avaient jamais vu une telle action entreprise contre la volonté explicite d’un gouverneur en temps de paix.

Mais Trump n’en est pas resté là. Quelques semaines après le déploiement de la Garde nationale, il a franchi une ligne encore plus rouge : il a envoyé des Marines en service actif à Los Angeles, officiellement pour « protéger la propriété et les agents fédéraux ». C’était la première fois depuis des décennies que des troupes militaires actives étaient déployées sur le sol américain pour des opérations de maintien de l’ordre, violant potentiellement le Posse Comitatus Act — une loi fédérale de 1878 qui interdit explicitement l’utilisation des forces armées pour l’application des lois domestiques. Le 2 septembre 2025, un tribunal fédéral a statué que ce déploiement était effectivement illégal, forçant Trump à retirer les Marines. Mais au lieu d’accepter cette défaite juridique comme une limite à son autorité, Trump l’a vue comme un obstacle temporaire à contourner. Et il a passé les mois suivants à chercher exactement comment le faire — d’où sa menace actuelle d’invoquer la Loi sur l’insurrection.

Août : Washington D.C., la capitale sous occupation

En août 2025, Trump a étendu sa campagne de militarisation à Washington D.C., la capitale nationale elle-même. Le mémorandum présidentiel du 11 août justifiant le déploiement de la Garde nationale du district affirmait que la ville était « assiégée par la criminalité violente » et que « c’est une honte nationale que Washington D.C. ait un taux de criminalité violente plus élevé que certains des endroits les plus dangereux du monde ». Cette affirmation était non seulement exagérée, mais factuellement incorrecte. Les données locales sur la criminalité au moment du déploiement montraient que les crimes violents avaient déjà chuté de 26% entre 2024 et 2025. La ville s’améliorait, pas se détériorait. Mais les faits n’ont jamais vraiment importé dans cette campagne — ce qui importait, c’était de projeter une image de chaos urbain nécessitant une intervention fédérale musclée.

Le déploiement à Washington D.C. avait une dimension symbolique particulièrement inquiétante. C’est la capitale de la nation, le siège du gouvernement fédéral, et maintenant elle était sous occupation militaire ordonnée par le président lui-même. Des soldats de la Garde nationale en tenue de combat complète patrouillaient les rues, positionnaient des véhicules militaires devant Union Station et d’autres sites emblématiques. Pour quiconque connaît l’histoire mondiale, ces images évoquaient immédiatement des parallèles troublants avec d’autres moments où des dirigeants autoritaires ont militarisé leurs capitales pour projeter le pouvoir et intimider l’opposition. Trump, bien sûr, a présenté cela comme une mesure de « loi et ordre », mais le maire de D.C. et les élus locaux ont dénoncé ce qu’ils ont appelé une « occupation illégale » visant davantage à faire une déclaration politique qu’à résoudre de réels problèmes de sécurité publique. Et ils avaient raison — les troupes n’ont pas réduit significativement la criminalité, mais elles ont certainement créé une atmosphère d’état policier dans la capitale américaine.

Septembre-octobre : Memphis, Portland, Chicago dans le viseur

En septembre 2025, Trump a poursuivi son expansion territoriale, annonçant des déploiements à Memphis, Portland et Chicago — toutes des villes dirigées par des démocrates dans des états que Trump avait perdus lors de l’élection. Le schéma était désormais évident : ce n’était pas une réponse aux crises de sécurité publique réelles, c’était une campagne politique ciblée contre les bastions démocrates. Memphis a reçu des troupes fédérales en octobre, malgré les objections véhémentes du gouverneur du Tennessee et du maire de la ville. Portland a fait l’objet d’une bataille judiciaire acharnée, Trump ayant finalement obtenu une victoire temporaire lorsqu’une cour d’appel fédérale a statué qu’il pouvait continuer à envoyer des troupes dans tout l’Oregon pour le moment. Chicago restait en suspens, les tribunaux pesant encore les arguments juridiques.

Ce qui rendait ces déploiements particulièrement sinistres, c’est le langage que Trump utilisait pour les justifier. En septembre, lors d’un discours de 72 minutes devant les dirigeants du Pentagone, il a qualifié les villes américaines de « terrains d’entraînement » pour l’armée, suggérant que les soldats américains devraient pratiquer leurs compétences de combat urbain sur des citoyens américains. Il a décrit l’Amérique comme étant sous « invasion » et menant « une guerre de l’intérieur », exhortant les généraux à « gérer » cet « ennemi intérieur ». Cette rhétorique — transformer les concitoyens en ennemis, décrire les villes américaines comme des zones de guerre, présenter le déploiement militaire domestique comme un entraînement au combat — c’est exactement le genre de langage déshumanisant que les régimes autoritaires utilisent pour préparer leur population à accepter la violence d’état contre les dissidents. Trump ne cachait même pas ses intentions ; il les proclamait ouvertement, testant les limites de ce que l’Amérique tolérerait avant de dire « assez ».

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