Les mots qui condamnent
Le 6 novembre 2025, lors d’une conférence de presse apparemment anodine, Donald Trump a lâché une phrase qui va hanter sa présidence. Interrogé sur les frappes israéliennes de juin contre l’Iran, le président américain a déclaré avec une fierté mal dissimulée : « Israël a attaqué en premier. Cette attaque était très, très puissante. J’étais très largement en charge de cela. » Ces mots, prononcés devant des journalistes stupéfaits, constituent selon le droit international une reconnaissance explicite de direction et de contrôle militaire. Pas simplement un soutien passif. Pas uniquement une aide logistique. Non. Trump affirme avoir été « en charge« . En français, cela signifie : commandement, autorité, responsabilité directe. Pour les juristes iraniens, ces déclarations représentent une confession présidentielle qui établit sans équivoque la responsabilité pénale et civile des États-Unis dans les attaques de juin.
La réaction immédiate de Téhéran
L’Iran n’a pas attendu longtemps. Dès le 8 novembre, Abbas Araghchi préparait sa riposte diplomatique. Le ministre des Affaires étrangères a compris instantanément la valeur de l’aveu de Trump. Dans un système international où la preuve d’une agression est souvent enfouie sous des couches de démentis et de propagande, avoir le président américain lui-même qui reconnaît publiquement son rôle directeur relève du miracle juridique. Araghchi a convoqué ses meilleurs conseillers juridiques, rassemblé les preuves matérielles des destructions, compilé les témoignages des survivants, et structuré un dossier d’accusation massif. Sa lettre au Conseil de sécurité fait référence aux communications antérieures envoyées par Téhéran les 13, 22 et 28 juin, dans lesquelles l’Iran protestait déjà contre ces « actes d’agression flagrants« . Mais cette fois, la dimension change radicalement. Ce n’est plus une simple protestation. C’est une demande formelle de responsabilisation et de réparation, appuyée par les propres mots du président américain.
L’échafaudage juridique de l’accusation
L’Iran ne tire pas au hasard. Sa stratégie légale repose sur plusieurs piliers du droit international. D’abord, l’Article 2(4) de la Charte de l’ONU, qui interdit formellement le recours à la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État. Ensuite, les résolutions de l’AIEA concernant la protection des installations nucléaires civiles. L’Iran souligne que ses sites bombardés – notamment les installations d’enrichissement de Natanz et d’Isfahan – opéraient sous supervision internationale stricte, dans le cadre du Traité de non-prolifération nucléaire. Bombarder ces sites constitue donc une violation directe des accords internationaux que les États-Unis eux-mêmes ont signés. Araghchi invoque également la Résolution 487 du Conseil de sécurité de 1981, adoptée après le bombardement par Israël du réacteur nucléaire irakien Osirak, qui condamne fermement « l’attaque militaire contre des installations nucléaires consacrées à des fins pacifiques« . L’histoire se répète, mais cette fois avec un aveu présidentiel américain comme pièce à conviction.
Les précédents historiques et leurs implications
Cette affaire n’est pas sans précédent, mais son ampleur dépasse tout ce que nous avons vu récemment. En 1986, la Cour internationale de Justice a condamné les États-Unis pour leurs actions militaires et paramilitaires au Nicaragua, reconnaissant la responsabilité américaine dans le financement et le soutien des Contras. Washington avait refusé de reconnaître la juridiction de la Cour et n’a jamais payé les compensations ordonnées. Mais le contexte actuel diffère radicalement. Trump n’a pas simplement soutenu Israël. Il a admis avoir été « en charge« . Cette formulation implique une direction opérationnelle, une participation aux décisions stratégiques, peut-être même un commandement unifié. Si cela est prouvé, les implications légales sont vertigineuses. Tous les dommages causés par les frappes israéliennes – et par les frappes américaines directes du 22 juin sur les installations nucléaires iraniennes – deviennent la responsabilité conjointe de Washington et Tel-Aviv.
Le montant astronomique des réparations demandées
L’Iran ne précise pas encore le montant exact des compensations qu’il exige, mais les chiffres commencent à circuler dans les milieux diplomatiques. Les destructions matérielles se chiffrent en dizaines de milliards de dollars : installations nucléaires anéanties, bases militaires rasées, infrastructures civiles détruites, hôpitaux endommagés, prisons bombardées. La prison d’Evin à Téhéran, frappée le 14 juin, a vu 79 détenus périr dans les flammes. Des centres médiaux, des studios de télévision, des infrastructures énergétiques : tout a été ciblé. Mais au-delà des dommages matériels, l’Iran réclame également des réparations morales pour les 1 100 morts, dont 38 enfants et 132 femmes selon les derniers bilans du porte-parole judiciaire Asghar Jahangir. Chaque vie perdue représente une famille brisée, un avenir anéanti. Et selon le droit international, ces préjudices moraux doivent être compensés. Les experts estiment que le total pourrait atteindre voire dépasser les 100 milliards de dollars.
La réponse embarrassée de Washington
Face à ces accusations, Washington patine. Le Département d’État a publié une déclaration laconique affirmant que les propos de Trump ont été « sortis de leur contexte » et que les États-Unis « ne dirigent pas les opérations militaires israéliennes. » Mais cette défense sonne creux. Comment peut-on sortir de son contexte une phrase aussi explicite que « j’étais très largement en charge de cela » ? Les juristes américains, interrogés anonymement, admettent que les déclarations présidentielles créent un problème majeur. En droit international, les aveux d’un chef d’État ont un poids considérable. Ils peuvent être utilisés comme preuves devant les tribunaux internationaux. Et même si les États-Unis ne reconnaissent pas la juridiction obligatoire de la CIJ, leur réputation diplomatique et leur capacité à mobiliser des coalitions internationales seront gravement entamées si l’accusation iranienne gagne du terrain dans l’opinion publique mondiale.
Les douze jours d'apocalypse
Le 13 juin : le début de l’enfer
À l’aube du 13 juin 2025, le ciel iranien s’est embrasé. Des escadrilles de chasseurs israéliens F-35 et F-15, accompagnés de bombardiers stratégiques américains B-2 Spirit, ont franchi l’espace aérien iranien par vagues successives. Les premières cibles : les installations d’enrichissement d’uranium de Natanz et d’Isfahan, véritables joyaux du programme nucléaire civil iranien. Des missiles de croisière et des bombes à pénétration profonde ont pulvérisé les bâtiments, ensevelissant techniciens et scientifiques sous les décombres. Parmi les victimes : le physicien nucléaire Mohammad Mahdi Tehranchi, considéré comme l’un des cerveaux du programme iranien. À Téhéran, les quartiers généraux militaires ont été frappés simultanément. Le général Mohammad Baqeri, chef d’état-major des forces armées iraniennes, a été éliminé avec plusieurs de ses adjoints. Les images satellites montrent une dévastation totale, des cratères de plusieurs dizaines de mètres, des structures militaires réduites en gravats.
L’escalade implacable
Mais Israël n’a pas stoppé après cette première salve dévastatrice. Pendant douze jours consécutifs, les bombardements se sont poursuivis sans répit. Les rapports font état d’au moins 154 vagues de frappes lourdes enregistrées contre des bases militaires, des installations de recherche, des centres de commandement à travers 28 provinces iraniennes. Les Gardiens de la Révolution ont perdu plusieurs de leurs commandants les plus expérimentés : le général Hossein Salami, commandant en chef du Corps des Gardiens, le général Gholamali Rashid, et le brigadier-général Amirali Hajizadeh, chef de la force aérospatiale. Dans la Force Qods, chargée des opérations extérieures, Israël a éliminé Saeed Izadi, chef du Corps Palestine, et Behnam Shahriyari, responsable de l’Unité 190 dédiée au trafic d’armes vers les groupes alliés. Des centaines de soldats de la milice Basij sont également tombés. L’Iran n’avait jamais subi une décapitation militaire aussi massive depuis la guerre Iran-Irak des années 1980.
Les civils pris au piège
Mais le bilan militaire, aussi catastrophique soit-il, ne représente qu’une partie de l’horreur. Les civils ont payé le prix le plus lourd. Le ministère de la Santé iranien a d’abord rapporté 610 morts civils, puis ce chiffre a grimpé à 935 selon les données médico-légales compilées par le porte-parole judiciaire. Parmi les victimes : 38 enfants et 132 femmes. Des familles entières ont été anéanties alors qu’elles se réfugiaient dans leurs sous-sols. À Téhéran, plusieurs immeubles résidentiels se sont effondrés sous l’impact de missiles mal guidés ou de débris de missiles interceptés. Les hôpitaux, submergés par l’afflux de blessés, ont rapidement épuisé leurs réserves de sang et de matériel médical. Des rapports font état de 4 475 blessés, dont beaucoup souffrent de traumatismes graves nécessitant des soins à long terme. Les organisations humanitaires indépendantes comme HRANA News Agency estiment que le véritable bilan pourrait atteindre 1 190 morts et 5 665 victimes au total.
J’ai regardé les vidéos qui ont filtré sur les réseaux sociaux. Des images tremblantes filmées par des téléphones portables. Des gens qui courent dans les rues, le ciel orange derrière eux. Des enfants qui pleurent. Des corps recouverts de draps ensanglantés. Et je me suis demandé : à quel moment avons-nous décidé que cela était acceptable ? À quel moment la logique stratégique a-t-elle complètement écrasé l’humanité ?
La riposte iranienne désespérée
L’Iran ne pouvait pas rester passif. Dès le 14 juin, Téhéran a lancé une première salve de missiles balistiques contre Israël. Plus de 550 missiles balistiques et 1 100 drones ont été tirés vers le territoire israélien pendant les douze jours de conflit. La défense antimissile israélienne, soutenue par les systèmes américains Patriot et THAAD déployés dans la région, a intercepté la majorité des projectiles. Mais certains ont franchi le bouclier. À Bat Yam, dans la banlieue de Tel Aviv, un missile iranien a frappé un immeuble résidentiel le 15 juin, tuant neuf civils israéliens, dont cinq membres d’une famille ukrainienne venue en Israël pour faire soigner un enfant de sept ans atteint de cancer. À Ramat Gan et Rishon LeZion, d’autres impacts ont fait des victimes. Au total, 28 Israéliens ont été tués et plus de 3 000 blessés durant ces douze jours. Les autorités israéliennes rapportent que 9 000 personnes ont été déplacées de leurs foyers endommagés ou détruits. La terreur ne connaît pas de frontières. Elle frappe des deux côtés.
L’intervention américaine directe du 22 juin
Comme si l’engagement israélien ne suffisait pas, les États-Unis sont entrés directement dans la danse le 22 juin 2025. Des bombardiers stratégiques B-2 Spirit, capables de transporter des bombes nucléaires mais équipés pour cette mission de munitions conventionnelles à pénétration profonde, ont décollé de bases américaines pour frapper des installations nucléaires iraniennes. Cette intervention directe marque un tournant historique : pour la première fois depuis les frappes sur la Libye en 1986, les États-Unis ont mené des opérations militaires ouvertes contre un État souverain sans déclaration de guerre formelle du Congrès. Les cibles américaines incluaient des sites de recherche nucléaire considérés comme trop profondément enfouis pour être atteints par les munitions israéliennes conventionnelles. L’objectif déclaré : « retarder le programme nucléaire iranien de plusieurs années. » Mais à quel prix humain et politique ?
Le cessez-le-feu précaire du 24 juin
Le 24 juin, après douze jours d’une violence inouïe, un cessez-le-feu a été négocié sous médiation omanaise et qatarie. L’accord, fragile et imprécis dans ses termes, a simplement arrêté les bombardements sans résoudre aucune des questions sous-jacentes. Israël a déclaré avoir « dégradé significativement les capacités militaires iraniennes » et « retardé le programme nucléaire de plusieurs années. » L’Iran, de son côté, a revendiqué avoir « infligé des pertes importantes à l’ennemi sioniste » et « démontré sa résilience face à l’agression impérialiste. » Mais derrière ces déclarations de victoire mutuelles, la réalité est beaucoup plus sombre. Des milliers de morts. Des infrastructures détruites. Des populations traumatisées. Et maintenant, six mois plus tard, la bataille se déplace du champ militaire vers l’arène juridique et diplomatique internationale. Une bataille peut-être encore plus décisive pour l’avenir de la région.
La bataille juridique commence
La lettre d’Araghchi : une déclaration de guerre diplomatique
La lettre d’Abbas Araghchi au secrétaire général de l’ONU et au président du Conseil de sécurité ne fait pas dans la dentelle. Rédigée dans un langage juridique précis mais empreint de colère à peine contenue, elle accuse frontalement les États-Unis de « direction et contrôle » des opérations militaires israéliennes. Cette formulation n’est pas anodine. En droit international, établir la « direction et contrôle » d’un État sur les actions d’un autre permet d’engager la responsabilité du premier pour les crimes commis par le second. C’est le principe établi par la Cour internationale de Justice dans plusieurs arrêts, notamment l’affaire Nicaragua contre États-Unis et l’affaire Bosnie-Herzégovine contre Serbie. Araghchi cite explicitement l’aveu de Trump du 6 novembre comme preuve irréfutable de cette direction. Il ajoute que l’Iran possède des « preuves documentées et solides de l’assistance fournie par les forces américaines dans la région depuis leurs bases aux actions militaires du régime sioniste. » Ces preuves, non encore dévoilées publiquement, incluent probablement des communications interceptées, des données de reconnaissance satellite, et des témoignages de sources renseignement.
Les violations multiples du droit international
L’accusation iranienne ne se limite pas à une violation générale de la souveraineté. Elle énumère méthodiquement les infractions spécifiques commises. Premièrement, violation de l’Article 2(4) de la Charte de l’ONU interdisant le recours à la force. Deuxièmement, violation du Traité de non-prolifération nucléaire et des résolutions de l’AIEA concernant la protection des installations nucléaires civiles. Téhéran souligne que les sites de Natanz et d’Isfahan bombardés opéraient sous inspection internationale régulière, avec des caméras de surveillance et des inspecteurs de l’AIEA présents jusqu’à quelques jours avant les frappes. Bombarder ces installations constitue donc une attaque contre l’architecture internationale de non-prolifération elle-même. Troisièmement, violation de la Résolution 487 du Conseil de sécurité condamnant les attaques contre les installations nucléaires pacifiques. Quatrièmement, crimes de guerre incluant le ciblage délibéré de civils, l’attaque d’hôpitaux et de centres de médias, et l’exécution extrajudiciaire de hauts gradés militaires.
La demande de compensation totale
L’Iran exige une « réparation complète pour tous les dommages matériels et moraux » causés à l’État iranien et à ses citoyens. Cette formulation reprend le langage utilisé par la CIJ dans ses arrêts sur les réparations. Concrètement, cela signifie : reconstruction des infrastructures détruites aux frais des États-Unis et d’Israël, compensation financière pour chaque vie perdue, indemnisation des blessés et de leurs familles, restitution ou remplacement des équipements nucléaires détruits, et réparation du préjudice moral subi par la nation iranienne dans son ensemble. Araghchi insiste également sur le fait que l’Iran « préserve ses droits légaux à travers tous les canaux disponibles« , une formulation qui suggère que Téhéran envisage de porter l’affaire devant la Cour internationale de Justice, la Cour pénale internationale pour les crimes de guerre individuels, et potentiellement d’autres instances régionales ou ad hoc. Cette approche multicanale vise à maintenir une pression juridique constante sur Washington et Tel-Aviv.
Les précédents qui font peur à Washington
Les juristes américains redoutent particulièrement la comparaison avec l’affaire Nicaragua. En 1986, la CIJ avait condamné les États-Unis pour avoir soutenu militairement et financièrement les Contras nicaraguayens, violant ainsi la souveraineté du Nicaragua. La Cour avait ordonné des réparations estimées à 17 milliards de dollars. Washington avait purement et simplement refusé de reconnaître la juridiction de la Cour et n’avait jamais payé un centime. Mais cette stratégie du déni avait coûté cher à la réputation internationale américaine. Et aujourd’hui, le contexte est différent. Trump a publiquement admis sa responsabilité. Cette confession change radicalement la donne juridique. Même si les États-Unis refusent à nouveau de reconnaître la juridiction de la CIJ, le verdict moral sera écrasant. Et dans un monde de plus en plus multipolaire, où la Chine et d’autres puissances émergentes contestent l’hégémonie américaine, un tel jugement pourrait accélérer l’érosion du soft power de Washington.
Le rôle potentiel de la Cour pénale internationale
Au-delà de la responsabilité étatique, l’Iran pourrait également chercher à engager des poursuites pénales individuelles. La Cour pénale internationale, basée à La Haye, a juridiction sur les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les crimes d’agression. Bien que ni les États-Unis ni Israël ne soient parties au Statut de Rome qui a créé la CPI, la Cour pourrait théoriquement exercer sa juridiction si les crimes ont été commis sur le territoire d’un État partie ou si le Conseil de sécurité saisit la Cour. L’Iran n’est pas non plus partie au Statut de Rome, mais il pourrait faire une déclaration acceptant la juridiction de la Cour pour cette affaire spécifique, ouvrant ainsi la voie à des poursuites contre des individus précis : Trump lui-même, les commandants militaires israéliens impliqués, les hauts gradés américains ayant planifié les frappes. Le procureur de la CPI, Karim Khan, a déjà montré sa volonté d’enquêter sur des situations politiquement sensibles. Une telle démarche serait explosive.
La pression diplomatique multiforme
En parallèle des démarches juridiques, l’Iran lance une offensive diplomatique tous azimuts. Araghchi a multiplié les contacts avec les ambassadeurs des pays non-alignés, du groupe des 77, des États arabes modérés. Le message : les États-Unis ont violé les règles fondamentales du système international, et si nous n’agissons pas collectivement, aucun pays ne sera à l’abri demain. Cette rhétorique trouve un écho particulièrement fort dans le Sud global, où beaucoup de nations gardent en mémoire les interventions militaires américaines passées : Irak, Libye, Afghanistan, Syrie. La Chine et la Russie, membres permanents du Conseil de sécurité, ont déjà indiqué leur soutien à une enquête internationale indépendante sur les événements de juin. Si Moscou ou Pékin décident de bloquer toute résolution américaine au Conseil de sécurité ou de proposer leur propre résolution condamnant les frappes, la situation pourrait rapidement dégénérer en crise institutionnelle onusienne majeure.
Les implications géopolitiques explosives
Le Moyen-Orient au bord du gouffre
Si l’Iran obtient gain de cause devant les instances internationales, ou même si ses accusations gagnent simplement en crédibilité dans l’opinion publique mondiale, les répercussions géopolitiques seront massives. Téhéran pourrait considérer qu’il a désormais une justification légale et morale pour des représailles futures contre les intérêts américains dans la région. Les groupes alliés de l’Iran – le Hezbollah au Liban, les milices chiites en Irak, les Houthis au Yémen, le Hamas à Gaza – pourraient interpréter ce verdict comme un feu vert pour intensifier leurs actions contre Israël et les forces américaines. Le risque d’une nouvelle escalade militaire, peut-être encore plus dévastatrice que celle de juin, plane comme une épée de Damoclès. Les États du Golfe, déjà nerveux face à la volatilité régionale, pourraient reconsidérer leurs alliances. L’Arabie saoudite, qui tentait un rapprochement prudent avec l’Iran via la médiation chinoise, pourrait accélérer cette normalisation si elle perçoit Washington comme un allié imprévisible et juridiquement vulnérable.
La crédibilité américaine en lambeaux
Pour les États-Unis, l’affaire représente un désastre en termes de soft power. Comment Washington peut-il continuer à se présenter comme le garant de l’ordre international fondé sur des règles si son propre président admet publiquement avoir dirigé une opération militaire massive sans mandat du Conseil de sécurité, sans déclaration de guerre, et en violation flagrante de multiples traités internationaux ? Cette contradiction mine la crédibilité américaine sur tous les autres dossiers. Quand Washington dénonce les violations russes en Ukraine, quand il critique les actions chinoises en mer de Chine méridionale, les réponses fusent désormais : et l’Iran en juin 2025 ? Cette rhétorique du « whataboutism » est efficace précisément parce que l’aveu de Trump lui donne une base factuelle solide. Les alliés européens des États-Unis se retrouvent dans une position inconfortable, obligés de défendre publiquement leur partenaire transatlantique tout en sachant que ses actions étaient probablement illégales selon le droit international qu’ils prétendent tous défendre.
La montée en puissance juridique de l’Iran
Pour l’Iran, cette bataille juridique représente une opportunité stratégique unique. Téhéran a longtemps souffert d’une image internationale négative, perçu comme un État paria, un sponsor du terrorisme, un régime théocratique oppressif. Mais en se positionnant comme victime d’une agression internationale injustifiée et en utilisant habilement les mécanismes juridiques du système onusien, l’Iran peut renverser ce narrative. Soudainement, ce n’est plus Téhéran le hors-la-loi, mais Washington et Tel-Aviv. Cette inversion symbolique a une valeur immense dans le court diplomatique mondial. Elle permet à l’Iran de renforcer ses alliances avec des pays qui partagent une méfiance envers l’unilatéralisme américain. Elle légitime également, aux yeux de certains, les actions passées et futures de l’Iran comme relevant de la légitime défense plutôt que de l’agression. Cette bataille des perceptions pourrait redéfinir les équilibres régionaux pour les décennies à venir.
Conclusion
Le 13 novembre 2025, le monde observe une bataille juridique et diplomatique d’une intensité rare. L’Iran, fort de l’aveu maladroit de Donald Trump, lance une offensive tous azimuts pour tenir les États-Unis responsables des frappes de juin qui ont coûté la vie à plus de mille personnes. Cette démarche dépasse largement le cadre bilatéral irano-américain. Elle interroge les fondements mêmes du système international : peut-on encore parler d’un ordre fondé sur des règles quand la plus grande puissance mondiale admet publiquement avoir violé ces règles ? Les réparations exigées par Téhéran – potentiellement plus de cent milliards de dollars – ne seront probablement jamais payées. Washington refusera, comme il l’a fait dans l’affaire Nicaragua. Mais le coût réputationnel, politique et stratégique pour les États-Unis sera considérable. Et l’Iran aura démontré qu’il peut utiliser les armes du droit international aussi efficacement que les missiles balistiques.
Au-delà des manœuvres juridiques et diplomatiques, il reste une question centrale, terrifiante dans sa simplicité : avons-nous atteint un point où la violence d’État, même massive, même documentée, même avouée, ne produit plus aucune conséquence réelle ? Mille cent morts. Des installations nucléaires civiles bombardées. Des hôpitaux frappés. Des enfants ensevelis. Et la réponse internationale pourrait se résumer à des débats procéduraux interminables, à des résolutions bloquées au Conseil de sécurité, à des compensations jamais versées. Cette perspective est désespérante. Elle suggère que le droit international n’est qu’un ornement rhétorique dont se parent les puissants quand cela les arrange, et qu’ils jettent sans hésitation dès que leurs intérêts l’exigent. Pourtant, l’Iran insiste. Araghchi continue de frapper à toutes les portes. Parce qu’abandonner cette bataille signifierait accepter que la force brute est la seule loi qui compte. Et peut-être, juste peut-être, cette obstination finira par créer une fissure dans l’armure de l’impunité.