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Les mensonges sur l’immigration et les « criminels »

Depuis son discours d’investiture en janvier 2025, Trump a répété sans relâche cette affirmation infondée : le gouvernement américain « offre un sanctuaire et une protection aux criminels dangereux, dont beaucoup proviennent de prisons et d’institutions psychiatriques et qui sont entrés illégalement dans notre pays depuis le monde entier. » Aucune vérification des faits ne soutient cette déclaration. Aucune donnée crédible ne confirme cette invasion fantasmée de délinquants étrangers. Pourtant, Trump la martèle, encore et encore, dans chaque discours, chaque interview, chaque rassemblement. Il prétend que des « villes sanctuaires » auraient protégé « 268 000 criminels »—un chiffre sorti de nulle part, démenti par tous les experts, mais répété jusqu’à ce qu’il acquière dans l’esprit de millions d’Américains une aura de vérité. C’est la technique du mensonge répété : si vous dites quelque chose assez souvent, assez fort, avec assez de conviction, cela finit par devenir réel pour ceux qui veulent y croire. Et Trump sait exactement comment exploiter ce mécanisme psychologique, comment transformer la peur en arme politique, comment faire de l’immigration le bouc émissaire de tous les maux américains. Il suffit de regarder l’histoire : en 2015, il accusait déjà les Mexicains d’être des « violeurs » et des « criminels ». En 2024, il prétendait que des migrants haïtiens mangeaient les animaux domestiques—une absurdité si grotesque que même ses propres conseillers ont dû se mordre les lèvres.

Le fantasme du canal de Panama contrôlé par la Chine

Dans son discours d’investiture, Trump a affirmé avec aplomb que « c’est la Chine qui gère le canal de Panama ». Une déclaration qui a laissé les experts pantois. La Chine n’exploite pas le canal de Panama. Ce sont les Panaméens qui le gèrent, depuis que les États-Unis leur ont transféré le contrôle en 1999. Oui, des entreprises chinoises ont des investissements dans la région, comme elles en ont partout dans le monde. Mais de là à prétendre que Pékin « contrôle » cette voie maritime stratégique, il y a un gouffre que seul Trump ose franchir avec une telle désinvolture. Pourquoi ce mensonge? Pour alimenter la paranoïa anti-chinoise qui structure désormais toute la politique extérieure américaine. Pour justifier des politiques agressives, des droits de douane punitifs, une rhétorique belliqueuse. Trump sait que la Chine fait peur aux Américains—elle représente la puissance montante, le concurrent économique, la menace géopolitique. Alors il invente des scénarios où la Chine serait déjà en train de prendre le contrôle d’infrastructures stratégiques américaines, où les États-Unis seraient déjà en train de perdre la bataille. Et peu importe que ce soit faux—ce qui compte, c’est l’émotion que cela génère, la peur viscérale qui pousse les gens à se rallier derrière un leader « fort » qui promet de les protéger.

L’obligation des véhicules électriques qui n’existe pas

Trump a promis lors de son investiture de « révoquer l’obligation des véhicules électriques, sauvant ainsi l’industrie automobile et respectant mon engagement sacré envers nos grands travailleurs américains de l’automobile. » Un seul problème : cette obligation n’existe pas. Il n’y a jamais eu de mandat fédéral forçant les Américains à acheter des véhicules électriques. Il existe des incitations fiscales, des normes d’émissions que les constructeurs doivent respecter, des objectifs environnementaux ambitieux—mais aucune loi n’oblige quiconque à abandonner sa voiture à essence pour une Tesla. Pourquoi alors inventer cette fiction? Parce que Trump sait que les travailleurs de l’automobile traditionnelle ont peur de l’électrification, qu’ils craignent pour leurs emplois dans les usines de moteurs à combustion. En créant un ennemi imaginaire—cette « obligation » tyrannique imposée par les élites écologistes—il se positionne en sauveur, en défenseur des cols bleus contre les bureaucrates de Washington. C’est un mensonge stratégique, calculé pour séduire une base électorale spécifique. Et cela fonctionne, parce que personne ne prend le temps de vérifier, parce que les médias conservateurs relaient sans critique, parce que la vérité importe moins que le récit.

Les relations commerciales avec le Canada minimisées

Lors de sa rencontre avec Mark Carney, le nouveau premier ministre du Canada, Trump a affirmé que les États-Unis ne font « pas beaucoup d’affaires » avec leur voisin du Nord. C’est objectivement faux. Le Bureau du représentant américain au commerce le confirme sans ambiguïté : en 2024, le Canada était la première destination des exportations américaines et la troisième plus grande source d’importations. Les échanges commerciaux entre les deux pays représentent des centaines de milliards de dollars chaque année. Des milliers d’entreprises américaines dépendent de chaînes d’approvisionnement intégrées avec le Canada. Des millions d’emplois américains sont liés à ce partenariat économique. Pourtant, Trump minimise cette réalité, la balaie d’un revers de main, parce qu’elle ne cadre pas avec sa narration de guerre commerciale, de protectionnisme agressif, de « Make America Great Again » qui exige des ennemis extérieurs à combattre. En dénigrant l’importance du Canada, il prépare le terrain pour des politiques commerciales destructrices, pour des droits de douane qui finiront par appauvrir les consommateurs américains eux-mêmes.

Je me demande parfois si Trump croit à ses propres mensonges. S’il a tellement répété ces fictions qu’elles sont devenues pour lui une réalité parallèle, un univers où les faits n’ont plus d’importance, où seule compte la puissance du récit. Ou s’il sait parfaitement ce qu’il fait—s’il ment en toute conscience, avec cynisme, en calculant froidement l’effet de chaque déclaration trompeuse sur son auditoire. Peut-être que la distinction n’a plus d’importance. Peut-être que le mensonge est devenu sa nature même, sa façon d’être au monde, son langage politique. Et ce qui me terrifie vraiment, c’est que cela semble fonctionner—encore aujourd’hui, malgré tout, des millions d’Américains croient chaque mot qu’il prononce.

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