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Décrypter le langage codé de Trump

Pays du tiers-monde. Cette expression résonne étrangement dans la bouche de Donald Trump. Officiellement, elle désigne les nations en développement, celles qui n’appartiennent ni au bloc occidental capitaliste ni au bloc soviétique de la Guerre froide. Une terminologie datée, dépassée, que les experts en relations internationales ont depuis longtemps abandonnée au profit de termes plus neutres comme pays en développement ou pays du Sud. Mais Trump n’est pas un expert en relations internationales. Il est un communicant hors pair qui sait exactement quel effet produisent ses mots. Quand il parle de pays du tiers-monde, il ne fait pas référence à une classification économique ou géopolitique. Il évoque un imaginaire. Celui de nations arriérées, dangereuses, incompatibles avec les valeurs occidentales. Et c’est précisément ce que Mark Kelly dénonce. Pour le sénateur de l’Arizona, l’expression n’est qu’un euphémisme. Un code. Une manière de dire sans dire. De suggérer sans affirmer. De cibler certaines populations sans les nommer explicitement. Quand Trump dit pays du tiers-monde, il pense personnes de couleur brune. Quand il parle d’incompatibilité avec la civilisation occidentale, il parle de race, de religion, de culture. Et cette lecture n’a rien d’une interprétation abusive ou d’une récupération politique.

Elle s’appuie sur des années de déclarations, de politiques, de décisions qui toutes pointent dans la même direction. Depuis son entrée en politique, Trump a construit son discours sur l’immigration autour d’une idée simple mais puissante : l’Amérique est menacée par des étrangers qui ne partagent pas ses valeurs. Il a parlé de criminels mexicains, de terroristes musulmans, de migrants venus de mauvais pays. Il a instauré un Muslim ban interdisant l’entrée sur le territoire américain aux ressortissants de plusieurs pays à majorité musulmane. Il a séparé des enfants de leurs parents à la frontière mexicaine. Il a construit un mur. Et maintenant, il veut suspendre toute immigration en provenance de pays qu’il qualifie de tiers-monde. La cohérence est frappante. Tout comme l’est le profil des pays visés. Les dix-neuf nations dont les détenteurs de cartes vertes vont faire l’objet d’un réexamen approfondi ont un point commun : elles sont toutes situées en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie ou en Amérique latine. Afghanistan, Birmanie, Tchad, République du Congo, Guinée équatoriale, Érythrée, Haïti, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Yémen, Burundi, Cuba, Laos, Sierra Leone, Togo, Turkménistan, Venezuela. Aucun pays européen. Aucune nation à majorité blanche. Le message est limpide.

La rhétorique de l’exclusion

Mark Kelly ne s’est pas contenté de critiquer les mots de Trump. Il a aussi dénoncé les actions de son administration. Depuis le début de son mandat, le président a déployé des agents de l’Immigration and Customs Enforcement dans les grandes villes américaines pour atteindre des niveaux record d’expulsions. Et contrairement à ce qu’il avait promis, ces opérations ne ciblent pas uniquement les criminels dangereux, les membres de gangs ou les trafiquants de drogue. Elles touchent aussi des résidents de longue date, des personnes sans casier judiciaire, des familles entières. Selon les statistiques de l’ICE, plus des deux tiers des quelque cinquante-trois mille personnes arrêtées et détenues mi-novembre n’avaient aucune condamnation pénale. Ce sont des travailleurs, des parents, des voisins. Des gens qui vivent aux États-Unis depuis des années, parfois des décennies. Qui ont construit leur vie ici. Qui paient leurs impôts, envoient leurs enfants à l’école, participent à la vie de leur communauté. Et pourtant, ils sont arrêtés, détenus, expulsés. Parce qu’ils n’ont pas les bons papiers. Parce qu’ils viennent des mauvais pays. Parce qu’ils ne correspondent pas à l’image que Trump se fait d’un bon immigrant. Kelly voit dans ces pratiques la confirmation de ce qu’il dénonce : une politique migratoire fondée non pas sur la sécurité nationale ou l’intérêt économique, mais sur des critères raciaux et culturels.

Le sénateur a été particulièrement cinglant dans ses propos. Il a accusé Trump de rompre des communautés, de séparer des familles, de créer un climat de peur et de méfiance. Il a rappelé que l’Amérique s’est toujours définie comme une nation d’immigrants, un creuset où se mélangent les cultures, les religions, les origines. Et il a affirmé que les politiques de Trump trahissent cet héritage. Qu’elles sont profondément anti-américaines. Cette accusation est lourde de sens. En qualifiant les actions du président d’anti-américaines, Kelly ne se contente pas de critiquer une politique. Il remet en question la légitimité même de cette politique au regard des valeurs fondatrices du pays. Il suggère que Trump, en voulant exclure certaines populations, s’attaque à l’essence même de ce qui fait l’Amérique. Et cette charge résonne d’autant plus fort qu’elle vient d’un homme dont le patriotisme ne peut être mis en doute. Kelly a servi son pays en tant que pilote de chasse, puis en tant qu’astronaute. Il a risqué sa vie à plusieurs reprises. Il incarne le service désintéressé, le courage, le sacrifice. Quand un homme comme lui accuse le président d’être anti-américain, ça pèse. Ça compte. Ça fait réfléchir.

Les mots ont un pouvoir. Un pouvoir immense. Ils peuvent construire ou détruire. Rassembler ou diviser. Éclairer ou obscurcir. Et Trump le sait. Il a toujours su jouer avec les mots, les tordre, les manipuler pour servir son agenda. Pays du tiers-monde. Civilisation occidentale. Incompatibilité. Ces termes ne sont pas choisis au hasard. Ils véhiculent une vision du monde. Une hiérarchie. Une exclusion. Et quand Mark Kelly les décrypte, quand il dit tout haut ce qu’ils signifient vraiment, il nous force à regarder la vérité en face. À reconnaître ce que nous savions déjà mais que nous préférions ignorer. Que derrière les discours sur la sécurité nationale se cache souvent autre chose. Quelque chose de plus sombre. De plus ancien. De plus profond.

Sources

Sources primaires

Washington Examiner, Mark Kelly says Trump’s ‘third world’ migration pause about keeping ‘brown people’ out, 30 novembre 2025. NBC News, Mark Kelly says Trump migrant crackdown shows ‘they don’t want Brown people coming’: Full interview, 30 novembre 2025. Reuters, Trump vows to freeze migration from ‘Third World Countries’ after D.C. attack, 28 novembre 2025. CNN, US will reexamine all green cards issued to people from 19 countries as Trump administration ramps up immigration crackdown, 27 novembre 2025. CNN, National Guard shooting, 28 novembre 2025. NPR, Trump administration pausing all asylum decisions after National Guard shooting, 28 novembre 2025. BBC, US halts all asylum claim decisions after National Guard shooting, 28 novembre 2025.

Sources secondaires

Wikipedia, 2025 Washington, D.C., National Guard shooting, consulté le 30 novembre 2025. Reuters, Officials criticize Biden vetting, but Afghan shooting suspect was granted asylum under Trump, 27 novembre 2025. CNN, What is Operation Allies Welcome, the program officials say brought DC shooting suspect to US, 27 novembre 2025. Military.com, What is Operation Allies Welcome, Which Brought in Afghan Refugees, 29 novembre 2025. Al Jazeera, Trump pauses immigration from ‘Third World’ countries, 28 novembre 2025. The Guardian, National Guard member Sarah Beckstrom has died after shooting in Washington DC, Trump announces, 28 novembre 2025. Newsweek, Map Shows 19 Countries Impacted as Trump Threatens Migration Halt, novembre 2025. Hindustantimes, Trump announces halt to migration from third world nations: Full list of affected countries, 28 novembre 2025.

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