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Un record qui en dit long sur le chaos organisé

Cinquante-sept nominations retirées. Cinquante-sept. Ce chiffre, froid et brutal, résonne comme un aveu d’échec dans les couloirs feutrés du Sénat américain. Depuis son retour triomphal à la Maison-Blanche en janvier 2025, Donald Trump a retiré près du double des nominations qu’il avait abandonnées durant la première année de son premier mandat. Un record absolu qui dépasse même celui de Joe Biden, pourtant déjà critiqué pour ses difficultés à faire confirmer ses candidats. Les données du Sénat ne mentent pas : vingt-deux retraits en 2017, vingt-neuf pour Biden en 2021, et maintenant ce chiffre vertigineux qui témoigne d’un dysfonctionnement profond au cœur même de l’appareil présidentiel. Mais derrière ces statistiques se cache une réalité bien plus troublante : un processus de vérification des candidats défaillant, des luttes intestines au sein de l’administration, et une résistance inattendue de sénateurs républicains qui osent enfin dire non à leur propre président. Ce n’est pas simplement une question de chiffres ou de procédures administratives. C’est le symptôme d’une machine politique grippée, où les ambitions personnelles, les calculs politiques et l’incompétence se mêlent dans un cocktail toxique qui menace la crédibilité même de l’exécutif américain.

L’ampleur du phénomène dépasse tout ce que Washington a connu depuis des décennies. Les analystes politiques fouillent les archives, remontent jusqu’à l’ère Reagan, et ne trouvent aucun précédent comparable. Chaque semaine apporte son lot de nouvelles défections, de nominations abandonnées dans l’urgence, de candidats qui disparaissent aussi vite qu’ils sont apparus. Le Sénat, pourtant contrôlé par les républicains avec une majorité confortable, est devenu le théâtre d’une rébellion feutrée mais déterminée. Des sénateurs comme John Kennedy de Louisiane ou Thom Tillis de Caroline du Nord n’hésitent plus à exprimer publiquement leurs doutes sur la qualité du travail effectué par l’équipe présidentielle. Kennedy, avec sa franchise brutale, résume la situation en quelques mots cinglants : certains candidats n’ont manifestement pas été vérifiés correctement, et quelqu’un a décidé de les proposer quand même. Cette admission, venant d’un allié du président, en dit long sur l’état de délabrement du processus de sélection. Les républicains, traditionnellement disciplinés et loyaux envers leur chef, commencent à comprendre qu’avaliser n’importe quelle nomination pourrait créer un précédent dangereux pour les futures administrations démocrates.

Je regarde ces chiffres et je ressens quelque chose de profondément dérangeant. Pas de la colère, pas vraiment. Plutôt une forme de stupéfaction mêlée d’inquiétude. Comment en est-on arrivé là ? Comment une administration, forte de l’expérience d’un premier mandat, peut-elle échouer aussi spectaculairement dans une tâche aussi fondamentale que la sélection de ses propres collaborateurs ? Ce n’est pas de la politique ordinaire. C’est du sabotage involontaire. Et le plus troublant, c’est que personne ne semble vraiment surpris. Comme si nous avions collectivement accepté que le chaos soit devenu la norme, que l’incompétence soit excusable, que les standards puissent être abandonnés au nom de la loyauté politique. Mais à quel prix ? À quel moment allons-nous réaliser que ces dysfonctionnements ne sont pas de simples anecdotes, mais les symptômes d’une crise systémique qui ronge les institutions américaines de l’intérieur ?

Les coulisses d’un système à bout de souffle

Pour comprendre l’ampleur du désastre, il faut plonger dans les mécanismes qui ont conduit à cette situation inédite. Le Bureau du personnel présidentiel, longtemps dirigé par Sergio Gor avant sa nomination comme ambassadeur en Inde, est pointé du doigt par de nombreuses sources proches de l’administration. Des initiés, parlant sous couvert d’anonymat, décrivent un processus de vérification bâclé, où les relations personnelles et les connexions politiques primaient sur la compétence et l’intégrité des candidats. L’affaire Paul Ingrassia illustre parfaitement cette dérive. Ce jeune avocat de trente ans, proposé pour diriger le Bureau du conseiller spécial, a vu sa nomination s’effondrer après la révélation de messages privés dans lesquels il se décrivait comme ayant une « tendance nazie » et utilisait des insultes raciales. Un cauchemar de vérification, selon les termes d’une source proche de la Maison-Blanche, qui n’aurait jamais dû se produire si les procédures normales avaient été respectées. Mais Ingrassia n’est que la partie émergée de l’iceberg. Ed Martin, proposé comme procureur fédéral à Washington, a été retiré après que le sénateur Tillis ait clairement fait savoir qu’il ne soutiendrait pas sa confirmation en raison de ses positions passées en faveur des émeutiers du Capitole.

Le changement de règles au Sénat, adopté en septembre 2025, devait accélérer le processus de confirmation en permettant de valider des groupes illimités de candidats simultanément. Les républicains pensaient faciliter le travail du président, mais ils ont involontairement créé un système qui expose encore plus crûment les failles du processus de sélection. Désormais, lorsqu’un candidat pose problème, il doit être retiré du groupe et faire l’objet d’un vote individuel, ce qui attire immédiatement l’attention médiatique et politique. Cette nouvelle procédure a transformé chaque retrait en mini-scandale, en aveu public d’échec. Plus de trois cents nominations civiles ont été confirmées depuis janvier, un rythme impressionnant qui masque mal les ratés spectaculaires. Car pour chaque succès, il y a maintenant une histoire d’échec, un candidat abandonné, une réputation ternie. Le sénateur Tillis, qui prendra sa retraite à la fin de son mandat, exprime sans détour sa surprise face au nombre de retraits. Il évoque pudiquement des « problèmes de mode de vie » pour expliquer certaines défections, un euphémisme qui cache souvent des révélations embarrassantes sur le passé ou les opinions des candidats.

Il y a quelque chose de profondément ironique dans cette situation. Trump, qui a bâti sa carrière politique sur la promesse de « drainer le marais » de Washington, se retrouve englué dans un bourbier de sa propre création. Les nominations ratées, les vérifications bâclées, les scandales à répétition… tout cela ressemble moins à une stratégie politique qu’à une improvisation permanente. Et ce qui me frappe le plus, c’est le silence assourdissant de ceux qui devraient hurler. Où sont les gardiens de l’intégrité institutionnelle ? Où sont ceux qui devraient exiger des comptes ? Ils sont là, bien sûr, mais leur voix se perd dans le vacarme quotidien de l’actualité, noyée sous le flot incessant de nouvelles controverses. Nous sommes devenus insensibles au scandale, immunisés contre l’indignation. Et c’est peut-être ça, le véritable danger.

Sources

Sources primaires

The Independent – « Trump withdraws record number of nominees to join his administration: report » par Rhian Lubin, publié le 1er décembre 2025. Article détaillant le nombre record de nominations retirées par Trump et les problèmes de vérification rencontrés par l’administration.

Politico – « Record-setting personnel issues are marring Trump’s second term » par Jordain Carney, Alex Gangitano et Calen Razor, publié le 1er décembre 2025. Analyse approfondie des cinquante-sept nominations retirées et des dysfonctionnements du Bureau du personnel présidentiel sous Sergio Gor.

Bloomberg Government – « Trump Nominees Withdraw at Record Rate as Rare GOP Dissent Grows » par Lillianna Byington, publié le 13 novembre 2025. Rapport détaillé sur l’opposition croissante des sénateurs républicains aux nominations de Trump et analyse comparative avec les administrations précédentes.

Données du Sénat américain – Statistiques officielles sur les nominations présidentielles retirées, consultées via Congress.gov en décembre 2025. Source primaire pour les chiffres de cinquante-sept retraits sous Trump en 2025, vingt-deux en 2017, et vingt-neuf sous Biden en 2021.

Sources secondaires

NPR – « Trump pick to lead watchdog agency withdraws after text messages revealed » publié le 21 octobre 2025. Couverture du retrait de Paul Ingrassia suite aux révélations de messages controversés.

Reuters – « Trump nominee Paul Ingrassia withdraws after rare Republican pushback » publié le 21 octobre 2025. Analyse de l’opposition sénatoriale républicaine à la nomination d’Ingrassia.

Fox News – « Trump announces shakeup at top of WH personnel office » publié le 12 octobre 2025. Annonce du remplacement de Sergio Gor par Dan Scavino à la tête du Bureau du personnel présidentiel.

The New York Times – « Trump Announces Longtime Aide Dan Scavino as Head of Personnel » publié le 12 octobre 2025. Profil de Dan Scavino et analyse de sa nomination comme nouveau chef du personnel.

Forbes – « Trump Attacks Senate’s ‘Blue Slip’ Tradition For Judicial Nominees » publié le 17 octobre 2025. Couverture du conflit entre Trump et Chuck Grassley sur la tradition du blue slip.

ABC News – « Senate Republicans push back against Trump’s calls to end ‘blue slips' » publié en 2025. Analyse de la résistance des sénateurs républicains aux demandes de Trump d’abolir le blue slip.

Politico – « Trump pulls nominee for top IRS post who drew conservative activists’ ire » publié le 14 novembre 2025. Rapport sur le retrait de Donald Korb suite à la campagne de Laura Loomer.

Jewish Insider – « Trump refuses to pull Kuwait ambassador pick despite broad opposition » publié en octobre 2025. Couverture de la nomination controversée d’Amer Ghalib comme ambassadeur au Koweït.

The Washington Post – « Tracking Trump’s Cabinet and administration nominations » mis à jour en continu en 2025. Base de données complète des nominations de Trump et de leur statut.

Ballotpedia – « Donald Trump’s Cabinet, 2025 » consulté en décembre 2025. Ressource encyclopédique sur les nominations du cabinet Trump et leur processus de confirmation.

Ce contenu a été créé avec l'aide de l'IA.

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