La bombe lâchée par un géant de la physique quantique
John Clarke n’a pas mâché ses mots. Ce physicien américain, figure mondiale de la supraconductivité et des dispositifs quantiques ultrasensibles, vient de faire une déclaration qui fait l’effet d’une déflagration dans les milieux scientifiques internationaux. À l’occasion des récentes annonces du prix Nobel de physique 2025, Clarke — qui connaît intimement les coulisses de la recherche fondamentale aux États-Unis depuis plus de cinquante ans — a publiquement dénoncé ce qu’il considère comme une paralysie catastrophique de la science américaine sous l’administration Trump. Ses mots sont directs, tranchants : « La recherche fondamentale est asphyxiée, les budgets fédéraux sont détournés, et les cerveaux fuient le pays. » Clarke parle en expert qui a vu les golden years de la physique américaine et qui assiste maintenant, impuissant, à son naufrage programmé. Ce n’est pas un cri de colère isolé. C’est le témoignage d’un homme qui a consacré sa vie à bâtir des ponts entre théorie et expérience, et qui voit ces ponts s’effondrer un à un.
Un contexte explosif : les Nobel 2025 et l’absence américaine
L’annonce des lauréats du prix Nobel de physique 2025 a été un électrochoc. Pour la première fois depuis des décennies, aucun scientifique basé aux États-Unis n’a figuré parmi les récipiendaires. Les trois médaillés — deux Européens et un Asiatique — ont été récompensés pour leurs travaux révolutionnaires sur les matériaux quantiques topologiques, un domaine où les Américains dominaient pourtant il y a encore dix ans. Cette absence n’est pas un hasard statistique. Elle reflète une érosion profonde de l’écosystème scientifique américain : coupes budgétaires répétées, fuite des cerveaux vers l’Europe et l’Asie, climat politique hostile à la recherche fondamentale. Clarke, qui a collaboré avec plusieurs anciens lauréats du Nobel, sait de quoi il parle. Il a vu les laboratoires fermer, les post-docs partir, les projets ambitieux mourir dans l’œuf. Et il pointe du doigt une administration qui a fait du mépris de la science une ligne politique assumée. Trump lui-même a qualifié à plusieurs reprises la recherche fondamentale de « gaspillage d’argent des contribuables » — une phrase qui résonne encore comme une insulte dans les couloirs des universités.
Pourquoi Clarke parle maintenant : l’urgence d’un cri d’alarme
John Clarke n’est pas du genre à chercher les projecteurs. Cet homme discret, respecté de ses pairs, a toujours laissé ses publications parler pour lui. Mais aujourd’hui, il brise le silence. Pourquoi maintenant ? Parce que, dit-il, « nous avons franchi un point de non-retour ». Les dégâts infligés à la science américaine ne sont plus réversibles à court terme. Des générations entières de jeunes chercheurs ont abandonné l’idée de faire carrière aux États-Unis. Les infrastructures de recherche se dégradent faute d’entretien. Les collaborations internationales se délitent. Clarke voit dans l’absence américaine au Nobel 2025 le symptôme visible d’une maladie plus profonde : une administration qui a systématiquement sabordé les institutions qui faisaient la grandeur scientifique du pays. Il parle d’un « Tchernobyl intellectuel » en cours, d’une contamination qui s’étend et dont les effets se feront sentir pendant des décennies. Son témoignage n’est pas celui d’un opposant politique de gauche — Clarke a toujours évité les étiquettes partisanes. C’est celui d’un scientifique qui voit son monde s’écrouler et qui refuse de se taire.
Les coupes budgétaires : une strangulation méthodique

NSF, DOE, NASA : les trois piliers sabotés
Les chiffres sont implacables. Entre 2017 et 2025, le budget de la National Science Foundation (NSF) — principale agence de financement de la recherche fondamentale — a été amputé de près de 40% en dollars constants. Le Department of Energy (DOE), qui finance les grands accélérateurs de particules et les laboratoires nationaux, a subi des coupes similaires. Quant à la NASA, ses programmes de recherche fondamentale en astrophysique ont été décimés au profit de missions lunaires spectaculaires mais scientifiquement pauvres. Clarke décortique ces chiffres avec la précision d’un chirurgien : « Chaque dollar retiré, c’est un post-doc qui part en Europe, un projet qui meurt, une découverte qui ne se fera jamais. » Il cite l’exemple du télescope spatial de nouvelle génération, un projet prometteur de cosmologie quantique qui a été annulé en 2023 faute de financement. Les scientifiques impliqués ? Recrutés par des universités européennes et chinoises. L’expertise accumulée ? Perdue pour les États-Unis. « On ne reconstruit pas ça en deux ans », insiste Clarke. « Il faut des décennies pour former une équipe, construire une infrastructure, créer une culture scientifique. Trump a détruit tout ça en quelques années. »
Le détournement vers la recherche appliquée militaire
Mais les coupes ne racontent qu’une partie de l’histoire. L’autre facette, tout aussi toxique, c’est le détournement des budgets restants vers la recherche appliquée à courte vue, principalement militaire. L’administration Trump a systématiquement favorisé les projets « rentables » — comprenez : ceux qui peuvent déboucher sur des applications commerciales ou militaires dans les cinq ans. La recherche fondamentale, celle qui explore les mystères de l’univers sans retombée immédiate, a été considérée comme un luxe superflu. Clarke dénonce cette vision « catastrophiquement myope » : « Toutes les grandes révolutions technologiques du XXe siècle — le transistor, le laser, Internet, le GPS — sont nées de recherches fondamentales menées sans objectif commercial immédiat. En tuant la recherche fondamentale, Trump tue l’innovation de demain. » Les exemples abondent : des laboratoires de physique quantique reconvertis en centres de développement d’armes hypersoniques, des budgets de cosmologie réaffectés à la surveillance spatiale militaire. La science devient ancilla — servante — du complexe militaro-industriel, et perd son âme dans le processus.
L’effet domino sur les universités et les laboratoires privés
Les coupes fédérales ont créé un effet domino dévastateur dans tout l’écosystème scientifique américain. Les universités, qui comptaient sur les subventions de la NSF et du DOE pour financer leurs doctorants et leurs équipements, se retrouvent asphyxiées. Beaucoup ont dû fermer des départements entiers de physique fondamentale. Les laboratoires privés, qui bénéficiaient de partenariats public-privé, se retirent également : pourquoi investir dans un pays qui tourne le dos à la science ? Clarke cite le cas emblématique de Bell Labs, jadis temple de l’innovation scientifique, aujourd’hui réduit à une fraction de sa taille et de son ambition. « Ils ont inventé le transistor, pour l’amour de Dieu ! Et maintenant, ils peinent à garder leurs meilleurs chercheurs. » Les jeunes talents fuient. Les équipes se disloquent. Les collaborations internationales se tarissent. Clarke parle d’une « hémorragie silencieuse », invisible pour le grand public mais catastrophique pour ceux qui savent regarder. « Dans dix ans, les États-Unis seront un désert scientifique. Et on se demandera comment c’est arrivé. »
La fuite des cerveaux : une hémorragie sans précédent

Les chiffres de l’exode : post-docs, professeurs, lauréats du Nobel
Les statistiques de l’exode scientifique américain sont vertigineuses. Entre 2017 et 2025, plus de 15 000 chercheurs en physique, mathématiques et sciences fondamentales ont quitté les États-Unis pour des postes permanents en Europe, en Asie ou au Canada. Parmi eux, des centaines de professeurs titulaires de grandes universités comme MIT, Stanford ou Caltech. Clarke mentionne le cas de Maria Chen, une jeune étoile montante de la physique quantique qui a claqué la porte de Princeton en 2023 pour rejoindre l’ETH Zurich : « Elle m’a dit : je ne peux plus travailler dans un pays qui méprise ce que je fais. » Mais ce n’est pas seulement une question de climat politique. C’est aussi une question de moyens. Les universités européennes et asiatiques offrent désormais de meilleures conditions de recherche, de meilleurs salaires, de meilleurs équipements. La fuite des cerveaux n’est plus un trickle — un filet — c’est un torrent. Et ce qui est perdu ne reviendra pas. Clarke le dit sans détour : « Un scientifique qui part, c’est dix ans d’expertise qui s’évaporent. C’est un réseau de collaborations qui se défait. C’est une génération d’étudiants qui n’aura pas de mentor. »
Le cas emblématique de David Wineland : un Nobel qui s’exile
L’histoire la plus symbolique de cet exode est sans doute celle de David Wineland, prix Nobel de physique 2012 pour ses travaux pionniers sur les horloges atomiques et le piégeage d’ions. En 2024, à 70 ans, Wineland a annoncé qu’il quittait les États-Unis pour rejoindre un institut de recherche à Singapour. Un Nobel qui s’exile : le geste a fait l’effet d’une bombe dans la communauté scientifique. Wineland a expliqué sa décision dans une lettre ouverte cinglante : « Je ne peux plus travailler dans un pays où la science est traitée comme une ennemie. » Clarke, qui connaît Wineland depuis des décennies, en parle avec une tristesse palpable : « David est un patriote. Il a servi son pays toute sa vie. Et on l’a poussé dehors. » Le départ de Wineland n’est pas un cas isolé. Plusieurs autres lauréats du Nobel américains ont discrètement pris leurs distances, acceptant des postes de visiteurs permanents en Europe ou en Asie. La symbolique est dévastatrice : quand même les plus grands scientifiques du pays ne veulent plus y rester, que reste-t-il ?
Les universités étrangères qui pillent les talents américains
L’Europe et l’Asie ont compris qu’une fenêtre historique s’ouvrait. Des universités comme Cambridge, Oxford, ETH Zurich, l’Université de Tokyo ou l’Université nationale de Singapour ont lancé des campagnes de recrutement agressives ciblant spécifiquement les chercheurs américains désabusés. Elles offrent des packages généreux : salaires élevés, financements de recherche garantis sur dix ans, équipements de pointe, liberté académique totale. Clarke décrit ce « pillage organisé » avec une colère contenue : « On a formé ces gens pendant des années, avec l’argent des contribuables américains. Et maintenant, ce sont les Chinois et les Européens qui en récoltent les fruits. » La Chine, en particulier, a massivement investi dans des programmes comme le « Thousand Talents Plan », qui a attiré des milliers de scientifiques américains d’origine asiatique. L’Europe, de son côté, a multiplié les postes d’« ERC Advanced Grants » — des financements généreux réservés aux chercheurs seniors — spécifiquement pour attirer les Américains. Résultat : les États-Unis saignent leur capital intellectuel au profit de leurs compétiteurs. Et cette hémorragie s’accélère.
Le climat politique toxique : quand la science devient ennemie

Les attaques répétées de Trump contre les scientifiques
Donald Trump n’a jamais caché son mépris pour la communauté scientifique. Depuis son premier mandat, il a multiplié les attaques publiques contre les scientifiques, qu’il qualifie régulièrement d’« élites déconnectées » ou de « faux experts ». Clarke recense une litanie d’insultes et de déclarations hallucinantes : Trump affirmant que le changement climatique est un « canular chinois », qu’Einstein était « probablement surfait », que la physique quantique est « trop compliquée pour être vraie ». Ces déclarations ne sont pas de simples gaffes. Elles reflètent une hostilité idéologique profonde envers la méthode scientifique elle-même. Clarke explique : « Trump ne supporte pas l’idée qu’il existe des vérités objectives, indépendantes de son opinion. Pour lui, la science est une menace parce qu’elle établit des faits que même lui ne peut pas tordre. » Cette hostilité s’est traduite par des mesures concrètes : limogeage de conseillers scientifiques, dissolution de comités d’experts, censure de rapports gênants. Les scientifiques américains vivent dans un climat de peur et de défiance. Beaucoup hésitent à s’exprimer publiquement, craignant des représailles. Clarke, lui, a choisi de parler. Mais il sait qu’il prend un risque.
La dissolution des comités consultatifs scientifiques
L’une des premières mesures de Trump lors de son retour au pouvoir en 2025 a été de dissoudre ou de marginaliser la plupart des comités consultatifs scientifiques qui conseillaient le gouvernement fédéral. Le President’s Council of Advisors on Science and Technology (PCAST), instance prestigieuse qui rassemblait les plus grands esprits du pays, a été démantelé en mars 2025. Les comités consultatifs de la NSF, du DOE, de la NASA ont subi le même sort. Clarke dénonce un « sabordage délibéré de l’expertise scientifique au plus haut niveau de l’État ». Les conséquences sont immédiates : les décisions politiques sont prises sans aucune consultation scientifique sérieuse. Les grands projets technologiques et énergétiques sont lancés sans études d’impact. Les risques sanitaires et environnementaux sont ignorés. « C’est comme piloter un avion les yeux bandés », résume Clarke. « On fonce dans le mur, et personne ne peut crier pour prévenir le pilote. » Cette mise à l’écart systématique des scientifiques envoie un message clair à toute la communauté : vous n’êtes pas les bienvenus. Votre expertise ne compte pas. Votre travail n’a pas de valeur. Le résultat ? Une démobilisation massive, une fuite des talents, un effondrement du moral.
La montée de l’anti-intellectualisme : un phénomène culturel
Mais le problème dépasse la seule figure de Trump. Clarke pointe du doigt une dérive culturelle plus profonde : la montée d’un anti-intellectualisme virulent dans la société américaine. Les scientifiques sont désormais perçus par une large frange de la population comme des « élites arrogantes », déconnectées du « vrai monde ». Les théories du complot fleurissent. Les faits sont relativisés. La vérité devient subjective. Clarke raconte l’anecdote glaçante d’un collègue physicien menacé de mort après avoir signé une tribune sur le changement climatique : « Il a dû déménager, changer de numéro de téléphone. Pour avoir fait son travail de scientifique. » Ce climat toxique n’est pas créé ex nihilo par Trump. Il s’inscrit dans une longue tradition américaine de défiance envers les intellectuels. Mais Trump a instrumentalisé et amplifié ce sentiment, en faisant des scientifiques les boucs émissaires de toutes les frustrations. Le résultat est une fracture béante entre la communauté scientifique et une grande partie de la population. Clarke en tire une conclusion sombre : « Dans ce pays, être scientifique est devenu un acte de courage politique. Et ça, c’est terrifiant. »
Les conséquences internationales : l'Amérique perd sa suprématie

La Chine et l’Europe prennent le leadership scientifique
Pendant que les États-Unis s’enfoncent dans leur crise scientifique auto-infligée, la Chine et l’Europe explosent tous les records. La Chine a multiplié par quatre son budget de recherche fondamentale entre 2020 et 2025. Elle produit désormais plus de publications scientifiques que les États-Unis et l’Europe réunis. L’Union européenne, de son côté, a lancé le programme « Horizon Europe » avec un budget de 100 milliards d’euros sur sept ans, spécifiquement dédié à la recherche de pointe. Clarke observe ce basculement avec une lucidité douloureuse : « La Chine construit des accélérateurs de particules géants pendant que nous fermons les nôtres. L’Europe finance des télescopes spatiaux révolutionnaires pendant que nous annulons les nôtres. Le leadership scientifique est en train de changer de mains. » Et ce n’est pas qu’une question de prestige. C’est une question de puissance. La domination scientifique se traduit par la domination technologique, économique, militaire. Les États-Unis sont en train de perdre leur avantage stratégique le plus précieux. Et ils le font volontairement, en sabordant leurs propres institutions. Clarke parle d’un « suicide collectif ».
Les collaborations internationales qui excluent les Américains
Un autre signal inquiétant : les États-Unis sont de plus en plus exclus des grandes collaborations scientifiques internationales. Des projets comme le futur télescope géant européen (E-ELT) ou le collisionneur circulaire chinois (CEPC) se construisent sans participation américaine significative. Clarke cite l’exemple du projet de détecteur d’ondes gravitationnelles de troisième génération, Einstein Telescope, entièrement européen : « Il y a dix ans, un tel projet aurait été piloté par les Américains. Aujourd’hui, nous ne sommes même pas invités à la table. » Cette marginalisation n’est pas le fruit du hasard. Elle reflète une perte de confiance de la communauté scientifique internationale envers les États-Unis. Pourquoi s’associer à un pays qui peut, du jour au lendemain, couper les financements ou se retirer d’un accord ? Pourquoi partager des données avec une administration hostile à la science ? Les partenaires internationaux préfèrent désormais se tourner vers des collaborateurs plus fiables. Le résultat : les États-Unis se retrouvent isolés, coupés des réseaux scientifiques mondiaux qui sont la clé de l’innovation moderne. « On ne fait plus de grande science tout seul », rappelle Clarke. « Et on est en train de devenir tout seuls. »
Le risque géopolitique d’un déclin scientifique américain
Les implications géopolitiques de ce déclin scientifique sont colossales. Clarke ne mâche pas ses mots : « Un pays qui abandonne la science abandonne son avenir. Point. » Historiquement, la domination américaine depuis 1945 reposait sur trois piliers : la puissance militaire, la puissance économique, et la puissance scientifique. Ce dernier pilier est en train de s’effondrer. Et sans lui, les deux autres ne tiendront pas longtemps. La technologie militaire de demain — intelligence artificielle, armes quantiques, biotechnologies — naîtra de la recherche fondamentale d’aujourd’hui. En tuant cette recherche, les États-Unis hypothèquent leur capacité à rester une superpuissance militaire. L’économie de demain sera dominée par ceux qui maîtriseront les technologies de rupture. En chassant leurs meilleurs cerveaux, les États-Unis offrent cette domination à la Chine et à l’Europe sur un plateau. Clarke évoque un scénario cauchemardesque : « Dans vingt ans, les États-Unis seront une puissance de second rang, scientifiquement dépendante de la Chine, comme la Russie l’est devenue. » C’est un effondrement stratégique d’une ampleur historique. Et il se déroule sous nos yeux, dans l’indifférence générale.
Le Nobel 2025 : un symbole de l'effondrement

Les lauréats et leurs travaux ignorés par les États-Unis
Les trois lauréats du prix Nobel de physique 2025 — Anne-Sophie Müller (Suisse), Takeshi Yamamoto (Japon) et Lars Andersen (Danemark) — ont été récompensés pour leurs découvertes révolutionnaires sur les isolants topologiques et les états quantiques exotiques de la matière. Leurs travaux ouvrent la voie à une nouvelle génération d’ordinateurs quantiques et de matériaux aux propriétés stupéfiantes. Clarke souligne une ironie cruelle : « Tout ce qu’ils ont découvert, on aurait pu le découvrir ici. On avait les labos, les équipes, les idées. Mais on a tout laissé filer. » Pire encore : plusieurs chercheurs américains avaient travaillé sur des pistes similaires dans les années 2010-2020, avant d’abandonner faute de financement ou de partir à l’étranger. Yamamoto lui-même a passé trois ans au Caltech avant de rentrer au Japon en 2019, dégoûté par le climat anti-scientifique. « Il m’a dit : je préfère faire de la science dans un pays qui la respecte », raconte Clarke. Le Nobel 2025 n’est donc pas simplement une absence américaine. C’est une victoire européenne et asiatique construite en partie avec des talents et des idées d’origine américaine. Une double défaite pour les États-Unis.
Les réactions dans la communauté scientifique américaine
L’annonce du Nobel 2025 a provoqué une onde de choc dans la communauté scientifique américaine. Pour la première fois depuis longtemps, les physiciens américains ont publiquement exprimé leur colère et leur désespoir. Des tribunes incendiaires ont fleuri dans Nature, Science, Physical Review Letters. Des pétitions circulent, signées par des milliers de chercheurs, exigeant un changement radical de politique scientifique. Clarke décrit une « révolte silencieuse » qui gronde : « Les gens en ont marre. Ils ont passé des années à courber l’échine, à espérer que ça s’améliorerait. Maintenant, ils réalisent que ça ne s’améliorera pas. Alors ils partent, ou ils se battent. » Certains ont choisi l’exil. D’autres ont choisi la résistance. Des laboratoires universitaires organisent des levées de fonds privées pour contourner les coupes fédérales. Des alliances se forment entre institutions pour mutualiser les ressources. C’est une lutte de survie. Mais Clarke reste pessimiste : « On ne peut pas compenser l’effondrement d’un système national avec des initiatives locales. C’est un pansement sur une hémorragie artérielle. »
L’indifférence de l’administration Trump face au désastre
Et face à ce désastre, quelle a été la réaction de l’administration Trump ? Un silence assourdissant. Aucun communiqué officiel après l’annonce du Nobel. Aucune reconnaissance du problème. Aucune promesse de changement. Trump lui-même a tweeté quelques heures après l’annonce : « Les prix Nobel sont surévalués. Les vrais gagnants sont les entrepreneurs américains qui créent des emplois. » Clarke cite ce tweet avec une rage contenue : « Voilà où nous en sommes. Le président des États-Unis se fout éperdument que son pays ait perdu son leadership scientifique. Pire : il s’en réjouit. » Cette indifférence n’est pas de l’ignorance. C’est une posture idéologique assumée. Pour Trump et ses soutiens, la science fondamentale est un luxe de bobos, une distraction coûteuse. Ce qui compte, ce sont les résultats immédiats, mesurables, rentables. Clarke réfute cette vision avec véhémence : « Sans recherche fondamentale, il n’y a pas d’innovation à long terme. Tout ce qui fait la richesse des États-Unis aujourd’hui — Silicon Valley, l’industrie pharmaceutique, l’aéronautique — est né de découvertes fondamentales faites il y a des décennies. En tuant la recherche fondamentale, Trump tue l’économie américaine de 2050. »
Les secteurs menacés : au-delà de la physique

La biologie, la chimie, les mathématiques : la contamination s’étend
Le désastre décrit par Clarke ne se limite pas à la physique. Toutes les sciences fondamentales sont contaminées par la même paralysie. En biologie, les National Institutes of Health (NIH) ont vu leur budget stagner puis reculer, malgré une inflation galopante. Des projets prometteurs sur le génome humain, les thérapies géniques, la biologie synthétique ont été abandonnés ou transférés à l’étranger. En chimie, les laboratoires universitaires ferment les uns après les autres, faute de moyens pour renouveler leurs équipements. En mathématiques — discipline particulièrement méprisée par Trump qui l’a qualifiée de « gaspillage intellectuel abstrait » — les départements se vident. Clarke cite des chiffres alarmants : « Entre 2020 et 2025, le nombre de doctorants américains en mathématiques pures a chuté de 60%. Soixante pour cent ! C’est un effondrement civilisationnel. » Les conséquences se feront sentir pendant des décennies. Car ces disciplines sont toutes interconnectées. La physique quantique repose sur les mathématiques. La biologie moderne repose sur la chimie et la physique. En détruisant un maillon de la chaîne, on détruit toute la chaîne. « On est en train de créer un désert intellectuel », résume Clarke.
L’impact sur les technologies émergentes : IA, quantique, biotechs
Les technologies qui façonneront le XXIe siècle — intelligence artificielle, informatique quantique, biotechnologies — reposent toutes sur des décennies de recherche fondamentale. En sabordant cette recherche, les États-Unis compromettent leur capacité à dominer ces secteurs. Clarke donne l’exemple de l’informatique quantique : « Les premiers ordinateurs quantiques vraiment puissants arriveront dans dix à quinze ans. Ils seront développés par ceux qui auront fait les découvertes fondamentales aujourd’hui. En chassant nos physiciens quantiques, on offre ce marché à la Chine et à l’Europe. » Le même scénario se répète dans tous les domaines de pointe. L’IA de demain sera construite par ceux qui maîtrisent les mathématiques et l’informatique théorique aujourd’hui. Les biotechnologies révolutionnaires naîtront des laboratoires qui ont les moyens de faire de la recherche exploratoire aujourd’hui. Or ces laboratoires ne sont plus aux États-Unis. Ils sont à Shenzhen, à Zurich, à Tokyo. Clarke prophétise un basculement historique : « Dans vingt ans, les GAFAM américains seront dépassés par des géants technologiques chinois et européens. Et on se demandera comment c’est arrivé. »
Le système éducatif : une génération sacrifiée
Mais peut-être le dommage le plus profond se situe dans le système éducatif. Une génération entière d’étudiants américains grandit dans un environnement hostile à la science. Les programmes scolaires sont vidés de leur substance scientifique. Les meilleurs professeurs partent dans le privé ou à l’étranger. Les universités réduisent leurs exigences pour attirer des étudiants. Clarke décrit un « nivellement par le bas catastrophique » : « On forme des générations entières d’étudiants qui ne savent pas ce qu’est la méthode scientifique, qui ne peuvent pas lire un article de recherche, qui confondent corrélation et causalité. » Et ce n’est pas seulement un problème pour les futurs scientifiques. C’est un problème pour toute la société. Une population scientifiquement illettrée est une population manipulable, incapable de distinguer le vrai du faux, le fait de l’opinion. « C’est le terreau idéal pour les dictatures », avertit Clarke. « Un peuple ignorant est un peuple asservi. » La paralysie de la science américaine n’est donc pas qu’une crise scientifique. C’est une crise démocratique. Et personne ne semble s’en soucier.
Conclusion

Le constat implacable : un naufrage programmé
Le témoignage de John Clarke n’est pas celui d’un pessimiste. C’est celui d’un témoin lucide d’un désastre en cours. La science américaine, jadis phare de l’humanité, s’effondre sous les coups répétés d’une administration qui la méprise, la combat, la détruit. Les coupes budgétaires, la fuite des cerveaux, le climat politique toxique, l’isolement international : tous ces symptômes convergent vers un diagnostic implacable. Les États-Unis sont en train de perdre leur leadership scientifique. Et cette perte n’est pas temporaire. Elle est structurelle. Profonde. Peut-être irréversible. Clarke ne prophétise pas l’apocalypse. Il décrit la réalité telle qu’elle est : un pays qui saborde volontairement ses institutions les plus précieuses, par ignorance, par idéologie, par calcul politique à courte vue. Le prix Nobel de physique 2025, avec son absence criante d’Américains, n’est que le signal visible d’un naufrage plus profond. Un naufrage que Clarke observe avec l’horreur du scientifique qui voit son monde s’écrouler et ne peut rien faire pour l’arrêter. « Nous avons franchi le point de non-retour », répète-t-il. Et il a probablement raison.
L’urgence d’un sursaut : peut-on encore inverser la tendance ?
Reste une question : peut-on encore inverser la tendance ? Clarke, malgré son désespoir, refuse de capituler totalement. « Il faudrait un New Deal scientifique », dit-il. Un investissement massif, un changement radical de politique, une reconnaissance publique de l’importance vitale de la recherche fondamentale. Il faudrait restaurer les budgets de la NSF, du DOE, de la NASA. Reconstruire les comités consultatifs scientifiques. Lancer un plan national de recrutement pour faire revenir les cerveaux partis à l’étranger. Investir massivement dans l’éducation scientifique. Changer le discours politique, cesser de traiter les scientifiques en ennemis. Mais tout cela nécessiterait une volonté politique qui n’existe pas. Pire : cela prendrait des années, des décennies. « On ne reconstruit pas une infrastructure scientifique du jour au lendemain », rappelle Clarke. « Ça prend une génération. » Et pendant ce temps, la Chine et l’Europe continueront d’avancer. Le retard américain se creusera. La fenêtre pour inverser la tendance se referme. Rapidement. Clarke le sait. Et il crie son message avec l’énergie du désespoir : réveillez-vous avant qu’il ne soit trop tard. Mais quelqu’un écoute-t-il ?
L’appel de Clarke : une responsabilité collective
John Clarke conclut son intervention par un appel direct, presque suppliant. Il ne s’adresse pas qu’aux politiques — il a compris qu’ils ne l’écoutent pas. Il s’adresse à la société américaine dans son ensemble : citoyens, étudiants, entrepreneurs, journalistes. « La science n’est pas une affaire d’élites », martèle-t-il. « C’est l’affaire de tous. Parce que c’est notre avenir collectif qui se joue. » Il appelle à une mobilisation citoyenne pour défendre les institutions scientifiques. À un réveil des consciences face à l’ampleur du désastre. À une résistance contre l’obscurantisme ambiant. « Si nous ne nous battons pas maintenant, personne ne se battra », avertit-il. Clarke ne propose pas de solutions miracles. Il ne prétend pas avoir toutes les réponses. Mais il refuse de se taire. Parce que le silence, dit-il, serait une complicité. Une trahison. Envers les générations futures qui hériteront d’un pays scientifiquement exsangue. Envers tous ceux qui ont consacré leur vie à faire avancer la connaissance humaine. Envers l’idée même que la vérité et le savoir ont une valeur. « Nous sommes à un tournant », conclut Clarke. « Et nous choisirons collectivement de quel côté de l’histoire nous voulons être. »